Un seul de tes éclats de rire suffisait à illuminer une situation ; même les plus ratées. Et c'était beau.
— Et c'est un joli panier et une belle cagette qui sont restés au chaud, annonce joyeusement Marilou. Les coquins, ils ne voulaient pas aller avec leurs copains.
Elle verse le contenu de l'un dans l'autre, puis attrape le tout et ressort. Concentrée sur sa tâche, elle me percute en passant la porte. Quelques cerises s'échappent de la caisse et tombe dans la terre. Nous nous accroupissons en même temps pour les ramasser. Nos doigts se percutent à plusieurs reprises, ce qui nous fait sourire maladroitement.
— Je crois que tout est là ! affirme-t-elle en posant la dernière.
Alors qu'elle place ses mains de part et d'autres de la cagette, Fifi saute dessus, faisant voler quelques fruits au passage. Je me mets à pester sur ce maudit chat, et il déguerpit aussi vite qu'il est venu, probablement au cause de l'oiseau qui s'est emparé d'une malheureuse cerise explosée sur le sol. Des miaulements et des gazouillis s'emparent de l'espace sonore, ce qui a le don d'amuser Marilou, pendant que je retrouve les victimes du saut de Fifi.
— Ce chat n'est pas croyable, soupire-t-elle dans un demi-rire.
— Il a surtout écrasé des cerises. Je ne trouve pas ça très marrant.
— Quatre ou cinq en moins, ce n'est pas une très grosse différence, ne t'en fais pas. Ton père ne le remarquera pas.
Je dépose les fruits survivants dans la cagette qu'elle tient. Elle m'offre un sourire radieux, que je ne lui rends pas vraiment.
— Est-ce que ça va ? s'inquiète-t-elle.
Un haussement d'épaules suffit à lui faire comprendre. On se dirige vers la voiture pour ne pas faire attendre mon père. Le trajet commence dans un silence lourd, qui est finalement brisé par la douce voix de Marilou.
— Est-ce que tu veux en parler ?
Les mots que j'ai tenté de retenir jusqu'alors sortent d'eux-mêmes et d'un seul coup.
— J'ai l'impression de ne pas avoir ma place ici. Je débarque dans un univers déjà bien construit, que ce soit ton groupe d'amis ou la nouvelle famille de mon père. Je ne suis qu'une intruse temporaire qui va juste faire du mal aux autres lorsqu'elle repartira dans deux semaines.
— Tu as ta place ici, crois-moi. Dès que j'ai commencé à garder Maëlys quand Nathanaël et Helynnah sortaient, j'ai entendu parler de toi : la mystérieuse fille dont ils n'avaient aucune nouvelle depuis quelques années. Je n'ai jamais vraiment su où tu étais ou pourquoi tu n'étais jamais là, mais je sentais que tu manquais à ce trio.
Ces mots me prennent à cœur, mais je ne sais pas s'ils me poignardent ou s'ils apaisent mes plaies déjà existantes. Encore de nouvelles contradictions.
— Si j'ai réussi à obtenir, ne serait-ce qu'une toute petite place au sein de cette famille, alors tu trouveras la tienne. Il faut juste être patiente. Quant à ton départ, si tu as peur de blesser les gens, pourquoi ne pas le décaler ? Qu'est-ce qui t'oblige à partir ?
Et la graine se planta dans mon esprit. Je redoute ces trois semaines et leurs conséquences, mais je n'ai jamais envisagé une autre option que celle-ci, probablement par colère ou par peur de ne pas être accueillie. Mais tout s'est tellement bien passé. Mon père m'a ouvert ses bras avec des souvenirs que je pensais oubliés à tout jamais, Helynnah regrette les années perdues et Maëlys me considère comme la grande sœur qu'elle n'a jamais eue.
Et si, je restais ? Qu'est-ce que cela impliquerait ? Plus de temps pour obtenir des réponses et comprendre. Apprendre à revivre avec mon père. Passer du temps avec les personnes avec lesquelles j'ai sympathisé : Louison et Marilou en tête de liste.
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À l'ombre des cerisiers fleurissent des bourgeons d'amour
RomanceUn cerisier Un bel été Des bourgeons naissants Remplis de sentiments Cassiopée n'a pas vu son père depuis sept ans, et sincèrement, elle s'en serait bien passé. Après tout, il les a abandonnées du jour au lendemain sans prévenir. Mais, parfois, les...