Chapitre 14

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     Le voyage fut long mais Hiryu ne s'en plaignit pas. Même s'il n'avait pas l'habitude de chevaucher, Kalyan le maintenait assez bien pour qu'il ne tombe pas. Le garde blond lui avait même conseillé de dormir et Hiryu ne s'était pas fait prier. Il avait assez confiance pour se laisser aller à un demi-sommeil.
Sur les cinq heures que dura le voyage, Rohen ne permit aucune pause. Hiryu n'avait pu dormir qu'une heure car le baron faisait tout pour qu'il ne trouve pas le repos. Le jeune prostitué remerciait intérieurement Kalyan d'avoir été plus rapide et de ne pas l'avoir laissé aux mains de Rohen pour la durée du voyage.
Hiryu sortit de ses pensées quand il sentit le garde derrière lui tirer sur les rennes de sa monture. Ils étaient enfin arrivés à la capitale. Les portes de la grande cité étaient gardées par des soldats et le petit groupe dû attendre quelques minutes. Hiryu profita de ce temps pour admirer à nouveau les murailles de la ville. Il était déjà venu et il devait bien avouer que les murs qui entouraient la cité étaient de toute beauté. Le jeune homme détourna son regard lorsqu'un homme en armure blanche s'avança vers eux :

- Capitaine, salua alors l'homme en inclinant la tête devant Kalyan.

- Je ramène un prisonnier avec moi, annonça le garde blond. Je vais le mener à la prison du palais. Le baron Démios et ses hommes sont attendus au palais.

Le soldat acquiesça avant de faire signe de laisser passer les cavaliers.
Hiryu sentit son cœur accélérer en se rapprochant du palais. Ce dernier pouvait être vu depuis toute la ville car il se situait en hauteur. Le jeune prostitué essaya de ne pas y penser en regardant autour de lui les maisons et les personnes. Il y avait une certaine effervescence grisante dans cet endroit mais Hiryu savait qu'il préférait le calme et la sérénité qu'il ressentait au Chêne Blanc. Cette pensée lui serra un moment le cœur. Il était partit depuis seulement quelques heures mais sa maison lui manquait déjà. Il avait fêté ses dix-neuf ans il y n'y a pas si longtemps, et c'était la première fois qu'il quittait la maison de plaisir seul. Le jeune homme se perdit alors à nouveau dans ses pensées quand il sentit une main ferme se poser sur son avant-bras. Hiryu se sentit alors tirer vers le bas et il perdit l'équilibre, tombant au sol dans un râle étouffé :

- J'aurai du me douter qu'une pute comme toi ne saurait pas descendre convenablement d'un cheval, cracha alors un des hommes de Rohen en relevant de force Hiryu.

Ce dernier remarqua alors qu'ils étaient arrivés derrière le palais, près d'une grille en fer qui menait à des escaliers. Hiryu jeta alors un regard vers le cheval et il vit immédiatement Kalyan descendre et s'avancer vers l'homme qui le tenait :

- Je ne vous ais pas autorisé à le toucher ! S'énerva-t-il. Il aurait pu se blesser en tombant de mon cheval.

- Il ne faut pas vous énerver pour si peu, seigneur Kalyan, annonça alors Rohen en descendant lui aussi de sa monture.

- Jusqu'à la décision du roi, ce jeune homme est sous ma responsabilité et il n'est pas condamné, répliqua Kalyan d'un ton calme mais froid. Je ne peux que vous conseiller de revoir les lois de ce royaume, baron Démios.

Ce dernier ne répondit pas mais le regard qu'il lança au garde devant lui en disait long.
Kalyan ne s'en préoccupa pas et se saisit des chaînes en fer qui liées les poignets du prisonnier :

- Je vais l'emmener en cellule, annonça-t-il. Les intendants du palais ont été prévenus de votre arrivée, ils vous indiqueront vos appartements.

Sans rien ajouter, Kalyan passa la grille qui menait à la prison, entraînant Hiryu avec lui. Le jeune homme avait eu un peu froid en ce début de soirée mais la température monta légèrement lorsqu'il entra dans le couloir de la prison. Il suivait Kalyan docilement même si l'envie de partir en courant le prit lorsqu'ils commencèrent à descendre des escaliers. Hiryu remarqua à nouveau qu'il faisait moins froid qu'à la surface. Il n'aimait cependant pas cet endroit. Au bout de quelques minutes, les deux hommes arrivèrent devant une grille gardée par deux soldats. Ces derniers s'inclinèrent légèrement avant de regarder le prisonnier :

- Le chef de la prison n'est pas là actuellement, commença l'un des gardes.

- Ce n'est pas très grave, répondit Kalyan. Ce prisonnier doit être mis en cellule et aucun mal ne doit lui être fait. C'est bien clair ?

Les deux soldats acquiescèrent vivement. L'un d'eux commença alors à ouvrir la grille en fer quand des bruits de pas précipités se firent entendre dans le couloir menant aux cellules. Un soldat avec le même uniforme blanc et doré que Kalyan arriva et s'inclina :

- Vous êtes demandé par le roi, capitaine Kalyan, annonça le garde en reprenant son souffle. C'est urgent.

Le soldat blond fronça les sourcils mais se tourna vers les deux gardes de la prison :

- Je viendrai voir ce prisonnier demain, annonça-t-il d'une voix qui ne permettait pas de discussion. Si j'apprends que quoi que ce soit lui a été fait, vous aurez tous à faire à moi.

Kalyan attendit de voir les deux hommes face à lui acquiescer avant de leur remettre la chaîne d'Hiryu. Il lança un regard désolé discret au jeune homme avant de suivre d'un pas rapide le garde qui était venu le chercher.
Hiryu sentit un pincement au cœur lorsque son seul allié qu'il avait dans cet endroit étranger disparut dans le couloir sombre. Il se laissa mener sans rien dire jusqu'à une cellule au fond d'un couloir. Il passa devant de nombreux barreaux mais il ne vit pas beaucoup de prisonnier. Lorsqu'il arriva devant sa cellule, un nouveau frisson le parcourut. Il savait qu'il ne devait pas s'attendre à beaucoup de confort mais il n'y avait qu'un lit creusé à même la pierre et un peu de paille. Le sol était sale et la seule fenêtre par où passaient les derniers rayons du soleil était inaccessible. Les barreaux de la cellule s'étalaient sur tout le long, ne laissant aucune place à une quelconque intimité. Le jeune homme ne put y réfléchir plus longtemps que l'un des soldats ouvrit la porte de la cellule avant de le pousser dedans :

- Si j'ai bien lu le rapport, ce petit prostitué a tué un noble, annonça l'un de garde à son homologue.

- Je me demande comment un gars aussi frêle a bien pu faire ça, répondit l'autre en refermant la cellule à clé.

- Ces gens-là ont toujours des talents cachés, se moqua le premier soldat en regardant le prisonnier de la tête aux pieds.

Les deux hommes rigolèrent avant de s'éloigner. Hiryu soupira en s'asseyant sur le lit de fortune. Il avait bien crut que les deux soldats tenteraient quelque chose vu la façon dont ils le regardaient. Habituellement, des regards comme ceux-là l'auraient amusés et il y aurait répondu avec plaisir, mais ce n'était décidément ni le moment ni le lieu. Le jeune homme passa à nouveau son regard sur la cellule dans laquelle il se trouvait. Il n'y avait personne dans celle d'en face, ni dans celles d'à côté. Hiryu remarqua alors un trou dans le sol à l'extrémité de la cellule, certainement pour les besoins naturels. Le jeune homme sentit un haut le cœur remonter le long de sa gorge. Il savait qu'il devait tenir, qu'Asgeir faisait son possible et que Kalyan le protégeait, cependant, les heures de chevauchée et son arrivée dans cette cellule miteuse avaient largement diminué son moral. Hiryu se reprit en mettant une main dans sa poche. A son plus grand étonnement, il avait gardé ses affaires et on ne l'avait pas fouillé. Le jeune homme sortit deux petits gâteaux aux amandes de chacune de ses poches, cadeaux de Mevir avant son départ. Il les mangea avec appétit avant de retirer sa veste qu'il plia pour s'en faire un oreiller. Hiryu s'allongea et soupira à nouveau. Les lits moelleux de la maison de plaisir allaient lui manquer ! Il tourna quelques minutes le temps de trouver une position moins douloureuse. Hiryu ferma les yeux et se laissa emporter peu à peu par le sommeil. Il avait besoin de dormir pour affronter la prochaine journée.

Le Chêne BlancOù les histoires vivent. Découvrez maintenant