Chapitre 34 : Un sourire affligeant

2.9K 127 14
                                    

*Mathieu*
Louise me regarde d'un air désespéré. Je pense qu'elle veut que je reste avec elle. Le problème c'est que je suis si énervé que je ne supporte plus de voir sa gueule.

-J'vais faire ça.

-Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter que tu te comportes comme ça avec moi ?

J'ai rigolé.

-Je crois que j'ai été plus que patient avec toi. Ne m'attends pas pour dormir. Je ne vais pas rentrer.

J'ai claqué ma porte et je suis descendu. J'ai branché mes écouteurs dans mon téléphone et j'ai allumé mon joint. Machinalement, je me suis assis sur les marches. Le son est tellement fort que je n'ai même pas remarqué la présence d'Azalée. J'en ai enlevé un.

-Mauvaise soirée ? dit-elle en s'asseyant à côté de moi.

-C'est plutôt moi qui devrais te demander ça.

-J'ai entendu des cris, avoua-t-elle. Tu t'es disputé avec Louise ?

Le sourire que me fait Azalée est bouleversant. Je doute qu'elle ait envie d'entendre mes histoires de coeur. Pourtant, elle le fait quand même.

-C'est à cause de Louise que je ne t'ai pas répondu. Elle m'a dit que le message n'était pas important. Naïvement, je l'ai crue.

-Je suis désolée. Parfois, j'oublie que tu n'as plus autant de temps à m'accorder.

J'ai grimacé. J'ai envie de lui dire qu'elle se trompe mais ma fierté m'en empêche. Oh et puis merde.

-T'es bête ou quoi ? rigolai-je. J'aurais toujours du temps pour toi. Meuf ou pas meuf, tu passes avant Louise.

Quelque chose s'est illuminé dans son regard. Elle s'est levée et m'a tendu la main.

-Viens, on va marcher.

Azalée m'a trainé dans le métro 6. Je lui ai passé un écouteur et elle chantonne délicatement. Les autres personnes nous regardent mais elle s'en fiche. Une fois sortis du métro, elle m'a entraîné sur un pont donnant sur la Tour Eiffel. Elle est illuminée, comme chaque soir.

-Quand j'habitais encore chez mes parents, je venais ici souvent. Tu vois là-bas ? C'est l'appartement de mon père.

Elle a marqué une pause.

-Ici, c'était un peu mon endroit secret. Un endroit où je venais quand j'avais besoin de souffler un peu.

-Moi, j'allais sur le toit de mon bat.

Elle a posé sa tête contre mon épaule. Nous sommes restés assis dans le silence pendant de longues minutes. Encore une fois, être avec elle m'apaise. Je ne sais pas trop comment l'expliquer mais quand j'suis avec elle, une énorme vague de bonheur me prend le bide. J'me sens juste extrêmement léger. Plus de problème de miff, plus de Louise, plus de drogue, plus de keufs. Elle efface tout avec un battement de cil. Sans déconner, elle est pire qu'une drogue. Parce qu'avec elle, j'ai l'impression de planer tout le temps.

-Il se passe quoi dans la tête du polak ? rit-t-elle.

-Rien, j'suis bien là.

*Azalée*
Moi aussi, je me sens bien mais j'ai bien trop peur de lui avouer.

-Je vendais de la drogue pas très loin, avoua Mathieu.

J'ai levé les sourcils.

-De la cocaïne, du shit ou de la beuh, je m'en foutais à l'époque. Je voulais juste pouvoir me payer des vêtements et remplir le frigo de ma grand-mère et de mon daron. J'ai commencé à vendre quand j'ai vu ma grand-mère pleurer sur les factures. Ça m'a rendu dingue de savoir que j'pouvais rien faire.

Il a fait une pause pour tirer sur sa clope.

-Grandir dans la pauvreté, c'est trop chelou. Maintenant, j'ai l'impression d'avoir jamais assez d'argent. Donc, je bosse comme jamais. Mais tu sais quoi ? J'suis grave fier de moi. Ma famille est à l'abris. Ma petite reuss et mon petit reuf vivent une vie normale loin des galères du quartier. Donc, ouais. Je suis fière de oim.

Ce soir, il s'ouvre complètement à moi. Ça valait le coup d'attendre, vraiment.

-Tu as commencé de rien, Mathieu. Aujourd'hui, tu as tout. Tu le mérites.

Il m'a embrassé le crâne et s'est concentré sur les illuminations de la Tour Eiffel. Il est beau, même si sa coloration laisse un peu à désirer. Objectivement, il n'a jamais été mon style de mec. J'ai toujours été intéressée par les mecs qui s'habillent classe et qui font de grandes études. Ou alors, c'est sans doute une illusion. Ma pensée était faussée puisque j'ai toujours connu que ce style de mec en particulier. Bizarrement, Mathieu est le seul qui fait battre mon cœur aussi vite.

-Putain, Louise fait que m'envoyer des messages, pesta-t-il.

Il m'a donnée son téléphone.

Louise : Mathieu, je t'en supplie, rentre à la maison. Je suis désolée. Je ne vais pas pouvoir dormir sans toi. Reviens, s'il-te-plaît. Je t'aime.

Mathieu a l'air tellement indifférent que ça me fait mal pour Louise. Ce n'est pas une fille méchante, loin de là. Elle est la définition exacte de la perfection. Bonne famille, brune, yeux verts, un corps parfait. Je fais tâche à côté d'elle.

-Une rose pour ta copine ? demanda un vendeur de rose.

Mathieu a rigolé puis m'a regardé. Il a donné deux euros à l'homme et a pris deux roses. Il me les a donnés. Je crois que je suis tombée amoureuse de cet homme.

-Quel romantique, dis-je en rigolant.

-T'as vu ça, rétorqua-il en souriant. Bientôt, je vais me transformer en canard.

Nous sommes partis en direction de nos appartements. Dans le métro, je sens que les roses qui dégagent une odeur particulièrement apaisante. Je n'ai pas envie de rentrer. J'ai envie que cette soirée continue pour toujours, qu'on reste bloqué dans cette matrice qui est incroyablement douce. En silence, nous sommes montés. Arrivés devant la porte, il m'a dit au revoir.

-Bonne nuit, Aza.

Il a commencé à monter les escaliers.

-Mathieu ? Attends.

Il s'est arrêté et m'a regardé, sans comprendre ce que je comptais rajouter. J'ai pris une grande inspiration. J'ai plongé mon regard dans le sien. Notre échange a duré quelques secondes mais on ne dirait vraiment pas. Et puis merde, je vais prendre mon courage à deux mains.

-Je crois que je suis tombée amoureuse de toi.

*******
Fin du 34ème chapitre !
Azalée fait une grosse révélation.....

Deux mondes opposésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant