Le Chêne Blanc

Chapitre 2

     Hiryu sentit du mouvement à côté de lui qui lui fit ouvrir doucement les yeux. La chambre dans laquelle il se trouvait était baignée de la douce lumière du soleil levant. Il devait encore être tôt mais le dernier client avec qui il avait passé la nuit ne devait pas tarder à partir. Le jeune prostitué se tourna sur le lit pour voir l'homme d'une trentaine d'année avec qui il venait de passer une partie de la nuit, remettre ses vêtements. Il avait apprécié leur échange, comme à chaque fois.
Hiryu ne bougea pas quand son client s'approcha de lui pour caresser son dos et ses fesses :

- Tu es vraiment parfait, souffla l'homme en déposant un baiser sur l'épaule du jeune prostitué.

- Tu reviendras me voir, n'est-ce pas ?

Hiryu avait prononcé ces quelques mots d'une voix mielleuse qu'il savait irrésistible. Son client lui sourit et releva son menton pour l'embrasser une dernière fois. Le prostitué sentit également l'homme glisser un petit bracelet autour de son poignet. Il le regarda un instant, remarquant que le fin bijou était fait d'or et d'argent :

- Ça te plait ? Je l'ai fait faire pour toi, annonça l'homme en enfilant ses chaussures avant de se redresser.

- C'est magnifique, sourit Hiryu. Merci...

- Et ce n'est pourtant rien comparé à ta beauté, finit par dire le client en souriant au prostitué devant lui. Nous nous reverrons bientôt...

Le jeune homme toujours allongé lui sourit tout en le suivant du regard quand il sortit de la pièce. Il se redressa alors pour se servir un verre d'eau et le vida d'une traite. Il devait bien avoué que la nuit précédente avait été assez chargée. Il avait eu quatre clients dont le dernier, celui qui venait de partir, l'avait réservé le reste de la nuit. Il avait été exigeant et le jeune prostitué n'avait pu dormir qu'une ou deux heure. Mais Hiryu ne s'en plaignait pas. Il avait jouit au moins autant de fois que les clients et il aimait ça. Le bracelet doré qui ornait maintenant son poignet lui plaisait également.
Le jeune homme regarda par la fenêtre qui donnait sur le chemin qui menait à la maison. Plusieurs carrioles et cavaliers quittaient les lieux en direction de la capitale. Hiryu posa alors son regard sur l'immense Chêne Blanc qui se trouvait au bout du chemin. Ce dernier ne faisait jamais de feuilles et restait figé telle une sentinelle qui protégeait la maison de plaisir. Le jeune prostitué aimait bien contempler l'arbre et s'adosser à son tronc quand il avait du temps libre. Il le regarda quelques minutes quand quelqu'un toqua à la porte :

- Oui, annonça-t-il en se retournant pour faire face au nouvel arrivant.

Le jeune homme n'avait toujours pas enfilé de vêtement mais la nudité ne le dérangeait plus depuis longtemps maintenant. Il sourit en voyant le gérant de la maison passer la porte. Il aimait vraiment cette homme d'une cinquantaine d'année qui l'avait recueillit il y a maintenant dix ans. Du point de vue d'Hiryu, Mevir n'avait pas changé. Ses yeux et son sourire se posaient toujours avec amour sur les hôtes de sa maison. Seuls quelques cheveux blancs parsemaient maintenant ses cheveux et sa courte barbe châtain :

- Tu as eu une nuit éprouvant, commença le gérant en s'approchant de son protégé. Tu vas bien ?

Hiryu sourit à la phrase de l'homme en face de lui. Ce dernier allait voir tous les gens qui travaillaient pour lui tous les matins pour voir comment ils allaient. Le jeune prostitué n'était pas non plus étonné qu'il sache exactement le nombre de clients qu'il avait eu la nuit dernière :

- Je vais bien, annonça Hiryu en s'approchant de son gérant et en posant sa main sur sa joue. Le bas de mon dos me tire un peu mais ça ira.

- Va te doucher et te reposer, annonça Mevir avec un sourire.

- Et moi qui pensait que tu venais ce matin pour me faire du bien après cette nuit éprouvante, rigola le prostitué en caressant la joue de l'autre homme.

Ce dernier rigola et tapota gentiment la fesse nue de son protégé. Hiryu lui sourit avant de se diriger vers la porte. Il aimait bien taquiner son gérant car il savait très bien que ce dernier n'était pas intéressé par les hommes. Il aimait les femmes, comme beaucoup d'hommes. C'est pour cette raison qu'Hiryu avait un succès si particulier au sein de la maison de plaisir. Il était un homme qui aimait les hommes et cela plaisait à bien plus de personne que l'on pouvait croire. La société condamnait ce genre de pratique alors que du point de vue d'Hiryu, il ne faisait rien de mal. Quelle différence entre un homme et une femme qui s'aiment, et deux hommes, ou deux femmes, qui s'aiment de la même façon ? Le jeune prostitué ne comprenait pas les lois et la religion qui étaient en place dans le royaume. Il était d'autant plus heureux de vivre au Chêne Blanc pour cette raison.

     Le jeune homme sortit de ses pensées en arrivant dans la grande salle des bains. Il discuta un long moment avec les autres hôtes de la maison. Ils étaient en tout vingt femmes et dix hommes. Hiryu était le plus jeune à prendre des clients. Il y avait dans la maison quatre apprentis qui avaient entre treize et quinze ans et qui ne participaient donc pas à la vie nocturne de la maison. Les apprentis s'occupaient de faire le ménage ou encore de la nourriture avec les autres serviteurs à pleins temps.
Hiryu somnola une petite heure dans le grand bassin d'eau chaude tout en écoutant ses camarades discuter de leur nuit. Il aimait vraiment tout le monde dans cette maison qui était la sienne depuis maintenant quelques années. Les hôtes prirent le repas du matin tous ensemble avant que certain ne retourne se coucher pour le reste de la matinée et que d'autre vaquent à leur occupations respectives. Hiryu fut de ceux qui retournèrent se coucher. Il remonta au troisième étage de la maison, là où les prostitués ne recevaient personne et où ils avaient leurs appartements privés. Il n'y avait pas assez de chambre pour tout le monde alors le gérant avait fait construire une dépendance un peu à l'écart de la maison principale pour le reste de ses hôtes. Hiryu avait préféré garder une chambre dans la maison principale car c'est là qu'il avait toujours vécu depuis qu'il était arrivé. Il ne se faisait pas d'illusion, depuis son plus jeune âge, Mevir avait vu en lui un haut potentiel. Il l'avait formé comme il le voulait pour faire de lui un homme convoité par beaucoup. Cependant, Hiryu ne s'en plaignait pas, il aimait la vie qu'il menait.
Il entra alors dans sa chambre avant de refermer la porte. Il savait qu'il ne serait pas dérangé et qu'il pouvait dormir tranquillement. Le jeune homme aux yeux violets s'allongea sur son lit avant de remonter une couverture sur lui et de s'ombrer doucement dans le sommeil.