Chapitre 3 - Dérapages incontrôlés

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Le week-end arriva enfin. Deux petits jours où j'allais pouvoir me détendre un peu et ne pas être sur mes gardes à tout instant. Oncle Henri ne travaillait pas durant la journée, on avait donc décidé de « faire nos flemmards » comme il le disait, et de passer l'après-midi du samedi à regarder des films en mangeant du popcorn. Cette activité avait été le cinéma de mon adolescence, j'avais toujours préféré être dans mon canapé avec mon oncle plutôt que de sortir. Et des années plus tard, je ne voulais pas changer cette habitude.

Le soir arriva lentement. Vers dix-huit heures, Henri dut partir au restaurant qu'il devait tenir jusqu'à minuit. Ce qui me laissait le champ libre pour six bonnes heures, car même si je détestais lui mentir, je devais sortir. Il fallait que je trouve un endroit dans cette ville où je pourrais me cacher durant la pleine lune. Un endroit où je pourrais me transformer sans être à la vue de tous. Je savais que rien ne pouvait retenir la Chose de sortir dans la nuit. La dernière solution que j'avais trouvée m'avait apporté trop de problèmes.

Rien qu'en y repensant, j'eus des frissons...

Après m'être assurée que j'étais bien seule, j'enfilai mon pull noir et me fondis dans la nuit. Sans trop savoir où j'allais, je m'éloignai peu à peu vers la périphérie de la ville. J'avais toujours aimé l'ambiance que créaient la nuit et son obscurité, comme si on basculait vers une autre dimension. Tout était calme et l'air était plus frais. Je me sentais... bien. Sans mes pouvoirs, j'aurais pu avoir peur de faire une mauvaise rencontre, mais maintenant je pouvais simplement m'enfuir en courant. Personne ne pouvait me rattraper.

Après une bonne heure de marche, les rues se firent de moins en moins éclairées et les bâtiments de plus en plus vieux. J'enfonçai mes mains dans mes poches, attentive au moindre bruit. Une ruelle sombre attira mon attention, on en voyait à peine le bout à cause de la pénombre. Je marchai dans cette direction pour vérifier le fond et m'assurer qu'il n'y avait aucune fenêtre au-dessus. Je découvris alors une impasse fermée par un autre bâtiment en béton. C'était un bon endroit, il ne devait pas y avoir beaucoup de monde à venir ici.

Je comptais ressortir pour visiter encore un peu cette partie sombre de la ville lorsque plusieurs bruits de moteur me firent sursauter. Trois silhouettes de moto se garèrent devant l'entrée de la ruelle, puis une femme blonde surgit, courant dans ma direction. Prise de panique, je reculai et me fondis dans l'ombre. La femme ne me remarqua pas. J'aperçus à peine son visage devenir livide lorsqu'elle vit qu'il n'y avait pas d'issue, avant qu'elle ne me tourne le dos.

— Je vous en prie, laissez-moi ! cria-t-elle.

Sa voix était paniquée, mon cœur loupa un battement lorsque j'entendis des ricanements.

— C'est toi qui as voulu venir, ma belle.

Les trois hommes, qui semblaient costauds, descendirent de leurs bécanes et s'avancèrent vers la femme. L'ombre m'avait camouflée jusque-là, mais par précaution je me cachai derrière une benne à ordure. Me penchant légèrement en avant, j'observai la scène qui me glaçait d'horreur.

Les types encerclèrent peu à peu la femme qui avait à présent le dos collé au mur. De là où j'étais, je pouvais entendre son cœur cogner fort dans sa poitrine, et ses yeux grands ouverts exprimaient toute la peur qu'elle ressentait. Les hommes puaient l'alcool à plein nez.

— Ne me touchez pas !

Le cri de la femme me serra le ventre. Je ne pouvais pas l'aider... je ne devais pas l'aider. J'allais en perdre le contrôle, je le savais.

Respire Merit !

Mais la femme hurla à nouveau, la colère grimpa lentement. Puis je la sentis grandir en moi, se rapprochant. Ma mâchoire était tellement contractée que mes dents crissaient, mes ongles s'enfoncèrent dans mes paumes. Le sang perla de quelques gouttes avant que les griffures ne se referment directement, ne laissant aucune trace sur ma peau. Mon souffle s'accéléra en même temps qu'une remarque déplacée de la part d'un des hommes résonna dans la ruelle. À l'intérieur, elle s'était réveillée.

Ailes MortellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant