Chapitre 15

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Dravenn était toujours un peu nerveux. Il ne parlait pas mais je le sentais ruminer les événements de cette journée aussi nettement que si son esprit avait été connecté au capteur de neurotransmission de son appartement.

Je m'assis calmement dans son canapé, juste sous la nébuleuse. Dravenn sortit des verres et nous servit un alcool de cactus. Il avait dosé fort, sans doute autant qu'il croyait en avoir besoin pour se sentir mieux. Après m'avoir apporté mon verre, il resta debout et s'appuya au comptoir de sa cuisine. Il était en face de moi, mais la totalité de son salon nous séparait. Il aurait pu se trouver de l'autre côté de la galaxie.

— De quoi tu as besoin ? demandai-je après un silence tendu.

Il était sans doute de mon devoir d'éraste d'aller au devant de ses besoin, de le prendre en main, de le guider pour l'aider à se détendre, après tout, on attendait des érastes qu'ils gèrent tous les aspects de la vie de leur éromène.

Dravenn à cet instant, était à des années lumière d'avoir envie de se comporter comme un fragile éromène. Et je n'avais définitivement pas besoin d'être dans son esprit pour le savoir.

— Tu as parlé d'une solution, soupira-t-il.

— Tu as envie de l'entendre maintenant ?

— J'ai envie de savoir maintenant si c'est réalisable ou si je vais perdre mon travail.

Je sortis le petit module d'analyse de ma poche, ainsi que la sonde emballée sous vide et les posai sur la table auto-suspendue de son salon.

— On peut faire ça ici, expliquai-je. Tu peux même le faire tout seul, il suffira de transmettre les résultats d'analyse à Xalthar.

Ses épaules s'affaissèrent comme si la tension s'évacuait d'un coup de son corps.

— Et c'est tout ? demanda-t-il. Tout le reste...

— Tout le reste est superflu, Xalthar n'en a pas besoin. La loi exige seulement ces prélèvements et un hologramme de ta marque. Il suffira que je transmette mon autorisation et plus personne n'aura de compte à te demander.

Il s'approcha lentement et regarda le petit module comme s'il pouvait exploser.

— Il y a une autre solution, repris-je après un moment. Il suffit d'attendre que ma marque s'estompe. Dans un mois, elle se sera effacée et mes hormones auront disparu de ton sang. Les agents toxiques ont été neutralisés, une simple prise de sang t'en assurera, et tu ne seras plus mon éromène. Tu seras de nouveau libre. Cette enquête t'a beaucoup coûté, je comprendrais que tu veuilles faire une pause, tu pourrais demander des congés à Qeithar.

Le silence se prolongea entre nous. C'était étrange. Je savais que ce serait la meilleure chose à faire pour lui, mais je détestais l'idée qu'il ne soit plus lié à moi. Je la détestais parce que ça ne m'avait pas suffi. Le faire mien une seule fois était trop peu. Je le voulais encore, je voulais tout le reste. J'avais envie de lui physiquement, mais j'avais aussi envie de continuer à passer mes journées avec lui, comme ça, pour le travail, et mes soirées aussi, pour le plaisir, j'avais envie d'être encore la personne devant qui il baissait les armes, d'être le seul homme dans sa vie, d'assouvir tous ses désirs, de le soutenir et le défendre, d'éprouver encore le sentiment bouleversant d'être sous sa protection.

Je voulais aller jusqu'au bout de ce que j'éprouvais pour lui parce que j'avais la troublante intuition que tout cela n'avait pas de fin, que Dravenn n'était pas une passade, qu'il n'était pas un fantasme dont j'allais me rassasier.

La perspective de le perdre était intolérable. Mais celle de l'enchaîner était pire encore.

— Tour à l'heure..., murmura-t-il. Il y a eu un moment où j'ai réalisé ce que j'avais fait. Je me suis rendu compte du pouvoir que je t'avais donné sur moi. Il y a eu un instant où j'ai cru que tu allais me briser, parce que c'était ce qu'on attendait de toi.

Les Confins - 1. DysisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant