Nouvelle Lune

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Quand le fond de l'azur arbore un teint vermeil,

Je guette ton retour, ma Lune disparue.

Si je reste enfermé tant que luit le soleil,

Caresse ma fenêtre et je suis dans la rue.


Mais ce soir, nul plaisir ne s'offre à mes regards :

J'examine en tout point ton céleste royaume

Et n'y vois qu'un essaim grouillant d'astres blafards

Qui consolent bien peu mon âme de fantôme.


Où sont tes doux rayons, ton sourire idéal,

Ta couronne brillante et tes habits de brume ?

Sans toi, le noir profond du règne sidéral

Diffère-t-il vraiment de celui du bitume ?


Alors je m'aventure en ce triste dehors

Et chacun de mes pas sur le lit de poussière

Me conduit au pays où dorment tes trésors :

Si proche de mon cœur, si loin de ma tanière.


La ville, autour de moi, peu à peu se retire,

Avec elle s'en vont sa laideur et ses bruits.

Maintenant que l'humain a perdu son empire,

Lequel te gêne encore, altesse de mes nuits ?


J'ai parcouru la plaine où pleurent les grillons,

Ces êtres comme moi rongés par ton absence,

Mais ils sont tout un peuple et chantent par millions

Tandis que je suis seul à marcher en silence.


Puis, enfin délivrés du verre et du ciment,

Des tiges de métal qui volent ton image,

J'ai levé, pleins d'espoir, mes yeux au firmament,

Sans qu'en rien n'ait changé cet odieux paysage...


Je poursuis, résigné, ma route vers les cieux,

Prêt à te découvrir aux confins de la terre,

Et, si tu n'offres plus ton visage en ces lieux,

Je viendrai t'embrasser au sein de ton repaire.


La ronce et le serpent s'invitent sous mes pieds

Pour supplanter bientôt la première verdure :

Finis l'herbe docile et les jeunes pommiers,

Tous ces amis de l'Homme ont quitté la Nature.


Je ne crains ni le loup qui hante la forêt :

Nous hurlons tous les deux pour la même maîtresse,

Ni le Géant terrible et son grand couperet :

Il repose l'outil sitôt que le jour cesse.


Las de ne rencontrer au milieu de ces bois

Qu'un cortège infini de sapins similaires,

Je m'échappe au plus vite, et dès lors j'aperçois

La neige qui s'étend vers les montagnes claires.


Je me fraye un chemin dans ce blanc paradis,

Aidé par le brouillard qui s'ôte à mon approche,

Mais le givre s'attaque à mes bras engourdis

Dont les doigts pétrifiés s'émiettent sur la roche.


Hélas, cette ascension finit sur un plateau

D'où naissent d'autres monts, plus élevés encore !

Je me laisse tomber dans l'immense manteau

Pendant que le lointain se macule d'aurore...


Elle surgit alors du sinistre horizon :

Cette fille inconnue à la beauté sublime,

Qui brise les barreaux de ma froide prison

Pour déloger mon cœur des glaces de l'abîme.


« Si je suis à présent celle qui te guérit,

J'ai longtemps avant toi souffert des mêmes peines

Et croisé les démons qui rongent ton esprit,

Me dit la créature aux splendeurs inhumaines.


Lève-toi, compagnon, reprend-elle en riant,

Nous touchons désormais au but de notre quête,

Mais l'aube nous poursuit de son œil malveillant :

Partons quand tu le peux, moi je suis déjà prête. »


Et m'entraîne à ces mots vers les nobles massifs

Dont la base déjà surplombe les nuages,

Ensemble nous bravons les dangers successifs,

Comme ces dangers-même ont su braver les âges.


Nous grimpons vers la cime, et l'astre matinal

Projette les rayons de sa course enflammée,

Mais il se sait fragile en ce ciel hivernal

Et bientôt laisse place à sa sœur mieux-aimée.


Le dessin merveilleux du superbe croissant

Apparaît devant nous sur la voûte attendrie.

Je ne me défais plus du tableau ravissant

Que pour lui préférer les yeux de mon amie.


Peu m'importent la lune et son divin accueil,

Qu'elle m'ouvre sa porte ou bien me la refuse :

Si je peux l'admirer sans en franchir le seuil,

J'y demeure avec joie aux côtés de ma Muse.


31/08/13

Avant la Pologne : Iter, itinerisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant