Point de vue de Rafaela
***
Les pieds calés sur mon volant et le siège de ma voiture poussé en arrière au maximum, je suis affalée là, dans mon pick-up, sur le parking de l'atelier. Je regarde les quelques flocons de neige se poser sur le pare-brise tout en venant croquer dans mon sandwich à la confiture et au beurre de cacahuète. Je ne suis pas d'humeur aujourd'hui, surtout pas aujourd'hui. Puis, j'ai mal dormi et malgré les tonnes de bois que j'ai coupé en deux, hier soir, je n'arrive pas à oublier les mots d'Ana.
« Me supporter toute sa vie. » Si seulement on avait eu le choix, si seulement elle ne m'avait pas laissé...
Je soupire avant de croquer une nouvelle fois dans ce pain de mie toasté. Puis, je repense à mon discours, je suis certaine que mes mots ne l'ont même pas touchée, elle semble bien trop fermée pour comprendre qu'elle n'a rien à faire ici, pour comprendre que l'on ne veut pas changer, que notre vie nous convient bien. Je frissonne quand je repense à ce moment, dans sa chambre. Brr, qui peut réagir comme ça ? Cette femme est vraiment tarée et dans le fond je ne sais pas si ça me fait peur ou si ça me plaît. Je n'ai jamais connu quelqu'un d'aussi... impulsif, d'aussi fier, d'aussi aguicheur. Mh, et dire que je vais devoir la côtoyer un mois entier, travailler et vivre avec elle. Je sens que j'en ai pas fini avec ces histoires.
Je termine mon sandwich, jette le morceau de film plastique au fond de mon sac et sors de ma voiture. Il est 8h55, je suis à l'heure, je suis douchée, j'ai déjeuné. Malgré tout, cette journée commence bien.
Allez Ramos, motivation !
Une cinquantaine de mètres plus loin et la clochette retentit à l'ouverture de la porte. Je passe par l'accueil et comme tous les matins, je m'arrête là.
— Salut Rafaela, me lance Hannah, un sourire aux lèvres.
— Salut beauté. Maddox toujours en poste ?
— Toujours, toi et moi, c'est pas pour aujourd'hui, me répond-elle en me tirant la langue.
— Range-moi ça ou toi et moi, c'est pour maintenant, j'ose, lui faisant un clin d'œil tout en continuant mon chemin.
Je la vois rougir légèrement avant de m'enfoncer dans le couloir menant à mon bureau. Je regarde ma montre, 9h07, et je sors rapidement ma clef, comme tous les matins, quand je sens une main sur mon épaule, une bien large. Surprise, je me retourne et fais alors face à un homme, que dis-je, à une armoire de deux mètres, barbu, le regard perçant mais au sourire charmeur.
— Mademoiselle Ramos ? dit-il.
— Monsieur ?
— Woods, Nicholas Woods.
Instinctivement je pense à James Bond dans sa façon de se présenter, mais son nom me dit qu'il est bien trop influent ici, pour que je lui en fasse la remarque.
— Enchantée, je lui réponds simplement en lui tendant la main.
Il l'attrape sans souci, toujours avec un regard tendre, presque paternel qui met de suite en confiance.
— Moi de même. Pourriez-vous me suivre ? J'aimerais m'entretenir avec vous d'un sujet important.
— Puis-je dire non à un Woods ? je lui demande alors, mon sourire taquin retrouvé.
— Mon petit doigt me dit que cela dépend du Woods auquel vous faites face. Allez, Suivez-moi.
Je ne comprends pas vraiment sa phrase même si rapidement l'image d'Ana me vient en tête. Mais je ne vois pas comment il pourrait être au courant de ça. Quoi que, je lui ai quand même tenu tête hier. Bref, je le suis donc jusqu'à la salle de réunion. J'entre et en face se trouve le loup dont j'étais justement en train de parler. Et comme toujours elle semble énervée. Je ne suis d'ailleurs même pas sûre que cette femme sache sourire. Enfin un vrai sourire, pas celui qu'elle fait lorsqu'elle essaye de mettre mal à l'aise son entourage.
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Coup de foudre à Bigfork
RomantizmAna Woods, directrice marketing de Woods & Toys, compagnie dirigée par son oncle, voit sa vie basculer le jour où celui-ci lui pose un ultimatum : perdre sa place dans l'entreprise familiale où accepter une mutation de quelques semaines à Bigfork, u...