Chapitre 12

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Et si on revenait un peu sur "l'incident", Madison ne se souvenait plus de rien le lendemain matin. C'était le trou noir, il n'y avait plus rien. On aurait dit une parenthèse de prise de conscience, qui s'était refermée aussi vite qu'elle s'était ouverte. Elle avait ré-enfouie au plus profond d'elle-même, ce qui venait seulement de remonter. Elle ne se souvenait plus de rien, mais cela n'empêche qu'elle avait compris que quelques de grave était arrivé. Elle n'avait aucun souvenir de l'événement en question, mais se souvenait très bien des émotions qu'elle avait ressenti.
Alors non, durant ces derniers mois, elle ne savait plus ce qui lui était arrivé, mais petit à petit, lentement, elle sombrait, elle s'effondrait sans bruit, dans son coin. Personne ne comprenait que, une à une, les barrières éphémères de Madison s'effondraient. Qu'elle était au bord du gouffre, que derrière son sourire ravageur, il y avait des larmes. Qu'elle avait repris les codes de sa mère, à chaque fois que tu vas mal, porte un rouge à lèvre clinquant, et personne ne se rendra compte que ça ne va pas. Si tu sens que tu vas flancher, met toi à l'abris des regards, ferme les yeux, respire un bon coup et ça va passer. Mais surtout, ne laisse jamais les autres te voir faible, soit forte, soit une femme forte, car sinon, on te prendra toute ta vie pour une personne fragile. Les gens prendront avec toi des précautions à chaque fois qu'ils s'adresseront à toi, ils auront pitié de toi. Il n'y pas de place pour les faibles sur cette terre, tu écrases ou tu te fais écraser, c'est toi qui décide.
Elle n'avait jamais compris les propos de sa mère, elle les trouvait disproportionnés et injustes, mais depuis quelques temps, ils avaient une résonnance nouvelle. Madison ne voulait pas être perçue comme faible, elle ne voulait plus ressentir cette douleur, elle ne voulait plus rien ressentir du tout. Elle s'était alors construit ces fameuses barrières, ces mêmes barrières qui aujourd'hui cédaient sous le poids de toute une sorte de sentiments divers et variés. Je trouve ça triste de voir cette fille qui avait toute la vie devant elle pour être heureuse, se briser au fil des jours. Encore une fois, je ne cherche pas à amoindrir ses péchés, elle a harcelé des personnes qui lui avaient sûrement rien fait, elle a tué un homme, par accident certes, mais elle a tout de même menti aux autorités sur ses actes pour se protéger, elle a privé des parents de la vérité, elle a sali l'image de ce garçon, elle a vrillé.
Toutes les mauvaises personnes ont un jour vrillé, aucuns d'entre eux n'est arrivé sur cette terre avec le projet de devenir ce qu'ils sont. Ils avaient sûrement des rêves, des espoirs, des projets. Madison voulait devenir professeure des écoles, et si elle n'y arrivait pas, elle voulait au moins pouvoir travailler au contact des enfants. Ça lui tenait vraiment à cœur, elle voulait aider ces futurs adultes à devenir la meilleure version d'eux-mêmes. Depuis toute petite Madison voulait devenir maitresse, déjà à cinq ou six ans, elle aimait jouer à la maitresse avec son frère dans le bureau de leur père. Elle était fière de dire à tous ceux qu'elle croisait que lorsqu'elle serait plus grande, elle voulait faire le même métier que son papa. À chaque fois que son père était à côté d'elle, il avait cette petite lueur dans les yeux. Il était fier de sa petite princesse comme il aimait l'appeler.
Parfois Madison repense à lui, et elle ne peut pas s'empêcher de pleurer, à la simple pensée, de ce père qu'elle admirait tant, et qui lui manque tant. S'il avait été encore là, les choses se serait pas passé comme ça, lui mieux que quiconque aurait compris que sa petite princesse n'allait pas bien, et il s'en serait aperçu dès le commencement. Il aurait tout compris en un seul regard, et il serait allé casser la gueule à celui qui aurait osé faire du mal à sa petite princesse. Il n'aurait pas laissé sa petite princesse tomber dans ce cercle d'autodestruction. Il aurait aidé sa petite princesse à se relever, à surmonter tout ça. Non, il ne lui aurait pas conseillé d'oublier, il l'aurait regardé dans les yeux, et aurait su choisir les meilleurs mots pour lui faire comprendre que malgré la douleur, on se relève toujours, que même si c'est dur à comprendre, ce qui s'était passé fera d'elle la personne qu'elle sera, et qu'un jour elle comprendra tout. Son père aurait pu l'aider à se relever de tout, et même du pire. Cet après-midi d'été, il aurait dû être là. Mais il y avait longtemps qu'il n'était plus là pour sa petite princesse. Pourquoi papa as-tu abandonné ta petite princesse que tu aimais tant ?

𝑴𝒂𝒅𝒊𝒔𝒐𝒏 𝑩𝒍𝒂𝒌𝒆Où les histoires vivent. Découvrez maintenant