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Ivar se tenait à la proue du navire, son regard acéré scrutant les dunes dorées qui ondoyaient au loin. De lourds nuages, résidus de l'orage de la nuit, filaient dans un ciel de plus en plus bas. Seuls le bruit du vent et le fracas des vagues laissant dans leur sillage des algues brunes mêlées d'écume sur le sable du rivage venaient troubler le silence.

— On y est presque, dit-il, on sera bientôt de retour.

Derrière lui, Frowin hocha la tête.

Quelques minutes plus tard, la quille du navire fendait le sable. L'équipage rentra les rames et le capitaine, accompagné d'une demi-douzaine d'hommes, sauta par-dessus bord dans le ressac pour regagner la rive à pied. Petits à petit, un attroupement se forma autour d'eux. Et comme à chaque fois, on pouvait voir les accolades de ceux qui retrouvaient leurs familles qu'ils avaient quitté depuis, semble-t-il, bien trop longtemps. Et pendant ce temps, D'autres faisaient descendre les cargaisons, du moins ce qui en restait.

Bien loin de cette atmosphère chaleureuse, Ivar en compagnie d'Harkkon,  s'attacha à faire le tour des dommages subis par le navire.

— Voile déchirée, vergue cassée, gouvernail fêlé, mais on ne s'en sort pas si mal en fin de compte. Et nous n'avons que trois hommes touchés.

— Oui, ç'aurait pu être pire.

— J'ai bien cru que nous allions finir en nourriture pour les poissons.

— Si nous ne réparons pas, c'est ce qui va arriver la prochaine fois qu'on prendra la mer, dit Ivar. Désigne un groupe de travail pendant que je vais voir les blessés.

Quelques instants plus tard, la voix d'Harkkon retentit :

— Frowin ! Beorn ! Asulf ! Descendez cette voile ! Eirik et Frodi, aidez-les à sortir la vergue ! Les autres, venez ici !

Aussitôt, le navire se transforma en véritable ruche. Ivar les regarda s'activer un moment, puis partit passer en revue les dommages humains. Au cours de l'orage, l'un des hommes avait fait une violente chute, un autre s'était entaillé le bras et aurait besoin de points de suture, et un troisième avait des côtes cassées. Heureusement, maintenant qu'ils étaient sur la terre ferme, les soins seraient plus faciles à dispenser.

Après avoir offert tout le réconfort moral qu'il pouvait aux blessés, Ivar alla rejoindre ses autres hommes, qui s'affairaient autour du bateau. Sept journées de dur labeur l'attendaient, mais cela ne lui faisait pas peur : quand il travaillait, son esprit était tout à sa tâche et il oubliait le reste. Le temps atténuait sa douleur, mais pas ses souvenirs. Seul le travail rendait ces derniers moins vivaces, momentanément.

- Mon frère, tu es enfin venu, cria une voix au loin.

Olàf serra fort son frère qui le prit également dans ses bras :

- Comment s'est passé le voyage ? As tu réussit à convaincre Ingir de nous aider ? demanda Olàf

- Je préfère parler de tout ça plus tard, déclara Ivar avec une voix intransigeante.

Étonné au début, il commença à se douter de la cause de la mauvaise humeur de son frère en voyant l'état du bateau. Sans un mot, il l'aida à diriger les hommes et à s'occuper des dégâts les plus importants. Ceci fait, les frères rentrèrent ensuite dans le château et gravirent les marches du perron, traversèrent la grande salle où des plateaux de victuailles étaient en train d'être installés sur de longues tables à tréteaux , et poursuivirent leur chemin en haut de l'escalier pour aboutir aux quartiers privés. Ils ne discutaient jamais des affaires du clan en public.


[...]

- Je n'ai pas faim, déclara Amalia en repoussant le bol de bouillon, même si l'odeur faisait gargouiller son ventre.

SOUS L'EMPRISE DU VIKINGOù les histoires vivent. Découvrez maintenant