Chapitre 19

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Léonie

     Eliott. Est. Amoureux. De. Moi.

Je ne comprends pas. Comment est-ce possible ? Il ne peut pas. Il n'a pas le droit. Je veux dire, c'est comme mon meilleur ami. C'est... Eliott.

J'étais affreusement gênée mais lui l'était plus encore. Sans compter Maëlle qui s'en voulait terriblement d'avoir gaffé. Ils sont partis presque tout de suite après et je suis restée un moment seule dans le salon. Je n'arrivais plus à penser correctement.

J'ai passé les derniers jours à l'éviter. J'ai même changé de place en cours de littérature pour ne pas être côté de lui. Parfois, je sens son regard sur moi mais je reste figée sur le tableau en face de moi ou sur ma feuille de cours.

Pour la cantine, c'est une autre paire de manches ; la solution la plus simple s'est avérée être que Maëlle mange avec l'un de nous une fois sur deux. Elle s'est un peu énervé au début mais comme c'est en partie de sa faute, elle a fini par accepter.

Ma réaction semble sûrement puérile. Après, tout, il reste toujours le même et je peux toujours faire comme si je n'étais pas au courant de ses sentiments. Sauf que je suis bel et bien au courant et que je ne sais plus comment me comporter avec lui. Est-ce que je peux lui faire un câlin ? Et si sans réfléchir, je lui prends la main pour l'entraîner quelque part ? Il pourrait s'imaginer des choses.

Le plus simple reste donc de l'éviter.


     — Laisse un peu plus d'espace entre chaque photo.

On est toutes les deux en salle de permanence pour fignoler son projet d'art. Maëlle a prévu de l'installer aujourd'hui dans le hall du lycée parce que tous les membres de l'administration étant en réunion, aucun ne pourra nous surprendre. Seulement, leur réunion ne dure pas éternellement donc on ferait mieux de s'activer.

— Comme ça c'est bien ? lui demandé-je après avoir espacé les photos de quelques centimètres de plus.

— Parfait !

Maintenant, il s'agit de l'opération la plus délicate. Il faut coller les photos sur une ficelle donc le trait de colle doit être vraiment fin. Et en plus de ça, derrière chaque photo, Maëlle a écrit quelque chose et il ne faut pas que la ficelle le cache.

Elle veut que ce soit comme une espèce de mobile ; on colle environ quatre ou cinq photos par ficelle et ensuite, elle veut qu'on colle toutes les ficelles sur le plafond avec du gros scotch. Pour la dernière partie, je n'ai toujours pas compris comment elle comptait se débrouiller. Même en montant sur une chaise, on ne parviendra jamais à atteindre le plafond pour accrocher les ficelles. Mais elle dit avoir une idée alors je lui fais confiance et la laisse gérer.

Je colle les photos du plus vite que je peux et après une vingtaine de minutes, on se retrouve avec cinq ribambelles de photos. Il y a une fille du groupe sur chacune d'elles. Maëlle est vraiment douée parce qu'aussi simple soient-elles, les photos sont juste sublimes. Je n'avais pas vu tout de suite mais je remarque qu'il y a une photo de Maëlle. Elle s'est enfin décidée à raconter son histoire, elle aussi.

— Maintenant, aide-moi à porter cette table jusque dans le hall.

J'arque un sourcil et ne bouge pas avant qu'elle m'explique.

— On va mettre une chaise par-dessus et tu monteras sur la chaise pour accrocher les ficelles.

— Pourquoi moi ? protesté-je.

— Parce que c'est toi la plus grande entre nous deux, répond-elle d'un air blasé.

Je souffle et prend la table d'un côté pour aider Maëlle à la porter.

IndignéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant