Examens

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Je ne m'en remettais pas. Je n'arrivais pas à comprendre. Pourquoi ? Pourquoi j'avais voulu faire ça ?
J'étais en colère, d'accord. Mais merde ! On pousse pas quelqu'un sous une voiture parce qu'il nous tape sur les nerfs ! Et puis pourquoi il m'énervait c'pauvre gars ? Il avait rien fait. On est rivaux mais j'en ai déjà eu des tonnes de rivaux, et des qui m'aimaient pas en plus, et c'est pas pour ça que je les auraient tués !
- Qu'est-ce que je suis en train de faire ?

Dans la nuit, j'avais rêvé de la scène. En boucle. Mais dans ce rêve, ou plutôt ce cauchemar, j'allais au bout. Je le poussais. Et la voiture le percutait. Et il mourait. Et à chaque fois, je me réveillais en sueur.
Qu'est-ce qu'il ce serait passé si je n'avais pas repris mes esprit à temps ? Je serais devenu un meurtrier. Un meurtrier bordel ! C'est ça que tu veux faire de ta vie, Tobio ? Passer le reste de tes jours en prison ?
Je regardais mes mains. Ces mains dont j'avais pris tellement soin pendant des années pour parvenir à mon but et que j'avais failli couvrir de sang. Je me dégoûtais. Je me haïssais. C'était officiel, il manquait définitivement une case à mon cerveau.
Non... C'est pas en prison que je vais finir. C'est dans un putain d'hôpital psychiatrique. Parce que j'ai des envies de meurtre. Et parce qu'en plus, je deviens schizophrène. Depuis ces putains de crise, je tape la discute avec mon cerveau. Comme si c'était pas moi qui le contrôlais. C'est ça. Je perds le contrôle. Je suis fou.
Heureusement que c'était le weekend, parce que, honnêtement, j'aurais pas pu tenir deux heures d'affilée le cul vissé sur une chaise. Je tournais en rond, enfermé dans ma chambre, dans une semi-obscurité, comme un lion en cage. Je tournais, et tournais, et tournais encore, comme si ça pouvait m'aider à trouver une quelconque solution. Sous mon crâne, ça travaillait tellement que je perdais toute notion du temps. Je parlais plus. Je murmurais sans cesse. Des trucs incompréhensibles. Je voyais pas ma mère s'inquiéter. J'entendais pas mon père me dire de répondre quand on me pose une question. J'étais ailleurs. J'étais dans un autre monde. À des centaines de milliers, à des millions de kilomètres de la planète Terre. J'en oubliais de manger. Et c'était même pas comme si j'ignorais ma faim. Je perdais l'appétit. Je ne faisais qu'une chose : réfléchir et me traiter de psychopathe. Mais plus je réfléchissais, plus j'avais l'impression de m'éloigner de la vérité et de la solution. Un seul truc me paraissait quasiment certain, c'était que les crises et mes envies de m... disons plutôt mes pulsions étaient liées. Et que les unes comme les autres étaient liées en partie à Hinata et Haru, donc au volley par extension.
Donc le lien c'est le volley. Bon... Mais ça m'avance pas à grand-chose de le savoir. Le volley, ça fait plus de dix ans que j'en fait. Et j'adore ça. Je comprends pas pourquoi ça changerait que maintenant. Je vous pas ce qui a changé...
Je commençais à tourner en rond, mentalement cette fois-ci.

Puis les examens de fin de trimestre sont arrivés. J'aurais dû réviser pendant le weekend mais j'avais clairement pas la tête à ça. Et même en ce lundi d'épreuves, je pensais plus à mes problèmes personnels qu'à des fonctions mathématiques ou à la poésie japonaise classique.
Même arrivé devant ma copie, j'arrivais pas à me concentrer, malgré la menace de ne pas aller au camp d'été si j'avais des résultats insuffisants. J'avais perdu la motivation. Pire, j'avais plus envie d'y aller du tout.
Et si je faisais des crises ? Et si j'essayais encore de m'en prendre à Haru ? Ou quelqu'un d'autre ?
Dans mon esprit, j'étais passé dans la catégorie "danger public". Je ne voulais plus adresser la parole à personne, de peur de faire une autre connerie. Une chance qu'on est pas entraînement pendant cette semaine.
Qu'est-ce que... je viens de dire ?
Oui. Oui, j'avais espéré ne pas avoir entraînement. Oui, je me réjouissais de ne pas jouer au volley, ma seule raison d'être.
Bon sang... Mais que... Qu'est-ce qu'il m'arrive ?
*DRIIIIIIIIIIIIIING*
La sonnerie retentit, annonçant la fin de l'épreuve et me sortant de mes pensées. Les quatre dernières questions étaient restées vierges. Je n'avais rien répondu. Mais je fus l'un des premiers à sortir de la salle et rendre ma copie pour me précipiter aux toilettes.
J'ouvris le robinet à fond et m'aspergeai la tête. Le froid me remit les idées en place.
Jamais ces crises et tous ces problèmes ne doivent prendre le dessus ! Le volley passe avant tout ! Pas question de tout gâcher, et encore moins de se relâcher ! Je dois faire ce camp ! Je dois progresser ! Je dois...
Le bruit d'une chasse d'eau gronda derrière moi, et la porte des cabinets s'ouvrit. Hinata en sortit, pâle, et plié en deux, se tenant le ventre. En l'apercevant il esquissa un sourire douloureux mais sincère. J'essayais de faire de même, sans succès. J'ai alors tenté de prendre un air moqueur pour dissimuler le fait que sa présence me mettait très mal à l'aise en lui disant :
- Toujours aussi stressé ?
J'avais l'habitude de le voir comme ça. Dès qu'il se mettait à angoisser, pour un match ou autre, il devait impérativement se rendre au toilettes. Une fois, il avait même pas réussi à se retenir et avait gerbé sur Tanaka. Ça m'avait fait rire. Mais pas aujourd'hui. Malgré le fait que je n'avais pas envie de lui parler, je ne pouvais m'empêcher d'avoir de la peine.
On dirait... moi... En ce moment...
- Ouais... me répondit-il dans un râle. Depuis que Ukai m'a menacé de pas m'emmener au camp comme l'année dernière, j'ai la trouille... Et les maths, c'était la cata... J'espère vraiment avoir la moyenne...
Il eut un haut-le-cœur et faillit se retourner pour vomir. Il réussit à se contenir.
- T'as réussi toi ?
- Je... Je sais pas...
A vrai dire, j'étais tellement ailleurs que je n'avais qu'un vague souvenir du sujet.
Soudain, la sonnerie retentit de nouveau, annonçant la seconde épreuve.
- Bon... souffla-t-il. Faut qu'on y retourne...
- Ouais...
Je commençais à sortir pour éviter de devoir rester plus longtemps quand il m'appela :
- Eh Kageyama.
- Hm ? fis-je sans me retourner.
- On va tout déchirer et aller au camp d'été ensemble. OK ?
Si je n'avais pas été de dos, je me serais enfui en courant pour ne pas qu'il voie mon visage. Le trouble, l'excitation et une part de honte s'emparèrent de mes traits, pour finalement laisser la place à un sourire arrogant :
- Et comment! T'as pas intérêt à te planter, Hinata-boke!
- Pfeuh! Parle pour toi, Bakageyama!
Je me retournais finalement pour lui lacer un regard de défi. Il me tirait la langue.
Mais quel gamin !


Burnt By The SunOù les histoires vivent. Découvrez maintenant