Je contemplais mon reflet dans le miroir de ma salle de bain, caressant du doigt la légère marque rouge que la bouche de Josh avait laissée sur mon cou. Il faudrait que je la cache avec un foulard avant de partir rejoindre mon père. Il m'avait demandé de le retrouver chez lui cet après-midi-là. Cette perspective ne m'enchantait guère, ne sachant pas à quoi m'attendre. On ne s'était pas parlé depuis qu'il m'avait mise dans un taxi au gala.
Un soupir m'échappa alors que je songeais aux paroles de Josh : « je ne veux embrasser personne d'autre ». Mon cœur avait gonflé dans ma poitrine. L'autre soir, le voir si proche de cette fille m'avait presque donné la nausée. Évidemment, il faisait ça pour brouiller les pistes, mais je m'étais demandé jusqu'où il irait, inquiète. Pourtant, c'était bien avec moi qu'il avait choisi de finir la soirée. J'avais été si heureuse de le trouver à ma porte...
Josh me chamboulait. Je m'abandonnais totalement à lui et c'était effrayant. Il était partout : au bar avec les copains, au travail, aux événements mondains et dans mon lit. Cette omniprésence me plaisait autant que je la redoutais. Je n'avais jamais laissé personne s'insinuer autant dans les différents aspects de ma vie.
Lorsque j'arrivais chez mon père, il m'accueillit d'un baiser sur la joue avant de me demander de le suivre dans son bureau. Il me proposa quelque chose à boire et j'acceptai une tasse de thé.
— Je suis désolée d'avoir trop bu au gala, papa, déclarai-je.
Il valait mieux se débarrasser au plus vite du sujet qui fâche.
— Ce n'est rien, balaya-t-il d'un revers de main. Je n'aurais pas dû t'encourager à boire.
Après un silence, il ajouta :
— Tu ne m'as demandé le numéro d'aucun des jeunes hommes que je t'ai présentés.
Ce n'était donc pas mon ivresse, le problème, compris-je.
— Ils ne m'ont pas intéressé papa, soupirai-je en levant les yeux au ciel.
— Tu ne leur as laissé aucune chance, grogna-t-il. Tu avais promis de faire un effort.
La colère commençait déjà à poindre en moi.
— J'ai fait un effort, grinçai-je. Un énorme effort. Je t'ai suivi partout comme un petit chien, j'ai fait tellement de faux sourires que j'en avais mal aux joues, j'ai supporté la condescendance et les insultes sans broncher. J'ai fait la conversation à des inconnus qui étaient là pour me jauger plus que pour me séduire et je me suis tenue loin de mon meilleur ami. J'ai respecté mes engagements.
Il roula des yeux, agacé.
— Elena, je ne veux pas me disputer avec toi, dit-il d'un ton ferme. Je reconnais que tu as fait des efforts. Tu auras l'occasion de les revoir.
Je ne relevai pas. Il se laissa aller dans son grand fauteuil en cuir et demanda :
— Est-ce qu'il se passe quelque chose entre ce garçon et toi ?
Nous y étions. C'était pour ça qu'il m'avait fait venir. Il voulait me regarder dans les yeux quand je répondrai à cette question.
— Tu donnes du crédit à ce qu'il y a d'écrit dans la rubrique mondaine d'AroundNY ? ironisai-je.
— J'ai des yeux Elena, rétorqua-t-il. Je vois bien que vous êtes proches. Je voudrais savoir à quel point.
— Nous sommes amis depuis plusieurs années, papa, répliquai-je. J'ai pleuré maman dans les bras de Josh. Il a pleuré ses parents dans les miens. Il s'est assuré que j'étais bien rentrée chez moi après le gala, et t'a même envoyé un message pour te rassurer alors que tu ne fais que l'insulter. Il est ce genre d'ami.
— D'accord, soupira-t-il. Vous allez probablement être amenés à vous recroiser lors de certaines manifestations. J'aimerais donc que tu tiennes ce discours lorsqu'on te parlera de Joshua Banner.
— Pourquoi tiendrais-je un autre discours ? C'est la vérité.
— J'aurais préféré que tu prétendes le connaître à peine, mais comme tu sembles incapable de l'ignorer ce ne serait pas crédible. De plus, après l'article de Donna, vous aurez à répondre aux questions de certains curieux. Assure-toi qu'il dise la même chose de son côté.
— Il ne dira que la vérité. Il est honnête.
— Andrew, son mentor, ne l'est pas.
— Vraiment ?
Il me fixa durement. Je savais ce qu'Andrew disait de mon père. Selon lui, John Ferguson était un sénateur corrompu. Je ne saurais dire si c'était vrai ou non. Il s'était construit dans un monde d'hommes d'affaires impitoyables attirés par l'argent et le pouvoir. Le peu de considération qu'il pouvait avoir pour les moins fortunés lui était inspirée par ma mère qui savait faire appel à sa compassion.
— À présent, j'aimerais te parler de Thanksgiving, lança-t-il. Mercredi soir, tu vas distribuer des repas aux sans-abris comme les années précédentes. Jeudi, nous dînerons ensemble ici tous les deux.
— D'accord, grommelai-je.
Une fois son ordre du jour bouclé, mon père sembla beaucoup plus léger. Il évoqua la décoration de son appartement, précisant qu'il souhaitait le rendre un peu plus chaleureux et comptait faire venir un architecte d'intérieur.
À la mort de ma mère, John avait pris ce logement plus petit et plus adapté à sa nouvelle vie de veuf. La décoration y était en effet sobre, voire inexistante. Mon père était très peu chez lui et lorsque c'était le cas, il passait le plus clair de son temps dans son bureau. Il lui arrivait même de s'y endormir d'après ses propres dires.
— Est-ce que tu veux qu'on dîne ensemble ? proposai-je, souhaitant faire durer cette discussion ordinaire.
— Non, je suis pris ce soir.
Ilvoyait une femme. Sinon, il se serait vanté de dîner avec je ne sais quelpolitique ou milliardaire à la noix. Je grimaçai discrètement avant de me leverpour partir.
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A la porte de ton cœur - Chroniques de nos Cœurs Tome 1
RomanceElena avait une vie bien remplie. Elle partageait son temps entre un travail prenant, une bande d'amis proches et un père exigeant. Tout cela ne laissait pas beaucoup de place à l'amour. Elle se contentait donc de quelques rencontres qui lui apporta...