初 8. Amour

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Un soupir peu élégant déchira le silence. Il fut accompagné de quelques gémissements exagérés, puis de grognements énervés. Malgré mes efforts, je ne pus conserver mon impassibilité une seconde de plus.

ー Kana, dis-je calmement. Concentre-toi.

Kana grogna de plus belle et tourna la tête vers moi, désespérée.

ー Mais j'en ai assez, de ces exercices ! se plaignit-elle. J'ai compris la formule. Pourquoi est-ce qu'on doit l'appliquer cent fois ?

ー Tu exagères.

Je sentais Kana bouillonner de l'intérieur.

ー Si tu connaissais vraiment la formule, tu n'aurais pas autant de mal à répondre aux questions, observai-je. Mets-y un peu plus du tien, sinon tu risques de finir en cours de rattrapages pendant les vacances d'été.

Visiblement, cette idée l'effraya.

ー Comment tu fais pour être toujours aussi concentrée, Hatsu ?

Moi aussi, je me le demandais... Avec elle à mes côtés, faire correctement mes devoirs relevait du miracle. Mais je n'avais pas vraiment le choix. Si je n'obtenais pas la note maximale à mes tests, père et mère... ne seraient pas satisfaits de moi.

ー Je veux faire une pause, déclara-t-elle.

Après avoir joyeusement refermé son cahier d'exercices, elle me rejoignit sur mon lit. Mais en voyant que je ne l'imitais pas, elle s'énerva :

ー Tu vas me rendre malade, à travailler tout le temps !

Sans que je ne puisse réagir, elle m'arracha mon cahier des mains et le jeta à travers la pièce.

ー Toujours aussi délicate, dis-je avec amusement.

ー Ah ! s'écria-t-elle. Un sourire ! C'est rare en ce moment !

Percée à jour, je baissai immédiatement les yeux. Je ne voulais pas que Kana s'inquiète pour moi... Malgré les efforts que j'avais fourni pour cacher mes tracas, avait-elle tout de même remarqué quelque chose ?

ー Tu ne me parles plus de Sakuhana, ces derniers temps, me dit-elle.

ー Yumi, rectifiai-je.

ー Comment ça se fait ?

Je restai silencieuse. Kana prit cela pour un jeu et plissa alors les yeux. Elle me chuchota :

ー D'accord. Si tu ne veux rien me dire, je vais le découvrir toute seule.

Je lui souris ; cela m'amusait quand elle menait ses enquêtes. Comme pour me déstabiliser, elle commença par rapprocher son visage du mien.

ー Toi, tu as l'air déçue, remarqua-t-elle.

C'est un bon début.

ー Dans tes yeux, je ne vois plus cette lueur qui m'avait surprise à la rentrée. Dis donc... Est-ce qu'elle te plaisait ?

ー Je la trouvais amusante, c'est tout.

Kana se rendit soudain compte qu'elle avait mis le doigt sur quelque chose. Elle me saisit les poignets, m'allongea sur le lit et se mit à me chevaucher.

ー Allons Hatsu, tu sais que tu ne peux rien me cacher, me murmura-t-elle. « Je la trouvais amusante » ... Mon œil ! Tu l'aimais plus ça, cette petite... Je me trompe ?

Si j'appréciais lorsqu'elle cherchait à deviner mes pensées, ce n'était pas le cas lorsqu'elle me forçait à parler. En fronçant les sourcils, j'essayai de la repousser, en vain.

Kimi no kiaiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant