Il était huit heure et quart, elle était en retard pour aller à son travail. Pendant la nuit son immeuble avait souffert d'une panne de courant, et son réveil n'avait pas sonné. Elle courait donc dans la rue, zigzagant entre les piétons, arrivant enfin sur le trottoir en face de l'immeuble de son travail. Elle commença à traverser lorsque quelqu'un attrapa son bras. Un camion passa à ce moment-là juste devant elle et l'aurait sûrement fauchée si on ne l'avait pas retenue. Elle se tourna vers la personne derrière elle et découvrit un jeune homme aux yeux turquoise.
"Merci..."
Souffla-t-elle, sans voix.
"Faites attention, la prochaine fois."
Répondit-il avant de partir. Elle le regarda s'éloigner quelques secondes, avant de rejoindre le trottoir d'en face. Toute la journée, elle repensa à cet inconnu qui l'avait fusillée du regard. Le recroiserait-elle à nouveau?
"Deux sous pour ta pensée."
Sourit Armin, son collègue de bureau.
"Pardon?"
Émergea-t-elle, la seconde d'avant perdue dans ses pensées. Son ami blond rit un peu.
"As-tu fini le logo?"
Elle regarda à tour à tour son écran et sa tablette graphique faisant Armin sourit encore une fois.
"D'accord, d'accord, je te le redemanderai plus tard.
- Je n'ai pas du tout avancé!"
Se rendit-elle compte soudainement.
"Tu as le temps, encore."
La rassura-t-il avant de se replonger dans son travail. Elle réussit finalement à se concentrer sur son insignifiant logo avant de l'envoyer à leur manager. Elle rentra chez elle et se coucha vite, se rappelant encore du regard bouleversant de son inconnu. Jamais elle n'avait vu une pareille couleur dans les yeux des gens. Ce turquoise... Lui rappelait l'eau de la rivière qui passait dans son village natal. Elle avait grandit dans les montagnes, et un fin courant d'eau avait été filtré par la montagne, la rendant aussi pure que du cristal. Et ces yeux ne la quittaient plus. Le lendemain matin, elle arriva à l'heure devant son travail mais attendit un peu. Bien sûr, elle n'allait pas y aller en retard, mais si seulement il pouvait passer encore une fois dans cette même rue... Elle l'avait croisé à l'heure de pointe, il allait peut-être au travail. Peut-être l'avait-elle même déjà croisé, sans le savoir.
"Vous attendez un camion pour vous jeter à nouveau sous ses roues?"
Une voix la tira hors de ses pensées et elle fit face à nouveau à ces yeux turquoise.
"Je... en fait, je...
- Bref, passez une bonne journée."
Le cœur de Mikasa tambourinait dans sa poitrine, elle n'arrivait plus à parler.
"Voudriez-vous prendre un verre?"
Demanda-t-elle finalement, mais il était déjà parti. Elle entra dans l'immeuble de son travail, les poings serrés.
"Grosse naze!..."
Souffla-t-elle dans l'ascenseur, seule. Elle arriva à son bureau et se laissa tomber sur sa chaise en râlant.
"Ouhlà, j'en connais une qui n'a pas super bien dormi."
Déclara Armin en voyant son humeur massacrante. Elle alluma son ordinateur sans le regarder.
"J'ai bien dormi. J'ai parfaitement dormi, en fait.
- Tu as rencontré un gros con sur ton chemin, alors?
- ... Pas vraiment. Enfin... Je ne sais pas. Il est temps de travailler, maintenant."
Changea-t-elle de sujet, se concentrant sur sa tablette graphique. Le lendemain matin, elle attendit au même endroit, espérant le revoir une nouvelle fois. Les fois précédentes, elle n'avait jamais vu d'où il venait, et n'arrivait pas à se rappeler vers où il partait.
"Vous êtes encore là? Mais qu'attendez-vous, chaque matin?"
L'inconnu était revenu.
"Vous allez travailler, maintenant?"
Demanda-t-elle, tenant fermement les bandoulières de son sac. L'inconnu haussa un sourcil.
"Je ne travaille que l'après-midi, mais je ne vois franchement pas pourquoi je vous dis cela.
- Seriez-vous... Libre, un soir?"
Merde, merde... Pourquoi lui avait-elle demandé cela? Elle ne le connaissait même pas, il allait forcément refuser et la prendre pour une personne bizarre...
"Un soir? Pas de problème, quel soir?
- Qu-quel soir? Je ne sais pas, peut-être...
- Peut-être ce soir?"
Elle le regarda, bouche-bée. Acceptait-il vraiment de la revoir?
"Peut-être ce soir, oui.
- Alors nous nous retrouverons ici ce soir, vers... Dix-huit heures?
- Dix-huit heures."
Répondit-elle en hochant la tête. Il lui sourit rapidement puis partit. Elle monta dans son bureau, le pas léger. Lorsqu'Armin la vit, il lui sourit.
"Je te préfère largement comme cela. Que s'est-il passé?
- ... Rien. Mettons-nous au travail, sans quoi la manager va encore nous tomber dessus."
Avant de quitter son immeuble, elle passa rapidement dans les toilettes pour vérifier sa coiffure et se regarda un instant dans le miroir, se demandant comment il la voyait. Voyait-il en premier la cicatrice qui soulignait son œil droit, ou son regard froid? Il allait la trouver ennuyeuse, elle n'avait pas pour habitude de beaucoup parler. Allait-il poser beaucoup de questions? Allait-il venir, en fait?
Lorsqu'elle sortit de son bâtiment, personne n'était là. Elle attendit quelques minutes, une heure, deux heures mais personne ne vint. Peinée, elle allait partir lorsque des bruits de pas pressés résonnèrent entre les immeubles de la rue nocturne. Il arriva enfin, essoufflé. Proche de Mikasa, il se pencha et respira un grand coup.
"Excusez-moi, je suis désolé. J'étais pris au boulot, et... je suis vraiment désolé."
Mikasa ne répondit pas, encore persuadée que finalement il n'allait pas venir, alors que maintenant il était... Juste là.
"Il est peut-être un peu tard, maintenant..."
Constata-t-il, jetant un coup d'œil à sa montre.
"Oui en effet, il est un peu tard.
- Encore une fois... Je suis désolé."
Elle tourna le dos et après quelques pas il l'interpela.
"Au fait, pourquoi avoir attendu aussi longtemps?"
Demanda-t-il, perdu.
"Et vous, pourquoi passer dans cette rue chaque matin?"
Elle partit sans le laisser répondre, ne sachant pas vraiment si elle allait le voir le lendemain. Le lendemain elle était dans la même rue, comme exactement chaque jour de chaque semaine.
"La première fois que je vous ai vue, je devais aller voir ma tante."
Déclara-t-il, apparaissant à côté d'elle. Elle se tourna vers lui, étonnée qu'il lui réponde cela, et encore plus étonnée qu'il réponde à une question posée la veille.
"Et la deuxième?"
Il sourit et se frotta la nuque.
"Là... Je n'avais aucune excuse pour être là.
- Et la troisième?
- Non plus.
- ...
- J'ai répondu, maintenant à votre tour.
- Disons que je n'avais aucune excuse non plus."
Ils se sourirent un court instant avant qu'elle n'aille au travail, le cœur léger.
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Plusieurs réalités
FanfictionDes gens se rapprochent, d'autres non. Mais finalement, que ce soit dans n'importe quel monde, les liens se créent entre les gens, et il est plus ou moins facile de les observer.