10 octobre - 16 octobre 2537

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10 octobre 2537

Mirai est fin prêt pour ma première séance de remembrance, et je pense que je le suis aussi. La machine nécessitera plusieurs étapes de calibration afin d'obtenir l'image la plus nette possible de la vision du désert. Il faudra donc forer très profond dans ma mémoire puis remonter vers des souvenirs de plus en plus récents dont la résolution augmentera progressivement. Mirai m'a demandé par quel souvenir je souhaitais commencé. J'ai eu tout le temps d'y penser ces derniers mois. Le 4 août 2493. Isha.

Transcript Remembrance - 4 août 2493

Nous courrons dans les ruelles du quartier Thotien et Isha me devance de quelques mètres. Elle se retourne pour me crier de me dépêcher, et je lui réponds d'un geste agacé. Nous sommes presque arrivés au concentrique, on pourra souffler une fois qu'on l'aura traversé. Tout ça parce qu'Isha a cru voir un monstre, mais c'est juste une trouillarde. A chaque fois qu'on vient ici, elle a peur de tout, même des autres enfants. Et à chaque fois, il faut courir pour rentrer à la maison. La prochaine fois, je viendrai tout seul, j'ai pas besoin d'elle.

Elle est arrivée au concentrique, et elle commence à traverser sans m'attendre. Je n'ai pas le temps d'arriver avant que la voie piétonne soit fermée et que les cabs reprennent leur route. Je ne vais pas risquer de me faire écraser pour un monstre qui n'existe pas. Tant pis pour elle, elle finira toute seule. Moi je retourne au magasin.

Noir.

Je crois que je me suis perdu. Les rues sont vraiment pas comme chez nous, elles sont pas droites. Elles font des boucles, et on tourne tout le temps en rond. Les seuls repères c'est ces espèces de grands câbles suspendus au-dessus des rues, des bleus et des rouges. Ils ont l'air gluants et ils brillent de l'intérieur. Peut-être que je peux les suivre, c'est pas terrible mais c'est mieux que d'aller au hasard. Je vais suivre les rouges. Je pense que c'est comme les veines, et je crois que les rouges irriguent les organes. Si je suis vraiment perdu, il faudra que je remonte les bleues jusqu'au cœur du quartier. Enfin, j'espère que c'est ça.

Les câbles sont brillants, donc ils transportent de la lumière, c'est logique. Le magasin a besoin de lumière pour faire marcher les machines, c'est logique aussi. Donc les veines apportent de la lumière blanche au magasin, et il recrache de la lumière noire dans les artères. A mon avis, le magasin c'est l'endroit qui a le plus besoin de lumière dans le quartier, donc je vais suivre la rue où il y a le plus de câbles.

Noir.

Je reconnais ces bâtiments, je suis presque arrivé ! Encore quelques mètres. Le magasin ! J'entre tout de suite et le monsieur me demande où est ma sœur. Je lui dis qu'elle est rentrée à la maison mais que je suis revenu voir les machines. Il dit qu'il est tard et que je devrais rentrer aussi. Ah non ! Je lui explique tout ce que j'ai fait pour venir, avec les câbles sanguins et tout. Apparemment je ne me suis pas trompé, il me dit qu'il est très impressionné que j'ai compris ça tout seul et qu'il est d'accord pour me remontrer les machines.

Noir.

D'abord on fait marcher la machine digestive, c'est ma préférée. Il faut broyer de la nourriture en mélangeant avec de la salive dans un mortier comme pour la purée, et après on verse la mixture dans le tube. On peut voir la nourriture qui passe dans les estomacs de la machine, et le monsieur explique que tous les petits fils plantés comme des cheveux autour des estomacs servent à récolter les nutriments digérés. Ils en ont de toute sorte, avec des bactéries différentes pour digérer n'importe quoi.

Noir.

Le monsieur me montre la machine à protéines, c'est la plus compliquée mais je crois que j'ai bien compris. Il y a des aiguilles minuscules qui injectent des acides amémés dans les nappes de cellules pour qu'elles fabriquent les protines qui servent à faire pleins de trucs. On voit pas les cellules en fait parce qu'elles sont trop petites, mais il y a un appareil pour les regarder de près. Le monsieur dit qu'elles sont prélevées sur des gens ou des animaux et qu'après ils les font pousser comme de la mousse sur les nappes. Je lui demande si les acides amémés sont fabriqués dans la machine à digestion et il me dit que oui et me montre les câbles qui relient les machines entre elles.

Anatomie Divine I - Les Études de ShethOù les histoires vivent. Découvrez maintenant