Chapitre 11 - À la recherche de la vérité

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Quentin vit la forme ombragée s’agiter dès que la bande vidéo démarra. Quelqu’un avait filmé la scène peu après qu’il eut tranché la gorge de sa victime. Visiblement, la nervosité du vidéaste amateur ne faisait aucun doute. Probablement caché derrière un rideau, il essayait de faire une vue rapprochée mais la caméra, un petit appareil comme un mobile selon tout apparence, bougeait et l’image s’embrouillait.

Quentin demeura silencieux alors que se déroulait devant lui les premiers instants de sa vie de criminel. L’image était trop éloignée et le flou empêchait de distinguer clairement de qui il s’agissait. Il ignorait de quoi avait l’air l’amant de sa femme, mais il pria intérieurement qu’il lui ressemblât un peu en grandeur et en poids. Il détourna le regard, mimant l’horreur désespoir de voir une telle scène.

« Pourquoi me montrez-vous ça? Vous voulez me torturer? C’est l’assassinat de ma femme, ça, non? »

« Un voisin a filmé un homme en train de manipuler un cadavre. Il n’a pas vu le crime. Il a seulement entendu deux hommes parler sur la rue en face de chez lui. Apparemment, il s’agissait d’un policier en uniforme et d’une autre personne qu’il n’a pas pu décrire. Le policier a fait monter l’homme dans sa voiture et ils sont partis avant que notre témoin ne puisse revenir avec son téléphone et filmer la scène. Après un moment, cet homme est arrivé et le témoin l’a filmé. Ce n’est peut-être pas le meurtrier car on se demande ce que ce policier faisait là, près d’un cadavre encore tout chaud, et que ce dernier est parti dans une voiture que nous n’avons pas pu identifier. Selon toute apparence, il y a dans cette affaire des choses qui nous échappent et on se demandait si vous ne pourriez pas nous aider. »

Quentin se leva brusquement, feignant la panique. Il se détourna de l’écran et prit sa tête entre ses mains. Il fallait qu’il montre clairement que tout cela le répugnait, sans trop en faire. Le dosage était le secret de la réussite de ce témoignage. Il s’appuya sur le mur et respira profondément.

« Prenez votre temps. On n’est pas pressé. Si vous savez quelque chose, n’hésitez pas à nous le dire. Parfois, un petit détail peut faire toute la différence, fit le policier en faisant un signe à l’opérateur invisible de couper l’image sur l’écran. Prendriez-vous un café? Une tisane? Je vais me chercher quelque chose de l’autre côté. »

Quentin lui fit signe que non et vint se rasseoir, la tête toujours enfouie dans ses mains.

Il ignora le fait qu’on était probablement en train de l’observer de l’autre côté du miroir sans tain. On devait se demander s’il était mêlé à tout ça, s’il savait des choses qu’il préférait taire pour des raisons inconnues. Il demeura prostré ainsi jusqu’à ce que le policier ne revienne, un café dans une main et une demi-brioche à la cannelle dans l’autre.

« Alors, monsieur Bazinet, des idées? »

« Quelles idées? Vous me montrez ça et ça me tue! Je veux dire, qu’est-ce que je pourrais vous dire de plus? J’ai vu ma femme ce soir-là, je lui ai parlé, je l’ai embrassée et c’est tout. »

« Il y a quelque chose qui me chicotte et je suis certain que vous allez m’expliquer ça avec autant de facilité que vous venez de le faire. »

Quentin se raidit. Il devinait ce que Malboeuf avait trouvé une faille. Il se sentit alors entouré de mailles serrées. Pourtant, aucune nervosité ne monta en lui. Il allait affronter cette première vague avec sérénité.

Le détective prit une gorgée de café et grimaça. Il épongea sa bouche et déposa le verre sur la table. Croisant les bras, il se remit à dévisager son interlocuteur tout en lançant la phrase qui le taraudait :

Tout ce que tu feras (tu le feras pour moi)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant