EPILOGUE

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Nous sommes le 2 janvier. Pour beaucoup ça rime avec repos après le jour de l'an, la reprise des bonnes résolutions et le retour à la réalité. On repart sur de bonnes bases et on ne pense plus à l'année passée. La mienne a été pas mal mouvementée. J'ai perdu mon meilleur ami et je suis tombé amoureux pour la première fois. J'ai vécu ma première déception sportive, mon premier chagrin d'amour et ma première vraie remise en question. J'ai réussi à dire à mon père tout ce qui n'allait pas et on a fait de vrais efforts pour améliorer notre relation.
Aujourd'hui la maison est vendue et je vis dans un appartement plutôt spacieux au centre-ville. Il fait l'effort de venir deux fois par mois minimum et ne me met plus la pression pour les études, ni pour le baseball.
Un peu avant ma remise de diplôme, le coach m'a informé qu'il avait un ami qui pouvait me faire jouer en équipe supérieure de baseball à condition que j'ai de supers notes à la fac. Alors j'ai intégré l'université de Vancouver. J'ai pris économie en spécialité, finalement j'ai réalisé qu'en m'intéressant un peu aux cours ça pouvait être passionnant. Et si je ne deviens pas joueur de baseball professionnel ça peut m'ouvrir des portes. Je m'entraîne presque tous les soirs dans ma nouvelle équipe. La coach est plus sympa mais aussi plus dur avec nous. Elle ne tolère aucun retard ni bavardage, à la seconde où on entre sur son terrain, nous sommes des joueurs et rien d'autre. Alors je n'ai le droit à aucun écart et je dois gérer mes émotions. Je suis heureux des choix que j'ai fait, mon université est géniale, mes entraînements m'obligent à redoubler d'efforts chaque jour, mon père est fier de moi et je crois que j'ai fini par me faire à Vancouver. La seule chose qui me manque c'est...
— Joyeux anniversaire ! Hurle Matthew en passant la porte.
Je lève les yeux et me maudit de lui avoir donné le code d'entrée de l'immeuble. Ça m'apprendra à laisser ma porte ouverte aussi. Il m'attrape par les épaules et me tire contre lui. Je déteste quand il est comme ça.
— Alors ça fait quoi d'avoir dix-neuf ans ?
La même chose qu'à dix-huit ans je suppose. Matthew est aussi à l'Université de Vancouver mais il s'est spécialisé en biochimie, difficile à croire quand on le voit comme ça mais c'est vraiment son truc. Il a fini par larguer cette idiote de Chloé et sort depuis quelques mois avec Naomie, une fille de sa classe beaucoup plus cool et intéressante.
— J'ai bien fait d'insister pour la soirée de ce soir, t'as même pas entraînement, t'es un sale menteur.
Officiellement je devais avoir entraînement, mais ma coach a dû annuler car sa fille vient d'accoucher d'un petit garçon. Excuse légitime, surtout quand on a la chance de naître un 2 janvier.
— Je t'ai dit pas plus de dix personnes ! Menaçais-je en le pointant du doigt.
Il se pince les lèvres et se met à compter :
— Toi, moi, Naomi, Eliott, Théo, Sam, Jess, Thomas... Tu comptes inviter Tabata ?
Je soupire et m'assieds sur le canapé.
— Non, elle est sympa mais...
Il râle et s'étale à côté de moi.
— Mais elle n'est pas Andra.
Je déglutis et prend l'oreiller à côté de moi que je serre dans mes bras.
— Quand est-ce que tu vas passer à autre chose ? Ça fait des mois que vous êtes plus ensemble.

Dix mois en fait. Presque un an. Dix mois que je l'ai embrassé pour la dernière fois et que je lui ai dit que je l'aimais. Dix mois que je travaille sur moi, pour nous. Ça n'a pas été facile, pas du tout. Je pensais que le plus compliqué serait de la voir tous les jours. Mais non, à côté de son départ, c'était du gâteau. Je pouvais encore la voir, lui demander comment elle allait et la regarder pendant de longues minutes entre chaque intercours. Elle n'était plus à moi, mais elle était toujours là.
Son déménagement à Toronto par contre...
C'était juste après la remise des diplômes. Je la revois, devant sa maison à côté du camion de déménagement. Un carton sous le bras. Elle était terriblement angoissée mais elle se retenait de pleurer, pour sa mère. Soi-disant. Elle était sûre d'elle et me répétait que c'était le bon choix, qu'elle y arriverait, toute seule, là-bas et qu'elle n'en sortirait que grandie. Au début, je l'appelais chaque soir, pour lui demander si tout allait bien. Si son appartement lui plaisait et si c'était exactement comme elle l'avait imaginé. Puis nos appels se sont espacés. J'ai dû me focaliser sur le baseball et mes révisions, et elle a rencontré de nouvelles personnes. Évidemment on se donne des nouvelles de temps en temps, je regarde ses photos sur Instagram.
J'imagine qu'elle est heureuse là-bas et qu'elle a enfin trouvé qui elle était vraiment. J'aurais voulu lui rendre visite mais les entraînements m'en ont empêché. Peut-être aux prochaines vacances ou peut-être pas du tout. La vérité c'est qu'une partie de moi me dit que je devrais finalement tourner la page, peut-être que le timing n'était pas bon et qu'il ne le sera jamais. Je ne devrais pas m'accrocher à une promesse qu'on s'est faite il y a presque un an. Mais je crois que je préfère espérer, ça me donne un but. Elle m'a tout de même envoyé un message ce matin:
« Joyeux anniversaire! J'espère que tu vas bien, tu me manques. »
Je sais qu'elle aurait pu envoyer ces mots à sa grande tante comme à n'importe qui d'autre. Mais je les ai relus encore et encore. Je n'ai pas répondu. Je veux choisir les mots qu'il faut, j'attendrai demain, quand je serai seul.
— Bref, c'est mon anniversaire, je ne veux pas parler de ça.

It wasn't a mistakeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant