Passes

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Vide. Complètement vide. C'est comme ça que je me sentais, après cette nuit cauchemardesque. Mes angoisses étaient revenues. La voix dans ma tête recommençait à me traiter de meurtrier et de psychopathe. Et le seul remède, c'était les antidépresseurs. Il n'y avait qu'en les prenant que j'arrivais à avoir la paix. La voix ne se taisait pas vraiment mais elle ne me faisait plus rien. Ni chaud ni foid. Je ne culpabilisais plus, mais je n'étais pas heureux pour autant. Je n'étais pas triste. Pas plus que je n'étais en colère ou excité. Je ne ressentais plus rien. J'avais l'impression que ma vie n'avait plus aucun sens. Je ne servais à rien. J'étais remplaçable. Personne n'avait besoin de moi. J'étais de nouveau seul.

La semaine des examens s'était terminée dans cette ambiance morne et fade, sans que quoi que ce soit ne se passe. Je ne savais pas si j'avais réussi les examens ou non. A vrai dire, je ne me souvenais pas de grand chose de ces derniers jours. J'avais passé la majeure partie du temps à fixer mes pieds, ou le plafond. Ce qu'il se passait dehors n'avait plus aucun intérêt à mes yeux. Je n'avais pas revu Hinata. Enfin, non. Je l'avais revu mais je l'évitais. Je faisais en sorte que lui ne me voit pas. Parce qu'à chaque fois que j'essayais de l'approcher, la voix reprenait de plus belle dans ma tête. Et je revoyais ce cauchemar. Je le revoyais me redire ces mots. Ces mots si durs, si crus, si abominables, si incroyablement blessant, que je n'osais le regarder en face.
Et s'il pensait vraiment ça de moi ? S'il me haïssait réellement ?
Je préférais encore rester dans l'incertitude plutôt que de devoir affronter l'insurmontable vérité.

Le stage d'été arriva vite. J'avais dû avoir de bons résultats finalement, car je pus m'y rendre sans problème. Comme Hinata, d'ailleurs. Dans ma valise, j'avais pris soin de prendre ma boîte d'antidépresseurs, devenue indispensable. Je ne pouvais plus vivre sans. Dès qu'ils arrêtaient de faire effet, je commençais à faire des crises d'angoisse et de paranoïa et je ne voulais pas qu'elles arrivent durant le camp. En plus, ils empêchaient les autres crises, ce qui m'arrangeait bien.
A six heures donc, en ce lundi de juillet, je me dirigeai sur le parking du lycée pour monter dans le bus avec les autres. Ukai et Takeda, notre prof responsable, nous attendaient. Ils nous ont aidés à mettre les bagages dans la soute. Pendant que je rangeais le mien, Takeda me regardait avec un drôle d'air.
- Tout va bien Kageyama ? Tu n'as pas l'air en forme...
- C'est rien, monsieur. Vous inquiétez pas. J'ai juste mal dormi cette nuit. Je me rattraperais dans le car.
Il a acquiescé malgré son air dubitatif et m'a regardé monter dans le bus. Il toucha un mot à Ukai qui me regardait lui aussi avec un air sceptique. Je détournai le regard de la fenêtre.
Qu'est-ce qu'ils ont à me fixer comme ça... ? J'ai vraiment une aussi sale gueule ?
Je m'asseyai au fond, près de la fenêtre. J'enfonçai mes écouteurs dans mes oreilles et fermai les yeux. J'avais pas dormi de la nuit. Je ne comptais pas vraiment dormir durant le trajet mais je ferais au moins semblant, primo pour ne pas inquiéter les profs et secundo, pour avoir la paix. J'avais clairement pas le moral pour tenir une conversation de plusieurs heures. 
En espérant que personne vienne se mette à côté...
Bien entendu, à peine après l'avoir pensé, je sentis suelqu'un s'installer sur le siège voisin et se pencher sur moi.
Pitié... Pas...
- Hey, Kageyama ! Tu dors déjà ?
...Hinata...
Je commence à m'habituer à avoir un karma bien pourri mais avoir de la malchance comme ça c'est juste pas permis!
- Ouais, alors laisse-moi tranquille.
Déjà, je sentais mon cœur s'affoler. Je gardais les paupières fermement closes. Je ne pouvais pas le regarder. Mon cœur battait si fort que j'avais même peur qu'il l'entende. J'avais dû faire de si gros efforts pour que ma voix ne tremble pas que je savais que je ne pourrais pas tenir plus longtemps.
S'il ne s'éloigne pas tout de suite, je vais finir par me tordre de douleur, médocs ou pas !
- Pffff... T'es pas drôle... Bakageyama...
Il était si près de moi que j'avais pu sentir son souffle chatouiller mes oreilles.
Et l'entendre murmurer ce surnom... Pitié ! C'est un veritable supplice ! Faites qu'il s'en aille...
- Hé, Hinata ! Viens voir ! Ils ont diffusé le dernier match de l'équipe nationale sur YouTube. On le regarde ensemble ?
- Sérieux ? Attends, j'arrive!
Sans l'intervention de Nishinoya, je crois que j'aurais fait un AVC. Hinata s'éloigna et me laissa en paix.
C'est pas trop tôt...
J'allai me renfermer dans ma bulle, lorsqu'une voix me surprit.
- Zut ! J'aurais bien aimé me mettre à côté de Hinata-senpai...
Haru. Évidemment, il était là lui aussi.
- Tu n'as qu'à te mettre à côté de moi, Haru, lui dit Tatsumi, un autre élève de seconde.
J'entrouvris les yeux et le vis faire la moue. Bien malgré moi, je ne pus réprimer le sourire moqueur qui apparaissait sur mon visage.

Burnt By The SunOù les histoires vivent. Découvrez maintenant