• chapitre 6.5 •

250 42 36
                                    

Quel con il avait été.

Sérieusement. Bien sûr que Namjoon n'était pas gay, ou bi, ou intéressé par un pauvre mec comme lui. Un mec dans un brouillard constant d'alcool et de fumée, qui se contentait de jouer avec les autres et les utiliser, faute de les comprendre.

Un mec seul, en larmes, dans les rues de Séoul.

Bien sûr que Namjoon ne voulait pas de Seokjin. Il était parti du principe qu'il lui plaisait, comme à Sungho, comme à Hyeja, et tant avant eux. Il s'était trompé sur toute la ligne, à cause de son putain d'orgueil.

Et il venait de tout gâcher avec la seule personne qui comptait.

Il aurait dû le voir. Il avait remarqué ses regards fuyants et ses rires gênés. Mais il s'était acharné, s'était laissé aveugler par son amour-propre ; il s'était persuadé que ça ne voulait rien dire, et que Namjoon allait finir par craquer, comme tout le monde.

Il lui avait même montré ce qu'il ne montrait à personne. Il lui avait avoué des inquiétudes que seule sa psy et lui connaissaient. Il avait stupidement pensé que Namjoon l'accepterait comme ça. Qu'il n'était pas comme les autres, qu'il pourrait le comprendre, lui. 


Seokjin s'arrêta au milieu d'une ruelle à peine éclairée, pris d'un sanglot. Il se repassait ce moment en boucle, celui où Namjoon l'avait repoussé, le dégoût qu'il avait lu dans son regard ; et peu importe combien il essayait de repenser à son sourire charmeur, il ne se souvenait que de sa froideur, et la manière dont son visage s'était complètement fermé.

Qu'est-ce qu'il aurait pensé, si Seokjin avait eu le cran de lui montrer la page suivante ? Celle où il avait esquissé son visage, tenté de retranscrire sa beauté singulière dans un croquis ?

Ça n'aurait sûrement rien changé. Et puis, ça importait peu, de toutes façons, maintenant. Namjoon le détestait. Pouvait-il vraiment lui en vouloir ?

Y avait-il quoi que ce soit chez Seokjin qui n'était pas détestable ?

Ce besoin d'ingérer ces putains de substances pour se sentir bien. Cette recherche constante d'affection, d'attention, cette envie inavouée d'être vu, touché, usé et abusé. Cette incapacité à comprendre ou écouter les autres.

Cette manie de commencer à construire des choses, de commencer à y croire, puis de tout ruiner.


Seokjin frissonna violemment. Le manteau qu'il avait enfilé à la hâte peinait à le protéger du vif froid de décembre. L'air nocturne lui mordait chaque centimètre de peau nue, et transformait chacune de ses larmes en une perle glacée. Il les essuya d'un revers maladroit de sa manche, et avant que d'autres ne viennent les remplacer, il batailla contre ses doigts transis pour extirper son portable de sa poche.

Les notifications se multipliaient. Aucune n'était importante à ses yeux. Aucune ne venait de lui, mais à la place, de ces potes qu'il ne supportait plus. Parce qu'ils se plaisaient à présumer qui il était, et de quoi il avait besoin, toujours. Parce que contrairement à lui, ils n'avaient jamais tenté d'aller plus loin que ce qu'ils voyaient et entendaient. Et maintenant, ils se sentaient obligés de s'inquiéter pour lui. Ou de faire semblant.

Ils lui demandaient de revenir ; et lui n'avait aucune envie de les voir. Sinon, pourquoi serait-il sorti aussi précipitamment ?

Mais il n'avait pas envie d'être seul non plus. Ça aussi, c'était un problème. Vouloir toujours plus, et mieux, que ce qu'il avait déjà.

Seokjin essuya avec difficulté encore plus de larmes, qui l'empêchaient de voir son écran avec clarté. Il cliqua enfin sur une notification qu'il venait de recevoir, davantage par contrainte que par bonne volonté.

Reflets parfaits • namjinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant