Chapitre 10

45 3 0
                                    

Ce jour-là, Madison était seule à la maison. Cela n'était pas surprenant, son frère étant en pleine adolescence, il passait ses journées à traîner avec ses "potes", et sa mère sortait presque tous les jours. Madison était en pleine partie de son jeu préféré, quand elle entendit la sonnette de l'entrée. Elle courut voir de qui il s'agissait, mais elle se souvint des conseils avisés que lui avait un jour donné sa mère : "Vérifie toujours de qui il s'agit avant d'ouvrir la porte, et si tu ne connais pas la personne, ne lui ouvre sous aucun prétexte.". Elle demanda alors au travers de la porte, qui venait sonner cher elle. La personne lui répondit qu'il s'agissait du père de Louis. Madison lui ouvrit alors la porte, elle avait peur qu'il lui soit arrivé malheur. Il prétexta vouloir parler à sa mère. Madison lui répondit que sa mère n'était jamais à la maison en pleine journée, elle était surprise que son voisin ne s'en soit jamais rendu compte avant. Son étonnement devait se lire sur son visage, puisqu'il répliqua sans attendre, qu'il n'y avait plus pensé, et lui demanda s'il pouvait entrer et attendre le retour de sa mère. Madison n'y voyait aucune objection, mais elle insista sur le fait que sa mère se serait sûrement pas de retour de sitôt, et qu'il serait bête qu'il perde son temps pour rien. Il tenta alors de riposter, mais ne trouva pas d'arguments assez valables pour s'incruster dans le petit salon tranquille de la famille. Il la remercia et la salua poliment avant de partir en direction de sa maison.
À cette vue, Madison eu des frissons, mais ne parvint pas à comprendre pourquoi, cette entrevue, lui avait laissé une impression de déjà vue. Le lendemain, Louis vint frapper à la porte, Madison l'accueillit comme elle le faisait à chaque fois qu'elle le voyait. Cependant, il y avait quelque chose dans le comportement de Louis, qui trahissait son inquiétude. Ils restèrent trente minutes sans oser se regarder dans les yeux. Louis finit par briser la glace, et lui demanda si son père était passé la veille. Elle répondit que non, qu'elle n'avait aucun souvenir d'une quelconque entrevue avec son père. Bien sûr elle mentait. Était-ce par réflexe, par intuition, par honte ? Je ne sais pas, mais ce jour-là, elle le regarda droit dans les yeux et lui mentit. Mais était-ce seulement un mensonge ? Il est vrai qu'elle n'avait aucun souvenir de cette entrevue, de cette entrevue qui avait pourtant bien eu lieu, et pourtant, de cette entrevue il ne restait plus rien, pas même une once de souvenir, non, il n'y avait plus rien du tout.
De temps en temps, dans ses rêves, lui revenait des bribes de souvenirs, qu'elle associait alors à des rêves. Le pouvoir de sélection de sa mémoire était assez impressionnant. Alors non, ce jour-là, elle ne lui avait pas vraiment menti. Elle n'avait plus jamais revu le père de Louis après ce jour, elle déclinait inconsciemment toutes les invitations où elle risquerait de croiser son père. C'était devenu plus fort qu'elle, dès qu'elle sortait de chez elle, elle se retournait toutes les cinq minutes pour vérifier que personne ne la suivait, elle évitait de croiser le regard des hommes et mêmes celui des garçons de son âge.
Alors oui, ce jour-là, il s'était passé quelque chose, quelque chose dont Madison n'arrivait pas à remettre le doigt dessus. Petit à petit, la vie reprit son court normal, et Madison ne pensa plus cette sensation de malaise qui l'habitait. Oui, c'était le contenu de cette entrevue qui lui était revenue en mémoire le jour de "incident". Madison s'était prise une véritable claque. Elle était là, sur le palier, les yeux écarquillaient, elle était là, et elle n'a rien fait. Elle est montée à l'étage comme si de rien était, sans même prendre le temps de retirer sa veste. Elle était là, leurs regards s'étaient croisés. Elle n'avait pas pu l'ignorer, elle l'avait compris, et pourtant elle n'a rien fait. En silence, elle appelait à l'aide, mais rien, pas de son, pas de réponse. Ce jour-là, elle avait besoin d'elle, et elle n'était pas là, elle n'était plus là. Elle avait atterri sur une autre planète, elle avait changé de langue, elle ne comprenait plus rien aux mots qu'elle prononçait. Elle était devenue une étrangère dans sa propre maison.

𝑴𝒂𝒅𝒊𝒔𝒐𝒏 𝑩𝒍𝒂𝒌𝒆Où les histoires vivent. Découvrez maintenant