Chapitre 2 - Solitude

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Deuxième jour de cours.

Le premier s'était plutôt bien passé. Durant la pause de midi j'étais rentrée chez moi pour manger, soulagée d'être enfin seule. J'avais évité les problèmes, découragé les personnes qui étaient venues me parler avec des réponses froides et n'avais pas attiré l'attention. Voilà ce que devait devenir mon quotidien : être la fille qu'on oubliait dans le fond de la classe.

Je commençais une heure plus tard que la normale les mardis matins, gagnant vingt minutes de sommeil en plus. Oncle Henri était déjà parti au restaurant depuis un moment, c'était donc à pied que je devais me rendre au lycée. Les mains cachées dans les poches de ma veste et les écouteurs enfoncés dans les oreilles, je marchais d'un pas tranquille dans les rues que je découvrais peu à peu. Le son de la musique poussé à fond m'aidait à me détendre, je fredonnais presque les paroles des chansons de The Neighbourhood.

Je finis par arriver devant les grilles du lycée. En vérifiant l'heure sur mon téléphone, je me rendis compte que j'avais mal calculé le temps que je prenais à m'y rendre à pied. Je voulais arriver pile à l'heure pour la rentrée des cours, et voilà qu'il me restait encore à attendre dix bonnes minutes avant mon cours de littérature. M'adossant contre le muret, mon regard fut soudainement attiré par un point de couleur sur ma droite. Tournant légèrement la tête, je détaillai le type qui fumait une cigarette contre une magnifique Triumph, à quelques mètres de moi.

Ses cheveux étaient teints en bleu pas trop clair, une longue mèche lui cachait une partie du visage. Je pouvais voir d'où j'étais qu'il portait des écarteurs noirs à chaque lobe, ses vêtements sombres lui donnaient l'allure d'un rockeur renfermé. Sa tête pivota alors dans ma direction, comme s'il avait senti que je l'observais. Je fis aussitôt mine de m'intéresser à mon téléphone au moment où son regard tomba sur moi. Heureusement, l'arrivée d'une vieille voiture vert foncé détourna le malaise qui avait germé dans mon ventre. Un gars plutôt grand sortit du véhicule. Ses cheveux roux en bataille lui donnaient un charme, sa chemise retroussée sur ses avant-bras, ouverte sur un débardeur blanc, nous laissait imaginer sa musculature. Je le regardai du coin de l'œil sourire au mec aux cheveux bleus et commencer à lui parler tandis qu'il s'adossait au capot de sa voiture. La musique dans mes écouteurs me permettait de ne pas entendre leur conversation. Je vérifiai l'heure, encore huit minutes.

Absorbée à choisir une autre musique, je sursautai légèrement lorsqu'une personne passa devant moi. Je reconnus la fille brune aux cheveux courts de la veille, Vic. Elle se dirigeait d'un pas rapide vers les deux garçons. En la voyant, le rouquin contourna sa voiture pour que celle-ci fasse un barrage entre eux. Vic semblait énervée et cherchait à se rapprocher du roux, mais ce dernier, qui paraissait joueur, tourna autour de sa bagnole pour l'en empêcher. Son grand sourire montrait que la situation l'amusait beaucoup. Le gars contre sa moto les observait sans rien exprimer, et réagit à peine lorsqu'Alisha arriva à côté de lui. En face d'eux, Vic finit par lever son majeur au rouquin avant de tourner les talons, un air plus qu'agacé sur le visage alors qu'il rigolait dans son dos. Je vis alors le regard noisette d'Alisha tomber sur moi. En me reconnaissant, un sourire étira ses lèvres tandis que la panique m'envahissait. Elle se mit à marcher dans ma direction avec l'intention de venir me voir.

Non pas ça !

Faisant comme si je ne l'avais pas vu, j'entrai dans le lycée. J'avais fini par repérer mon casier dans le couloir du bâtiment B, et m'y dirigeai donc, même si je n'en avais pas besoin. La sonnerie stridente se fraya un passage à travers ma musique, me faisant pousser un soupir de soulagement. Il ne me restait plus qu'à aller dans le fond de la classe en priant pour qu'Alisha me laisse tranquille.

***

La semaine passa lentement. On n'essaya plus de venir me parler, du moins une bonne partie avait abandonné. J'avais été classée dans la case « fille asociale » par ma classe. J'avais réussi à m'isoler, mais ce n'était que le début et la solitude commençait à pointer le bout de son nez. Avant que tout ça n'arrive, je détestais être seule, et c'était bien malgré moi que j'étais devenue une solitaire.

Ailes MortellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant