Voyage à Huntingdon

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HUIT HEURES, le lendemain, je vais prendre mon petit-déjeuner, Holmes était déjà parti. Mme Hudson m'apprit qu'il n'avait toujours pas mangé et qu'il avait reçu une lettre de son frère juste avant son départ précipité de l'appartement. Je soupirai avec lassitude et me préparai à me restaurer. Enfin Holmes refit bientôt surface dans la matinée. Son visage était encore plus pâle que d'habitude, mais il conservait sa vitalité.

- J'espère que êtes prêt à partir en chasse mon cher Watson. Nous allons immédiatement chez ce cher Tenderley. Mon frère nous rejoindra ultérieurement.

J'obéis avec plaisir à l'ordre de Holmes. Un fiacre nous attendait à la porte du 221 b Baker Street. Durant le cours voyage mon compagnon me fit le récit succinct de ses aventures de la matinée.

- J'ai reçu à six heures du matin un télégramme de Mycroft m'informant qu'une lettre de menaces avait été adressée à Braineson. Je l'ai ici ! Elle a été rédigée à l'aide de caractères d'imprimerie du Daily Telegraph d'hier soir, on les a découpés minutieusement à l'aide d'un petit ciseau très bien aiguisé, peut-être un ciseau de barbier. Je suis allé voir Mycroft et Braineson, qui est très abattu d'ailleurs. Il a demandé une protection permanente de la police, Lestrade a fait le nécessaire. Puis j'ai rencontré le médecin légiste de Scotland Yard, le docteur Scott, pour faire un peu le point sur les crimes commis par John Spencer. C'était selon le docteur Scott un réel travail de boucher, il m'a donné quelques détails sordides. Ma foi, Jack L'Eventreur n'a qu'à bien se tenir ! Par contre il m'a donné une information assez intéressante. Chaque victime du sexe faible a été violée.

- Seigneur, soupirai-je. Nous poursuivons un véritable monstre. Et l'heure de la mort de Sir Edward ?

- C'est ce que nous pensions, entre onze heures et demie et minuit. La mort fut bien entendue instantanée.

- Avec un coup de revolver en plein crâne le contraire aurait été étonnant.

- N'est-ce pas ? Et si je vous disais que Sir Edward avait bu un whisky quelque temps avant sa mort, arriverais-je à vous surprendre ?

- Vous vous y attendiez.

- En effet, reconnut Holmes. L'intendant M. Sheppard m'a juré qu'il n'avait servi aucun verre d'alcool à Sir Edward le soir de sa mort. Mais il m'a montré le tantalus caché dans la commode élisabéthaine. N'importe qui peut y accéder, il suffit de connaître son emplacement. Voilà c'est à peu près tout. Maintenant j'ai besoin de faire avouer l'inspecteur Tenderley si je veux que mon enquête avance. Qui est ce criminel terrible qui a poussé Sir Edward à se suicider après avoir bu un verre de whisky en sa compagnie ?

La maison de l'ancien inspecteur restait inchangée, toujours lugubre et pauvre mais par un je ne sais quoi, je la trouvais doublement lugubre et sinistre. Elle me fit froid dans le dos et je crois que Holmes ne fut pas étranger à cette sensation de mort. Alors que nous descendions de fiacre devant le portail, un petit homme accourut vers nous en faisant de grands signes. Je reconnus immédiatement le célèbre Inspecteur Principal de Scotland Yard, Georges Lestrade.

- Bonjour Lestrade. Comment va Tenderley ? Meurtre ou suicide ? S'exclama Holmes en souriant.

Lestrade contempla mon ami avec un profond étonnement.

- Meurtre. Mais comment diable savez-vous qu'il est mort ? Nous ne sommes là que depuis cinq minutes. C'est la bonne qui nous a prévenu.

- Lestrade, expliqua Holmes d'une voix lasse. Si la police est chez quelqu'un, ce n'est déjà pas bon signe, mais lorsqu'il y a le médecin légiste, il y a un corps. J'aperçois la vieille bonne de l'inspecteur en larmes sur le pas de la porte, donc c'est son maître qui est mort.

Un crime à Buckingham PalaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant