Help Me || bucky barnes

Chapitre II - Himself

"Pour être soi-même, il faut être quelqu'un."
Stanislaw Jerzy Lec

Les coups de feu emplissaient les rêves du brun, tout le temps les mêmes. Ou en tout cas, venant de la même personne. Lui. Les cris des témoins condamnés, le sang des victimes coulant sur le sol. Le jeune homme se réveilla en sursaut à l'entente d'un énième coup de feu, tremblant. Il se redressa sur son fauteuil et examina en vitesse ses mains pour trouver une quelconque trace de sang. Mais il n'avait rien, comme pour les deux cents autres nuits qu'il avait passées avec ces mêmes cauchemars. Il reposa sa tête contre la vitre de la voiture qu'on lui avait offerte puis ferma les yeux, calmant par la même occasion les battements de son cœur.

Il regarda l'heure sur le tableau de bord de l'automobile et remarqua qu'il n'était que cinq heures du matin. Il savait qu'il n'arriverait plus à se rendormir, alors il mit le contact à l'Audi et sortit du parking de l'hôtel. N'ayant presque aucun argent de poche, il ne voulait pas se payer de chambre alors il restait dans sa voiture, basculant le siège en arrière pour une position un tout petit peu plus confortable.

Il reprit donc la route, en direction d'une destination encore inconnue. Il voulait fuir tout ce qui le reliait à son passé, que ce soit des bons ou bien des mauvais moments. Il roulait sur l'autoroute, aucune voiture à l'horizon lorsqu'un panneau retint son attention.

- "Depuis quand on autorise les gens à aller au Nouveau-Mexique ? Se demanda-t-il dans un murmure."

Les seuls souvenirs qu'il avait étaient ceux qu'Hydra lui avait implantés dans la cervelle alors il n'avait aucune idée que l'ancien état militaire soit devenue un véritable état, accueillant des milliers de touristes chaque année. Curieux, il prit la sortie et suivit les panneaux, le conduisant dans de petites routes ensablées. Son téléphone se mit à sonner et il décrocha assez rapidement, utilisant le Bluetooth de la voiture.

- "Bucky ?

- Steve. Serra-t-il les dents.

- Où est-ce que tu es ?

- Là où tu n'es pas. Fit-il simplement en prenant un virage.

- T'Challa m'a dit que tu avais décidé de partir. Pourquoi ?

- J'en ai marre de ressasser le passé et d'essayer de me reconstruire. J'ai besoin d'autre chose."

Le brun entendit un soupire à travers l'appel et il ne put s'empêcher d'éprouver une once de regret suite à ce choix prit sur un coup de tête. Il passa une main sur son visage pour se tenir éveillé et Steve reprit, plus calmement.

- "Pourquoi tu ne m'en as pas parlé ?

- Je n'en avais aucune envie.

- Mais je suis ton ami, j'aurais pu t'aider.

- Je vais prendre du recul et si je ne trouve rien de satisfaisant en cours de route, je reviendrai.

- Tu me le promets ?

- Oui Steve. Je dois te laisser j'ai de la route à faire. Salut.

- Atten-"

Il n'en fit rien et raccrocha au nez de son meilleur ami. Il posa son coude sur le bord de la vitre, ne tenant le volant qu'à une seule main et continua de rouler durant de longues heures. La fatigue ne pointait pas le bout de son nez mais un début de migraine lui attaqua le cerveau alors il s'arrêta sur le bas-côté pour s'aérer. Il sortit de la voiture et s'appuya contre la portière arrière, regardant le Soleil se lever tout doucement sur le paysage estival. Il coupa le contact à la voiture et récupéra les clefs avant de prendre une veste dans le coffre afin de cacher son bras et d'aller marcher un peu.

Ses mains enfoncées dans ses poches et sa capuche sur la tête, aucune chance qu'il se fasse reconnaître. Il partit marcher dans l'herbe humidifiée par la légère rosée matinale et s'installa au pied d'un immense pin au bord d'une falaise. Il se réchauffait doucement sous les légers rayons de soleil qui l'atteignait et ferma les yeux avant d'appuyer sa tête contre le tronc derrière lui. Une légère brise le fit doucement sourire mais aussi frissonner, faisant couiner les mécanismes de son bras gauche. Il perdit rapidement son sourire, se rappelant qu'il n'aurait jamais le bonheur d'un homme normal, sans bras de vibranium.

Il rouvrit les yeux et put entendre des voix sur le sentier menant à la falaise où il était installé. Il se releva, ne voulant pas être dérangé, et repartit vers sa voiture. Il croisa un couple souriant qui le gratifia de doux sourires amicaux, il se força à esquisser un rictus pour ne pas paraître trop étrange et se dirigea en vitesse vers l'Audi. Il remonta à bord et mit les clefs sur le contact avant de soupirer et d'appuyer son crâne sur le repose-tête de son fauteuil. Il ferma les yeux et les cris envahirent de nouveau son esprit. Il grogna et frappa son volant de sa main de chair, déclenchant le klaxon qui résonna dans ce paysage si silencieux.

Sa main droite était désormais tremblante, il ne s'attendait absolument pas à une telle réaction de la part de son corps. Il ne se savait pas aussi faible. Il remarqua une rougeur se formant sur ses doigts et il se pencha pour ouvrir la boîte à gants, sortant la trousse de secours. Il enroula rapidement sa main dans la bande et il rangea rageusement la petite trousse. Il ne voulait plus être faible mais depuis son réveil, son corps ne réagissait plus comme avant. Les blessures physiques apparaissaient bien plus sur lui et sa sensibilité émotionnelle était ridicule.

Une larme solitaire glissa sur sa joue et il inspira longuement, s'empêchant d'éclater en sanglot. Il était bien plus fort que ça. Il avait passé plus de soixante ans à être manipulé, torturé et utilisé par une organisation complètement givrée -sans jeu de mots- et ce n'était pas de simples souvenirs qui allaient le mettre à terre. Il sécha cette larme et démarra la voiture avant de reprendre la route, se dirigeant vers où son coeur l'amenait.