Atalante rouvrit les yeux. Tout était blanc autour d'elle. Il n'y avait rien. Pas un bruit. Le silence le plus total. Elle tenta de bouger, mais même son petit doigt ne lui obéissait pas. Alors elle resta immobile, et referma les yeux. Une douce chaleur envahit son corps, et ses muscles se détendirent. Elle ne pensait plus à rien, et était même incapable de se souvenir comment elle était arrivée ici ; Mais cela ne lui importait pas, parce qu'elle ne s'était jamais sentie aussi bien. C'était comme une renaissance. Plus rien n'avait d'importance, plus rien ne comptait : il n'y avait qu'elle, et cette immensité blanche.
« Tu dois lutter. »
Elle rouvrit les yeux. Face à elle se trouvait maintenant un miroir. Elle ne le comprit pas immédiatement, car bien que le reflet lui ressembla, il y avait quelque chose dans son regard et son attitude de différent. Soudain le reflet changea, et sa propre mère lui apparut alors. Elle essaya de parler, mais aucun son ne voulu sortir de sa bouche. La panique s'empara alors de tout son être, tant la peur de ne pouvoir dire adieu à sa mère était grande. Combien de nuits blanches avait-elle passé à se reprocher son absence ce jour-là ? Peut-être aurait-elle pu la sauver ? Où peut-être serait-elle morte avec elle ? Peu importe le résultat, tout aurait été mieux que sa situation actuelle. Elle avait tant de choses à lui raconter, tant de non-dits, c'était un véritable supplice pour elle de se souvenir que depuis ses onze ans elle n'avait plus prononcé de « je t'aime » à sa mère, et qu'elle ne pourrait plus jamais le faire.
« Tu dois lutter. »
A force d'efforts mentaux surhumains, elle parvint à bouger ses doigts, puis sa main, puis son bras, qu'elle tendit lentement vers le miroir.
- Ma... maman...
Des larmes dévalèrent ses joues, et petit à petit les sensations revenaient dans son corps. Elle fini par atteindre le miroir, et le frôla du bout du doigt. Celui-ci se brisa, faisant disparaître à tout jamais le reflet chaleureux de celle qu'elle surnommait affectueusement « maman ». Une lumière vive l'éblouit, et la força à refermer les yeux.
« Tu dois vivre. »Quand elle rouvrit les yeux, elle trouva le visage d'une homme qu'elle ne connaissait pas et qui lui paraissait pourtant vaguement familier. Il l'aidai à se redresser, et soudain une vive douleur se fit ressentir dans sa poitrine.
- Aïe !
- Vous devriez faire attention, même si on vous a soigné, votre blessure n'est pas encore bien refermée.
Atalante posa son regard sur le jeune homme.
- Vous êtes qui ?
Il lui sourit, embarrassé.
- Je suis un soldat Fianna et... un très bon ami de Grainné.
La jeune femme le dévisagea, fronçant les sourcils.
- Ah oui je me souviens de vous : j'ai essayé de vous tuer tout à l'heure.
- Hein ?
- Enfin bref. En gros, Grainné et vous êtes ensemble, pas vrai ?
Il la fixa un instant, puis acquiesça.
- Je vois...
Les événements lui revinrent soudain en mémoire, et elle s'affola.
- Où est Grainné ?! Est-ce qu'elle va bien ? Et le dieu, où est-il ?!
- Calmez-vous, elle va bien. Et pour ce qui est du dieu, c'est cette jeune femme nommée Médée qui s'en charge.
- Quoi ?! Médée est ici ?
- Oui : c'est elle qui vous a soigné. Si elle n'était pas arrivée, vous seriez très certainement morte à l'heure qu'il est.
Avec le peu de force qu'il lui restait, Atalante se releva, ce qui ne plu pas vraiment à Diarmuid.
- Que faites-vous ?! Votre blessure n'est pas encore totalement guérie !
- Je m'en fiche ! Je n'ai pas mal ! Dites-moi plutôt où elles se trouvent : je ne les vois pas.
Le jeune homme hésita. Il savait qu'il devait lui refuser cette requête, car c'était bien trop dangereux, surtout dans son état, de se rendre sur un tel champ de bataille. Cependant, malgré tout son bon sens, Diarmuid s'inquiétait énormément pour Grainné, et brûlait d'aller la retrouver. Il savait pourtant qu'entre elle et lui, la comparaison ne se faisait même pas : elle lui était de loin supérieure, mais son vœu le plus cher était de la protéger, rien ni personne ne pouvait égaler ce sentiment.
- Elles se sont éloignées : elles voulaient déplacer le combat pour éviter trop de pertes humaines.
- Je vois. Allons-y.
Diarmuid aurait dû refuser, mais il se contenta de se relever silencieusement et de se mettre en marche. La jeune l'observa un instant, puis lui emboîta le pas.
Grainné essayait tant bien que mal de reprendre son souffle. Avant de tenter quoi que ce soit, Médée et elle avaient décidé d'éloigner Odin du champ de bataille initial, pour éviter au maximum quelque victime collatérale. Elles avaient bien évidemment réussi, mais au prix de douloureux efforts. Médée gardait un œil attentif sur le dieu, qui reprenait ses esprits. Il paraissait quelque peu affaibli, mais ce n'était en rien comparable aux deux jeunes femmes. Grainné se préparait déjà à ré-attaquer, mais Médée la stoppa.
- Grainné, je suis venue avec un plan et je te l'ai exposé. C'est le seul moyen qu'on a pour le vaincre.
- Mais je n'ai jamais fait ça, je ne suis même pas sûre de réussir. Et puis même si j'y arrivais... ça me prendrait un temps fou !
- Et je tiendrais d'ici là. Fais-le, tu n'as pas d'autre choix.
Grainné était sceptique. Elle avait déjà laissé Binaire prendre possession de son corps, mais une possession totale était une chose bien différente : si les choses se passaient mal, sa conscience pouvait être complètement effacée, et si la quantité d'énergie nécessaire n'était pas suffisante, elle pouvait mourir sur le coup, sans que ça n'ai servi à rien. Mais si la possession se trouvait être un succès, alors sa puissance serai peut-être bien égale à celle du roi des dieux.
Après s'être assurée que Médée tiendrait le coup, Grainné ferma les yeux et se concentra. Elle fit le vide le vide dans sa tête, et tout autour d'elle s'effaça. Quand elle les rouvrit, elle tomba nez à nez avec Binaire. Mais, contrairement à d'habitude, elle paraissait terrifiée. Pour le première la haine avait été complètement effacée et remplacée par un sentiment bien plus puissant, qui anéantissait le moindre petit élan de courage : la peur. Depuis leur rencontre avec Irmin, le dieu de la guerre, son corps ne cessait de trembler. Elle était même parfois prise de spasmes violents, qui lui retournaient l'âme.
Grainné la regardait avec pitié : entre Irmin et Odin, son moral était au plus bas.
- Binaire ?
- Non, laisse tomber. Je ne peux pas, j'en suis incapable.
- Et pourquoi ça ?
- Ne me pose pas cette question, tu le vois très bien : j'ai perdu toute ma force.
- C'est uniquement dans ta tête.
- Et c'est largement suffisant.
Grainné soupira.
- Je dois dire que c'est un peu pathétique.
Binaire ne réagi pas.
- Toi que me disais, il y a un an, que ton seul désire était d'anéantir les dieux... Tu abandonne, c'est ça ?
La démone ne voulu pas l'admettre. Grainné continua.
- Ce que tu ne veux pas comprendre, Binaire, c'est que cette situation ne relève plus simplement de la promesse que je t'ai faite : d'autres vies que les nôtres sont en jeu. Médée se bat du mieux qu'elle peut pour retenir Odin en attendant que tu te décides ; Atalante lutte de toutes ses forces pour survivre, et Diarmuid attends mon retour, avec le risque que j'échoue et qu'Odin le massacre pour trahison. Je ne peux pas me permettre de répondre à tes caprices !
Binaire détourna le regard.
- Rassembles au moins le peu de courage qu'il te reste et regardes-moi !
- Ce combat... est perdu d'avance !
- On ne peut pas savoir avant d'avoir essayé.
- Ne me fais pas rire... On ne peut rien contre le roi des dieux.
- Je vois. C'est assez décevant. Quand je pense à tous les tiens que tu avais juré de venger, ça me désole.
Binaire plongea son regard dans le sien.
- Je sais parfaitement ce que tu essayes de faire, mais ça ne fonctionne pas.
- Je ne tente rien du tout ? Je te dis simplement ce que je pense, car je n'aurai très certainement plus jamais l'occasion de te le dire.
Binaire paru surprise.
- Pourquoi dis-tu ça ?
Grainné sourit.
- C'est pourtant évident. Même si tu refuse de combattre, moi je ne peux pas me le permettre, et si tu considère que même toi, la plus puissante de nous deux, ne peut pas venir à bout d'Odin, alors je n'ai absolument aucune chance de survie. Résultat on mourra toutes les deux, moi en tant que guerrière, et toi en simple lâche. De nous deux c'est toi la plus à plaindre, d'autant plus que c'est toi la véritable guerrière ici : moi je n'étais à la base qu'une simple villageoise. Enfin bon, cela n'a plus d'importance. Je te laisse, je dois y retourner.
Elle était prête à s'en aller, mais Binaire lui attrapa le bras.
- C'est bon, t'as gagné. Laisses-moi faire, je vais y aller.
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Inhumaines
ParanormalLe monde est gouverné par les dieux d'Asgard. Ceux-ci s'étant enorgueillis de leur statut au fil du temps, ils ne considèrent aujourd'hui les humains que comme des pions, des jouets à leur entière disposition. Cela n'a que trop duré, et une prophéti...