III.3 Supplique

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« Il est touché ! J'ai eu cet enfoiré !

— Mettez-la en veilleuse, Ronan, et partez m'achever ce salopard.

— Mais...

— Exécution ! »

Il fallut quelques instants supplémentaires au Prince afin de comprendre ce qui venait de se passer. Pourtant, la chose était fort simple, Sigun venait de se faire prendre en chasse par un groupe d'hommes. Et à entendre le ton de l'un d'entre eux, il s'agissait assurément de soldats, ou du moins, de mercenaires. L'entité se mit à réfléchir, il était bien trop tôt pour qu'il puisse affronter l'ennemi sans même les avoir dénombrés. Il entendit le claquement sec des arcs qui venaient de se détendre. Sans hésitation, il se laissa choir sur le sol, voyant au passage une flèche se figer dans le ventre d'un de ses esclaves, mais celui-ci semblait y survivre et suivit l'exemple de son maître. La situation était mal engagée, Sigun avait senti les connexions se rompre une à une, ne laissant qu'eux deux contre leurs adversaires.

« Bien tiré, Nolan, droit dans le mile !

— Merci chef, c'était facile.

— Toi le fangeux, va donc t'assurer qu'ils ne respirent plus. Je ne sais pas ce que c'était, mais ça ne me dit rien qui vaille. Zaron, Démérin, allez avec lui et décapitez les cadavres.

— Reçu sergent ! »

D'un pas traînant, l'homme vêtu d'habits en lambeaux commença à avancer.

« Fangeux, fangeux... Il porte un nom, l'fangeux. Sans moi s'auriez pas fait d'vieux os dans les marais...

— Et comment vous appelez vous déjà ?

— Leake, m'sieur le sergent.

— Leake... avancez ou c'est vous que je décapite, compris ?

— Pfff cognards des vases...

— Pardon ?

— Humf, j'y vais, paniquez pas. »

Les hommes avaient parlé assez fort pour que Sigun arrive à les entendre. Sergent... Il s'agissait donc bien de soldat. Le Prince resta immobile, ne bougeant aucun de ses membres, après tout, la mort lui était bien familière. Enfin, il commençait à voir, pourtant ses yeux étaient restés clos. Sa vision lui parvenait floutée, mais plus Somort prenait de la hauteur, plus son maître avait une vue dégagée. Bien sûr, cela n'avait rien à voir avec le net aperçu qu'aurait pu avoir un homme, mais les myriades de regards braqués sur les assaillants, lui permettaient au moins d'apercevoir les silhouettes une fois les visions des servants recoupées dans l'esprit de l'entité.

Un homme avait pris la tête du groupe, certainement un indigène qui était chargé de guider les autres. Ce dernier était suivi des deux que le sergent avait missionnés pour le décapiter tandis que deux silhouettes supplémentaires se fondaient dans le noir, presque imperceptibles. Sigun attendit patiemment. Il avait réussi à glisser discrètement ses paumes de mains vers la terre afin de préparer sa riposte, ne pouvant compter que sur ses servants et un décérébré. Le Prince n'aurait pas le droit à une seconde chance, car son enveloppe était encore bien trop fragile pour essuyer des dommages importants, et cette fois-ci il ne pourrait pas se réfugier au sein du sous-monde. Il ouvrit les yeux, plantant ses doigts plus profondément dans la terre et dans un murmure, déclencha son plan sans éveiller le moindre soupçon.

« D'arbre en arbre, vous passerez, et en pluie de mort, vous tomberez. »

Alors que Sigun attendait le moment propice, pour passer à l'action, les trois hommes s'approchaient toujours plus de lui. Le guide s'arrêta tout proche de son corps et sembla le scruter des pieds à la tête. Curieux, son attention fut portée sur une petite chose jetée non loin de la chose.

Le prince de l'oubliOù les histoires vivent. Découvrez maintenant