Chapitre 42 : Traumatisme

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*Azalée*
Sans surprise, Mathieu était froid à son réveil. Après des longues heures de route moroses, je suis arrivée chez moi. Au moment d'ouvrir ma porte, j'ai remarqué qu'elle était déjà ouverte. Avant de rentrer, j'ai envoyé un message à Zola.

Moi : Tu es à l'appartement ?

Zola : Je suis avec Noa. On est sur la route. J'arrive dans quelques minutes. Pourquoi ?

Moi : T'es chiante Zola ! Tu oublies toujours de fermer la porte !

J'ai rangé mon téléphone dans ma poche en maudissant ma sœur. Machinalement, j'ai enlevé mes chaussures et j'ai posé mon sac d'affaires dans l'entrée. J'ai pris un tasse dans l'étagère à côté de mon canapé. Au moment d'entrer dans la cuisine, ma tasse s'écrase sur le sol face à la scène horrible qui s'offre à moi.

Du sang. Beaucoup de sang. Benji est assis sur le sol contre ma machine à laver. Ses veines sont ouvertes. Il me regarde d'un air à moitié soulagé. J'ai pris un torchon et je me suis jetée sur le sol. J'ai commencé à faire pression sur les plaies.

-Pourquoi tu as fait ça ? hurlai-je.

-T'es partie en week-end avec Mathieu.

J'ai pris mon téléphone et j'ai appelé les pompiers. Ils m'ont dit qu'une voiture arrivait dans dix minutes et que je devais impérativement rester en ligne. Je suis terrorisée face à l'odeur et à la vue du sang.

-Je ne me sens pas bien, Aza.

-Reste avec moi, pleurai-je. Je t'en supplie Benjamin.

-Je ne veux pas continuer à vivre. Arrête d'appuyer.

-Je n'arrêterai pas ! C'est ma faute si tu es dans cet état.

Le sang coule sur mes mains et a taché mes vêtements. J'ai l'impression que ça fait deux heures que je fais pression sur les deux plaies. Je n'ai plus de force. Où est cette putain d'ambulance ?

-Je suis désolé, Aza.

-Économise tes forces.

-Je t'aime mais tu ne voyais rien. Tu étais trop focalisée sur Mathieu et ses putains de cheveux blonds. Je ne faisais pas le poids face à lui.

D'un seul coup, il a perdu connaissance. Je commence réellement à paniquer. Je continue de faire pression tout en vérifiant qu'il respire. J'essaie de lui parler mais je n'ai aucune réponse. Finalement, les pompiers sont arrivés et l'ont embarqué au plus vite. Deux hommes sont restés dans mon appartement et essaient de me parler.

Je suis assise en boule. Je n'entends plus rien. Je vois juste du sang. Du sang sur le sol, du sang sur les murs, du sang sur mes vêtements et surtout, son sang sur mes mains. Quelques minutes plus tard, Mathieu, Zola, Noa, Lola et Jonas sont dans l'appartement en train de parler aux pompiers. Je ne parle pas, je ne bouge pas. Je suis juste paralysée.

-Azalée ? dit une voix familière.

Je lève les yeux. Le docteur Clay est ici. Soudainement, je me suis levée et j'ai foncé dans ses bras. J'ai éclaté en sanglots.

-Je suis désolé Azalée, dit-il.

-Je le voyais perdre du plus en plus de sang et je pouvais rien faire. C'est de ma faute. Je l'ai blessé.

-Benjamin est malade. Il est schizophrène et quand il ne prend pas ses médicaments, il n'arrive pas à gérer. Ce n'est pas de votre faute.

-Il va s'en sortir ?

-Oui, affirma-t-il.

J'ai pris une grande inspiration pour retrouver une respiration normale. Mathieu me regarde d'un air inquiet. Là, tout de suite, je veux être le plus loin possible de cet appartement maudit.

-Je ne peux pas dormir ici, soufflai-je.

-T'es la bienvenue chez moi, dit doucement Lola.

-Ou chez moi, proposa Jonas.

-J'ai besoin d'être seule.

Mon ton est froid. Je n'ai aucune envie de parler à quelqu'un ce soir. Je veux juste être seule. Avec mes affaires encore tachées de sang, je me suis dirigée vers ma porte.

-Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée que vous soyez seule ce soir, dit le docteur.

-S'il-vous-plaît, dis-je d'un ton suppliant.

Le docteur me regarde d'un air inquiet puis finit par acquiescer.

*Mathieu*
Je suis adossé contre la bagnole d'Aza et je fume un joint. J'ai déjà vu autant de sang mais la voir aussi traumatisée m'a retourné l'estomac.

-Qu'est-ce que tu fais ici ?

-Je vais pas te laisser seule, répondis-je en écrasant mon joint.

-Je ne veux pas que tu sois avec moi.

-J'te demandais pas ton avis.

-C'est à cause de nous qu'il a fait ça.

Azalée me fixe tout en pleurant.

-Je me suis tellement focalisée sur toi que j'ai arrêté de faire attention à ce qu'il y a autour de moi. C'est de ta faute.

En temps normal, on se serait embrouillé. Je lui aurais gueulé dessus et elle m'aurait dit de ne jamais revenir vers elle. Cette fois-ci, c'est différent. Elle est sous le choc. J'crois bien que je dois être fort pour nous deux.

-Benjamin m'aimait. Quand j'y repense, ça parait évident. Ses messages, sa jalousie et ses attentions envers moi ; tout s'explique. À cause de toi, j'ai laissé de côté un ami qui avait besoin de moi. Je ne veux plus entendre parler de toi.

Elle me dit quelque chose mais son corps m'en dit une autre. Elle tremble de plus en plus. Je me suis rapproché d'elle. Délicatement, je l'ai prise dans mes bras. Elle a beaucoup pleuré et je n'ai rien dit. Pas de cris, pas de reproches, pas d'embrouilles. Juste un énorme sentiment de compassion.

Le malheur des autres ne m'a jamais réellement importé. Néanmoins, dès que cela touche de près ou de loin à Aza, j'ai l'impression de me transformer. Je n'aime pas ça mais je n'ai pas le choix. Elle a besoin de moi, c'est ça le plus important.

-Du coup, on va où kochanie ?

-Dans un appartement à ma mère qui m'appartient.

Pourquoi elle habite ici lorsqu'elle est propriétaire d'un autre appartement ?

-C'est un vrai cauchemar d'y retourner mais bon, je pense que c'est mieux que de dormir ici ou d'aller chez Lola ou Jonas qui vont m'assommer de questions.

J'ai embrassé son front. La nuit va être longue.

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Fin du 42ème chapitre !

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