Pour la première fois

↺ My immortal ↻

Katsuki n'allait pas bien. Il allait vraiment mal. Ça ne se voyait pas tant que ça quand on le regardait comme ça, mais n'importe qui le connaissant un minimum aurait dit que ça sautait aux yeux.

Il avait discuté avec son couple d'amis, ils lui avaient avoué qu'ils en avaient parlé aux autres, Mina et Hanta. Eijiro avait aussi avoué à son ami comment il avait su pour Izuku. Katsuki n'en revenait pas. Ils ne sortaient quasiment jamais ensemble en public, ou plutôt en tant que couple, vous savez, certaines personnes ne sont pas et ne seront jamais assez ouvertes d'esprit pour envisager qu'un couple homosexuel puisse se balader librement en se tenant la main. Et ça, ça l'avait frustré pendant des années. Et voilà qu'il apprenait que Deku se pavanait en public avec sa nouvelle conquête. Bah oui, c'était une femme, fini les remarques homophobes et les préjugés pour le vert.

Katsuki n'était définitivement plus le même, il passait son temps enfermé dans sa chambre, enfin dans la chambre que leur avait gentiment prêté ses amis, il n'en sortait que pour se doucher, se restaurer, aller aux toilettes et au travail. Et au bureau de tabac. Il ne pouvait pas continuer à piquer des clopes à son ami indéfiniment. En temps normal il ne fumait pas, il s'était promis de ne jamais devenir dépendant de « cette merde », mais quand il était stressé, et Dieu sait à quel point il l'était, il fumait.

Il n'avait pas ouvert la boutique le lundi qui avait suivi, ni le mardi, ni le mercredi, c'est jeudi qu'il y était retourné, un peu d'auto-motivation et un bon coup de pied au cul lui avait suffit pour le remettre d'aplomb. Il se comportait normalement avec ses clients, bien qu'étant un peu plus distant et renfrogné que d'habitude. Les clients ne s'en formalisèrent pas et pensèrent alors qu'il venait d'apprendre une mauvaise nouvelle.

Alors qu'il était encore enfermé dans sa chambre, il se leva d'un bond, pris d'une furieuse envie de courir, de se défouler, d'extérioriser. Alors il s'habilla rapidement, enfonça ses écouteurs et lassa ses baskets. Il se redressa et sortit de l'appartement prévenant qu'il sortait. Au début il marchait, trouvant qu'il y avait beaucoup trop de monde sur le trottoir à cette heure-ci pour pouvoir courir, il se rendit donc au parc. Il entra dans le parc cet commença à courir. On pouvait remarquer à sa manière de courir qu'il était dans un état second. Il ne se concentrait pas sur l'endroit où se posaient ses pieds, ni sur la trajectoire qu'il prenait, ni sur sa respiration qui était vraiment catastrophique. En fait il ne savait même plus où il allait, ce n'était pas sa préoccupation première, tout se passait dans sa tête. Il pensait à la situation dans laquelle il était. On l'avait trompé, on l'avait plaqué, on l'avait mis à la rue, on lui avait fait du mal.

« On lui avait fait du mal ». Il y a quelques jours, il n'aurait jamais tenu ces propos, les aurait encore moins imaginés. Depuis le début il se sentait responsable de tous les maux qui l'avaient accablé. Pourquoi ? Pourquoi avait-il fallu qu'il endosse toutes ces responsabilités ? Ce n'était pas son genre, à Katsuki, de se laisser faire, sans rien dire en plus. Et ça l'était encore moins lorsqu'il était question de culpabiliser pour des actes qu'il n'avait pas commis.

Il s'énervait alors qu'il était en pleine course, il venait de se rendre compte, après des mois à nier, à se dire que tout était sa faute, qu'en fait, il était le dindon de la farce. Il se rendit compte qu'on l'avait pris pour un gros con. Qu'Izuku s'était bien foutu de sa gueule.

Tout ce temps perdu à déprimer, à nourrir un espoir en vain, à faire des efforts surhumains, à se surpasser pour ne rien laisser paraître, pour tenter de continuer à plaire à son ex petit-ami. Ce temps gaspillé qu'il aurait pu utiliser pour bien mieux que « ça ». Non mais sérieusement, qu'est-ce qui lui avait pris de faire l'ignorant ? Il s'était gâché la vie, se voilant la face, alors qu'au fond de lui, il savait très bien ce qui se tramait, et il savait par-dessus tout qu'il n'était d'aucune utilité de nier. C'était définitif, on l'avait pris pour un gros con.