Ursula, pour évacuer sa peine, se mit à chanter. Elle chantait le chant de son enfance, celui qu'elle avait préparé avec sa mère pour le festival des baleines. Et elle le répétait, encore et encore, pleurant et chantant sa détresse à qui voulut bien l'entendre. Chanter était la seule chose qu'il lui restait de sa mère, le seul lien l'unissant encore à elle et l'empêchant ainsi de disparaitre pour toujours. Et pourtant, cela ne lui était pas douloureux, chanter lui redonnait de la force, la guérissait plus vite, lui redonnait de la lumière dans les heures sombres où la mélancolie s'installe, nous amenant des pensées obscures. Chanter lui redonnait de l'espoir et elle avait l'impression que rien ne pourrait lui arriver tant que sa voix serait là pour la protéger, comme le faisait sa mère. Elle aurait aimé que sa voix fut la source de pouvoirs magiques bienfaisants, permettant de participer au bonheur d'autrui contrairement au lourd trident de son père qui n'apportait que malheur et désolation autour de lui. Elle ne voulait définitivement pas lui succéder pour régner de la même façon que lui.
Toutes ces émotions mêlées à son chant firent qu'une grande lumière vint l'illuminer, désagrégeant sur place l'objet de ses tourments. Elle crut tout d'abord qu'il s'agissait de l'œuvre du trident de son père mais ce ne fut pas le cas. Elle chercha du regard son père et la garde royale mais aucun être vivant à part elle ne subsistait aux alentours. La lumière faiblit lorsqu'elle eut arrêté de chanter, jusqu'à disparaitre complètement. Elle chercha cependant d'où pouvait bien provenir cette lumière et ré-inspecta tout le navire de fond en comble afin de se persuader qu'elle n'avait rien laisser au hasard dans sa recherche de trésor. Mais rien. Elle chercha même aux alentours et découvrit que de nombreuses autres épaves gisaient plus loin, elle était trop préoccupée pour les apercevoir jusqu'alors. Mais comme cela ne donnait pas satisfaction, elle tenta de se convaincre qu'il s'agissait sûrement d'une de ses colonnes réfléchissantes dont son père lui avait parlé, qui guideraient les marins dans les ténèbres afin qu'ils ne se heurtent pas aux dangereux récifs.
Elle savait pourtant au fond d'elle qu'il ne pouvait pas s'agir de cela, les colonnes ne se trouvent pas en plein milieu de l'océan. Son hippocampe s'étant excité lors de l'arrivée de cette lumière, elle finit par renoncer et lui chanta une berceuse pour le calmer. Elle n'en fut pas sûre mais elle crut voir au loin une faible étincelle se remettre à briller; cependant, la fatigue ayant raison sur sa curiosité, elle se dit qu'il valait mieux rentrer avant que son père ne déchaîne une bonne fois pour toutes la folie des éléments pour l'inciter à revenir; et qu'il valait mieux oublier ce lieu maudit où gisaient les carcasses des épaves abandonnées et cette histoire abracadabrantesque de lumière magique.
Elle ne savait pas exactement depuis combien de temps elle était partie, mais sa femme de chambre ainsi que certains gardes étaient dans tous leurs états en la voyant revenir au loin sur le dos de sa monture personnelle. Elle avait passé tout le chemin du retour à mémoriser chaque recoin lui permettant de, peut-être un jour, retourner à ce cimetière d'épave y rechercher la source de cette lueur. Elle se dit qu'après tout, il y'avait peut-être une raison pour qu'elle retrouve ce navire. Le soulagement général fut cependant de courte durée et elle se fit immédiatement réprimander sur place, se faisant même confisquer son fidèle destrier, lequel se vit rejoindre l'attelage du carrosse de Poséidon. Celui-ci se servit de sa magie pour confiner Ursula dans le palais. Elle ne pouvait franchir l'enceinte du palais sans que les plantes aquatiques viennent s'accrocher à sa nageoire jusqu'à l'arrivée de son père pour la délivrer. Elle était prisonnière de son propre palais, comme elle l'était déjà depuis tant d'années.
Elle décida cependant de ne pas se laisser faire, elle avais 16 ans, et pourtant elle était de plus en plus privée de liberté au fur et a mesure qu'elle grandissait. Elle aurait aimé revenir en arrière, à l'époque ou sa mère était là pour s'occuper d'elle. Au lieu de ça elle avait vécu avec l'absence de cet amour à cause de ces maudits pirates. Comme elle aurait souhaité alors que cette lumière puisse les désintégrer avant qu'ils s'en prennent à eux ce jour-là... Elle se surprit elle même à faire preuve de pensées aussi sombres, elle faillit en oublier les leçons de sa mère. Elle se reprit, chanta sa berceuse préférée, que sa mère lui chantait parmi tant d'autres. Elle eut l'impression de ressentir à nouveau sa présence, la chaleur de ses bras et sa poitrine se gonflant au rythme de la mélodie. Alors, la fatigue et le chagrin eurent raison d'elle et elle s'assoupit alors qu'elle était installée comme sa mère l'était il y'a tant d'années, devant sa fenêtre.
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Le Chant de la Sirène
Paranormalil était une fois, une petite sirène. Celle-ci vécu les plus beaux moments de sa vie jusqu'à la mort de sa mère. Seul une chose lui restait de sa mère, la plus magnifique mais aussi la plus destructrice... comment pourra-t-elle gérer ce fardeau ? Ar...