La fièvre se déclara le lendemain soir chez Alice. Le bain chaud qu'elle avait pris et la tisane infusée, préparée par sa femme de chambre à son retour ne l'avait pas aidée. Et actuellement, elle était au fond de son lit, en sueur, luttant contre la fièvre.
Charles était derrière la porte, attendant que le médecin sorte. Son père était dans son bureau, comme à son habitude, tandis que la marquise de la Garrière avait proposé son aide. Elle se trouvait donc près de la malade.Le médecin sortit et fit signe au fils du duc de le suivre. Arrivés au début des marches, il se tourna vers lui et dit gravement :
— Lady Alice a prit froid. Vous avez eu une bonne réaction pour le bain et la tisane mais malheureusement, la fièvre l'a emportée.
— Voulez-vous dire qu'elle est ... ?
— Non milord, je dis simplement que la fièvre est présente. J'ai cru comprendre par la femme de chambre, que Lady Cross était fragile de santé. Tout dépendra de cette nuit. Si elle passe la nuit, alors considérez la comme sauvée. Sinon...
Le duc remercia le médecin puis retourna près de la porte attendant qu'on lui ouvre. Bénédicte arriva peu de temps après et le fit entrer. La marquise se trouvait près de celle qu'il aimait – tableau surprenant cela dit. Elle passait un linge humide sur son front, essayant de faire baisser la fièvre.
— Ch... Charles... murmura la jeune fille alitée.
La marquise se tourna vers le jeune homme et lui tendit la main pour qu'il s'approche d'elle, ce qu'il fit. Il prit la main froide d'Alice dans la sienne et la serra légèrement.
— Je suis là mon ange, je suis près de vous.
Il prit le linge humide de la main de la marquise et tamponna le front de la jeune femme. Oui, il était là et il allait rester auprès d'elle le temps qu'il faudrait. D'une parole, il demanda à tous de sortir à l'exception de Bénédicte afin qu'elle l'assiste dans ses soins. La marquise le regarda, l'air peiné, puis sortit rejoindre le duc de Camburry.
Charles resta ainsi seul, Bénédicte se trouvant dans la salle de bain pour étendre le linge trempé.
— Je suis désolé pour tout ce qui vous arrive. Si seulement... J'avais du courage pour affronter mon père. Cela nous simplifierait bien des choses. Mais je ne suis qu'un lâche Alice. Vous aimez un lâche. Je ne vous mérite pas.
Il baisa tendrement sa main et caressa de ses doigts ceux de celle qu'il voulait.
— Si vous vous en sortez, je vous promets de me battre pour vous. Peu importe mon devoir. Peu importe les ordres de mon père. Je vous veux vous. Je te veux toi, murmura-t-il en se penchant vers son visage.
Il posa son front contre le sien et embrassa tendrement ses lèvres, puis ses joues brûlantes. La nuit étant tombée, il s'allongea près d'elle, le dos contre la tête du lit. Charles prit délicatement la jeune femme par les épaules en soutenant sa tête, puis la cala contre son torse. Dans son délire dû à la fièvre, il l'entendit murmurer un « merci » discret. Il prit de nouveau le linge humide entre ses doigts et épongea son front.
La marquise pendant ce temps avait retrouvé le duc dans son bureau en train de lire des papiers importants. Lorsqu'il l'entendit entrer, il leva la tête et sourit.
— Marquise, vous me voyez désolé de tout ce que vous devez endurer. Ma filleule n'en a fait qu'à sa tête et a manqué de se noyer. Les jeunes de nos jours sont inconséquents.
— Justement milord, je suis venue afin de vous parler de votre fils et de votre filleule. J'ai pu remarquer à quel point votre fils est proche de cette jeune femme.
— Il la tient en haute-estime mais je peux vous promettre qu'il ne manquera pas à son devoir, déclara le père en fronçant les sourcils.
— Je ne veux pas épouser votre fils et empêcher son bonheur. Nous nous sommes certes rapprochés et... Non duc, laissez-moi terminer je vous prie, dit-elle en levant le doigt, calme. Charles s'est beaucoup confié à moi pendant ces deux semaines où nous nous sommes vus à Londres. C'est un homme d'honneur et de devoir, je n'en disconviens pas. Il a sacrifié son premier mariage pour vous faire plaisir, pensez-vous qu'il serait judicieux de sacrifier le deuxième sous prétexte que Lady Cross n'est que vicomtesse ? Elle semble s'être rapprochée du prince, il doit la tenir en haute estime.
— Marquise, merci de ne pas vous mêler de mes affaires familiales.
— J'essaie surtout de vous faire comprendre que tant que votre fils possède encore un peu d'affection pour vous, cela serait stupide de le perdre à tout jamais en le mariant de force une deuxième fois. Je vais terminer mes bagages et repartirai pour Londres demain matin. La nuit sera compliquée pour nous tous et je prie pour que Lady Cross se rétablisse au plus vite. Si non, vous perdrez votre fils à tout jamais.
Elle s'inclina devant lui puis monta les escaliers pour aller jusque dans sa suite et terminer ses malles. Le duc, resté seul dans son grand bureau, repassa en boucle les paroles de la veuve. Son fils avait donc encore un peu d'affection pour lui. Il soupira et monta jusque dans la chambre d'Alice pour prendre de ses nouvelles. Discrètement, il poussa la porte et vit sa filleule blottit contre son fils. Les deux dormaient à poings fermés. Alice en tremblant et en s'agitant quelques fois réveillait Charles. Il prenait donc le linge, le trempait dans un bac d'eau froide et le posait contre son front en murmurant des paroles réconfortantes. Attendri par ce tableau, Alfort fit un signe pour attirer l'attention de son fils.
Charles fronça les sourcils en voyant son père lui dire de venir. Il murmura « je reviens » au creux de l'oreille de sa bien-aimée, puis la déposa doucement contre l'oreiller. Il se leva et rejoignit son père dans le couloir.
— Père, je me devais de prendre soin d'elle. C'est à cause de nous si...
— Je ne veux pas d'explications Charles. Sache que j'ai une discussion avec la marquise de la Garrière. Elle part demain. Et elle m'a expliqué ses raisons.
— Si vous souhaitez que je l'empêche de partir, je ne le ferai pas. Je ne l'aime pas et je ne veux pas l'épouser.
— Très bien.
— Non père, je veux épouser Alice. Que cela vous plaise ou non ? Peu importe si vous me déshéritez. Je partirai avec elle.
— Fais le donc mon fils, dit le duc avec un petit sourire.
— Attendez... Seriez-vous d'accord pour que j'épouse Alice ?
Alfort acquiesça en souriant tandis que Charles s'appuya contre le mur ne s'y attendant pas.
— En revanche, je veux que vous habitiez ici. Et que le mariage soit discret. Quand Londres apprendra qu'un duc à épousé une vicomtesse, ce sera le scandale assuré.
Charles serra l'épaule de son père en le remerciant puis retourna auprès d'Alice attendant que la nuit passe et que dès le matin elle se réveille.
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Le Duc de Camburry
RomansaAnnée 1850. Le Duc de Camburry, veuf depuis peu, doit se remarier rapidement n'ayant pas encore eu d'héritier. Fils unique, sa mère est décédée lors de sa naissance. Son père, voulant se venger transforma l'enfant en un homme froid et implacable. Il...