C'est une Naoka effrayante qui nous accueillit à notre arrivée. Il s'agissait de la présidente du bureau des élèves et elle détestait les retards. Elle les détestait encore plus lorsque c'était ceux des premières années.
Un silence angoissant envahit la pièce lorsque nous eûmes refermé la porte derrière nous. Toutes les déléguées qui se trouvaient ici n'osaient plus dire un mot. La tension était palpable et Naoka nous dévisageait en plissant les yeux.
ー Vous deux ! cria-t-elle soudain.
Sa voix agressive nous fit sursauter. Naoka sauta du bureau sur lequel elle était assise et s'approcha de nous. Elle tenait dans sa main droite un paquet de feuille menaçant ; j'imaginais déjà quel plaisir elle aurait à nous gifler avec.
ー Où est-ce que vous étiez ? On vous a cherchées partout.
Je n'arrivais pas à ouvrir la bouche. En lançant un regard désespéré à Tsubaki, je me rendis vite compte qu'elle était aussi effrayée que moi.
ー Peu importe, soupira-t-elle. On a plein de travail pour vous ici. Enfilez vos brassards et donnez-nous un coup de main.
Nous acquiesçâmes aussitôt et rejoignîmes les autres déléguées. Alors que nous lui tournions le dos, Naoka nous fit sursauter une nouvelle fois en claquant les feuilles dans sa main. Je serrai les dents et adressai un autre regard à Tsuaki, cette fois-ci plus discret. Malgré la menace qui pesait dans l'air, ou peut-être à cause d'elle, qui sait, un fou rire nous prit et il fut très difficile à dissimuler.
Dès notre premier jour en tant que déléguées, nous avions vite compris à quel point Naoka était redoutée ici et elle n'avait d'ailleurs pas tardé à m'avoir dans son collimateur. « Ce n'est pas parce que tu es la fille du proviseur que je vais être gentille avec toi » m'avait-elle prévenue. Mais c'était sans doute grâce à son fort caractère que le bureau des élèves était ce qu'il était : organisé et efficace. Nous n'étions pas même vingt filles et nous avions toutes sortes de tâches à accomplir. Planifier des activités, des rencontres sportives, culturelles, et s'occuper des éventuels conflits entre élèves et entre clubs était notre quotidien. Enfin, c'était surtout les deuxièmes et les troisièmes années qui s'occupaient des choses compliquées. Nous, nous n'étions bonnes qu'à obéir aux ordres. On nous confiait aussi la mission de surveiller le comportement des élèves au sein du lycée : si, en voyant nos brassards orange de déléguées, elles corrigeaient leur attitude sans trop se presser, on racontait que lorsque Naoka décidait de sortir du bureau tout le monde se tenait immédiatement à carreaux. En une semaine, je n'avais à vrai dire jamais encore vu cela.
En ce moment, le bureau des élèves était surtout occupé par l'arrivée des premières années et par les nombreuses inscriptions dans les clubs qui en découlaient, mais la question des traditionnelles rencontres sportives de la rentrée se faisait ressentir. Tout le monde semblait quelque peu sous tension. En bref, nous avions déjà beaucoup de travail et Tsubaki et moi n'eûmes pas le temps de chômer. On classa et on rangea des papiers pendant presque tout l'après-midi, si bien que nous finîmes toutes parfaitement épuisées quand l'heure de la fin des activités sonna. Il était alors 18h.
Presque aussitôt, la plupart des déléguées s'éclipsèrent aussi vite qu'elles le purent : nous savions ce que la fin de journée signifiait. L'une d'entre nous allait être désignée par Naoka pour monter au bureau les lourds cartons de paperasse, ceux que nous allions trier le lendemain. J'avais toujours réussi à y échapper jusqu'à maintenant, mais ce jour-là Naoka décida de me retenir par le bras alors que je partais discrètement avec Tsubaki.
ー Fais ça bien, me conseilla-t-elle en fronçant les sourcils.
Naoka me confia les clefs du bureau et s'éclipsa à son tour. Je lançai alors un regard accablé à Tsubaki. Elle va sûrement m'aider... Mais à ma grande surprise, elle imita l'air redoutable de la présidente et répéta :
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Kimi no kiai
Romance« Ce n'était pas une question de chance. C'était une question de destin. Peu importe ce que nous aurions fait, un jour, nous aurions fini par nous rencontrer. J'en suis persuadée. » Yumi vient tout juste d'arriver au lycée et son quotidien se voit d...