Chapitre 21 - ELENA

248 23 2
                                    


Lorsque j'arrivai chez Claudette pour le brunch, Josh était déjà assis près d'une fenêtre à travers laquelle il semblait observer les passants sans les voir. Le sourire gêné qu'il m'adressa quand il m'aperçut fit bondir mon cœur.

Il y eut un moment de flottement durant lequel mon ami se gratta l'arrière de la tête. Comment engager une conversation embarrassante ?

La serveuse se présenta alors pour nous offrir une diversion parfaite. Cependant, à peine fut-elle repartie qu'un nouveau silence s'installa. Ses yeux allaient et venaient en tous sens. Il n'osait même pas me regarder. Je me raclai la gorge et pris la parole :

— On s'est embrassé.

Je me maudissais de rougir en prononçant ces mots.

Ses lèvres restèrent scellées, mais ses iris se fixèrent sur mon visage.

— Je ne sais pas exactement qui s'est passé, avouai-je. Ce que je sais, c'est que tu es un de mes meilleurs amis. Tu comptes énormément pour moi. Toi, et les autres vous êtes mes piliers, ma famille. Je n'ai pas envie que ça change.

Mon cœur se serrait à mesure que les mots sortaient de ma bouche. Il hocha la tête en signe d'assentiment.

— J'ai vraiment déconné, Elena, soupira-t-il. Je suis désolé. Je ressens la même chose que toi. J'aimerais pouvoir effacer ce qui s'est passé.

Alors que j'aurais dû éprouver un certain soulagement, je sentis au contraire mon estomac se tordre.

— Je ne veux pas qu'il y ait de malaise entre nous, repris-je. Tu es parti si vite l'autre soir, j'ai l'impression que tu m'évites.

— Pardonne-moi, dit-il. J'avais... Je ne savais pas quel comportement adopté. J'avais peur de te blesser.

Après une pause, il ajouta :

— Est-ce que tu serais d'accord pour faire comme si ce n'était jamais arrivé ?

— Et on ne dit rien à personne ?

— Si ce n'est jamais arrivé alors il n'y a rien à raconter, répliqua-t-il avec un léger sourire en coin. Cela dit, si tu as besoin d'en parler, je n'y vois pas d'inconvénient. Évite peut-être de le faire quand je suis là, je pense que ça me mettrait affreusement mal à l'aise.

— Pareil pour moi.

L'atmosphère se détendit soudain autour de nous, comme si une chape de plomb s'était perforée. Tout naturellement, la conversation glissa sur des sujets plus légers. Notre complicité remplaça la gêne qui ne semblait plus qu'un mauvais souvenir. Il me fit rire à plusieurs reprises. J'étais presque déçue lorsque nos amis arrivèrent.

Alors que Dan évoquait une énième conquête, j'observais Josh assis en face de moi. Il n'avait cessé de s'excuser tandis que je ne l'avais pas fait une seule fois. Parce que je n'étais pas désolée.

En rentrant chez moi, j'envoyai un message à Alex. Il était temps de me sortir Josh de la tête.

***


Le lundi suivant, je reçus un appel de Josh alors que je travaillais justement sur notre dossier :

— Elena, je peux te déranger cinq minutes ?

— Je t'écoute, dis-je avec un sourire qui trahissait mon ravissement d'entendre sa voix.

— Andrew vient de quitter mon bureau, et il aimerait dîner avec Victoria vendredi. Pour discuter du partenariat, tu vois ?

— Tu veux que j'organise l'entrevue ? suggérai-je.

— Non, Andrew va l'appeler, m'indiqua-t-il. Par contre, il faut que vous nous ayez transmis une proposition d'ici là.

— Je travaille dessus, assurai-je. Je devrais être en mesure de te l'envoyer demain.

— Parfait.

Mais le ton employé n'avait rien de « parfait ». Quelque chose clochait. Il se racla la gorge avant de poursuivre :

— Nous sommes conviés au dîner.

J'attendais la suite. Josh continua avec une voix où perçait l'embarras :

— Andrew aimerait que tu sois là. Victoria va certainement te demander de venir aussi. C'est ton dossier après tout...

— Josh qu'est-ce qu'il y a ? le coupai-je alors que le stress commençait à poindre.

— Tu connais Andrew, soupira-t-il. Je crois que c'est une sorte de piège bizarre. Enfin, oui et non.

Je fermai les yeux, lasse des manigances toujours plus ridicules d'Andrew et de mon père. Parce que ça avait forcément quelque chose à voir avec mon père.

— Il va choisir un resto bien branché pour s'assurer que tout le monde soit au courant qu'on travaille ensemble ? devinai-je.

— Il ne m'a rien dit, mais c'est bien le genre, oui. J'irais même jusqu'à penser qu'il va rencarder quelques journalistes à l'avance.

— Et je ne suis pas vraiment en position de refuser, conclus-je.

— Bien sûr que si.

— Si je renonce, Victoria sera furieuse.

— On s'en fout de ce Victoria, grogna-t-il. Si tu ne te sens pas de le faire, ne le fais pas, mais...

— Mais quoi ?

— Tu peux le faire. Tu vas leur tenir tête à tous : Victoria, Andrew, ton père. Tu en es capable.

Ma gorge se serra alors que mes yeux devenaient humides. Non, je n'en étais pas capable. Je l'avais prouvé à de multiples reprises.

— Merci, Josh, soufflai-je. Je vais devoir te laisser, maintenant.

— On se voit vendredi alors ? demanda-t-il avec inquiétude.

— Oui, à vendredi. Bye.

Bon, j'avais quatre jours pour me préparer à affronter Andrew en public la tête haute. Je m'occuperais de mon père plus tard. En attendant, je m'attelai à finaliser cette proposition.

A la porte de ton cœur - Chroniques de nos Cœurs Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant