Chapitre 8

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Tu as toujours réussi à me surprendre. Et quand je pensais avoir saisi quelque chose à ton sujet, tu changeais mes conclusions.

La soirée passe et je suis clairement à l'ouest. Je n'écoute que d'une oreille ce qui se raconte au dîner. Helynnah et son problème de sauvegarde, mon père et un client mécontent des fraises qu'il lui a acheté, Maëlys et son cours de danse trop super génial. Mes pensées sont tournées vers Marilou et sa disparition mystérieuse. Elle m'a laissé un arrière-goût dans la tête et je suis incapable de m'en débarrasser. Elle m'intrigue. Je me demande ce que ses mélodies et son sourire cachent.

J'aide mon père à ranger la vaisselle pendant qu'Helynnah couche leur fille. On ne parle pas de notre discussion houleuse de midi. En vérité, je n'ai même pas envie de me disputer, ni de me battre. Je suis vraiment ailleurs, bien loin de notre réalité, perdue dans une curiosité que je ne peux nourrir.

La nuit tombe, et je m'installe à ma fenêtre pour apercevoir l'arbre lumineux s'éclairer. J'ai tellement de questions qui résonnent dans la tête que je suis tout bonnement incapable de me focaliser sur autre chose. Les minutes passent et le jardin s'enfonce dans l'obscurité nocturne. Pas de lueurs pastels à l'horizon. Alors j'attends. Patiemment. Et je finis par abandonner quand les premières heures du matin apparaissent. Je tombe de sommeil, déçue et encore plus curieuse qu'avant.

Pour mon réveil, je n'ai pas de petite fille pleine d'énergie sur mon ventre, ni de pétales de cerisiers dans les cheveux. Je suis seule avec les murs bleus, qui pourraient presque se fondre dans celui du ciel matinal. J'enfile un sweat-shirt et des chaussettes, puis je descends pour petit-déjeuner. Maëlys est déjà partie avec Helynnah, ce qui est logique vu l'heure. Je ne trouve qu'un petit mot de mon père m'expliquant qu'il est parti au marché et qu'il rentre en début d'après-midi. J'ai la maison pour moi, et je réalise à quel point elle est trop grande.

Mon sentiment d'intrusion revient plus fort que jamais. Je ne suis pas chez moi, et je ne le serai probablement jamais. Les murs semblent me crier de partir, les bruits de l'électroménager résonnent dans le silence et les ronronnements du chat me surprennent à chaque fois que je les entends.

J'attrape une tartine de pain et un verre de jus de pomme avant d'aller me réfugier dans la seule pièce qui semble ne pas m'être hostile.

J'hésite à envoyer un sms à Emilia pour lui demander de ses nouvelles, mais je réalise qu'avec le décalage horaire, elle doit dormir. Et puis, peut-être qu'elle est assez occupée pour ne pas avoir à gérer ma petite crise de paranoïa. La preuve, elle ne m'a pas encore envoyé de message pour me dire qu'elle est bien arrivée. Elle a dû oublier, après tout, c'est le voyage de ses rêves. Je ne peux pas lui gâcher pour une crise passagère.

À la place, je sors mon ordinateur et lance de la musique pour couvrir le silence qui me juge. Je fredonne un air que je connais par cœur, quand un bruit, qui me semble inhabituel, se fait entendre en bas. Je baisse le volume et descends sur la pointe des pieds.

Des coups sont frappés à la porte et je devine qu'il s'agit seulement d'une personne voulant parler à mon père ou à Helynnah, probablement un livreur. J'ouvre la porte en m'attendant à recevoir un colis, mais à la place, se tient Marilou, dans une robe à tournesols, assortie à la pince en tissu qui tient sa tresse.

— Salut ! dis-je, surprise de la voir.

— Salut, me répond-t-elle en souriant brièvement, juste un léger mouvement des joues. Je cherche Nathanaël. Est-ce qu'il est là ?

— Il est au marché. Pourquoi ?

— Rien de grave.

En disant cela, elle frotte son bras nu. J'y remarque des marques de griffures.

À l'ombre des cerisiers fleurissent des bourgeons d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant