Chapitre 4 • Chants et Mantras aux pouvoirs incertains °1e partie°

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Les jours passèrent avec une monotonie morne pour le noble ; il se levait, prenait soin de son corps, mangeait. Ensuite, il passait de longues heures dans son bureau à se lamenter, lire, griffonner sur des feuilles, pester, boire de ses alcools, encore protester contre son sort jusqu'à minuit sonne. Là, il se traine comme un zombie vers son lit pour s'y écrouler et recommencer le lendemain le même scénario.

Le temps était morose, la pluie battante frappait avec vigueur sur les carreaux de la fenêtre. Ce matin, de gros nuages gris avaient grignoté peu à peu le ciel automnal, maintenant, ils lâchèrent leur réserve sur Londres et ses environs. Cela n'arrangeait en rien l'humeur de Carthew.

Un courant d'air fit relever le nez enlunetté du baronnet qui se retrouva face à un Shade trempé.

— Salutation, cher acolyte, bougonna William.

Il n'eut comme réponse d'un grognement sous la cape sombre dégoulinante sur le parquet.

— Faites donc un peu attention aux affaires d'autrui, s'emporta le noble.

— Je n'ai pas traversé toute la ville pour m'entendre me faire réprimander, répliqua d'une voix grondante Shade.

Le nanti se retint de riposter, mais ses yeux exprimèrent toute sa colère. Il déglutit, avala difficilement sa tirade cinglante avant de reprendre d'une voix blanche :

— Que me vaut le motif de votre visite ?

— Je préfères cela... murmura le maraud avant de reprendre d'une voix plus forte, j'ai eu pitié de vous et de votre isolement.

Il s'approcha du bureau et Carthew dût serrer des dents face à la pluie sur le plancher. Si Alfred en était témoin, il aurait déjà fait un infarctus après avoir hurlé tout son mécontentement de ne point respecter le travail d'autrui, pauvre domestique.

— Voici un peu d'occupation.

Il déposa sur le secrétaire cinq livres qu'il sortit de sa besace, chacun muni d'une couverture de cuir de couleur unie allant du rouge vers le brun foncé passant par le beige. William prit le premier de la pile et lut son titre : La petite Encyclopédie du Caché.

— Où... où avez-vous déniché ces merveilles ? demanda le nanti, sa curiosité piquée à vif.

Shade ne lui répondit point. La colère s'amplifia dans l'esprit du baronnet, il releva les yeux du manuscrit qu'il fouilletait pour se rendre compte des sourcils froncés de l'homme de main. Celui-ci observait la porte fermée du bureau. Un chahut de tous les diables se fit entendre dans le couloir, des voix s'élevèrent avec fracas, des pas précipités martelaient le bois du plancher.

— Il aurait pu débarquer à un autre moment cet avorton, grommela le maraud.

Puis s'en attendre, il se glissa derrière Carthew, ouvrit la fenêtre et disparut sous la pluie battante. Le courant humide réveilla le noble qui, précipitamment, attrapa un objet dans son tiroir et l'échangea avec sa jumelle avant de se lever pour aller fermer prestement le battant vitré.

Quand le clic du mécanisme s'enclencha, la porte de sa salle d'étude s'ouvrit en grand, le bois claqua contre le mur. Le vicomte Elder se tenait sur le seuil, les traits tirés de son visage marqué de sa jeune barbe. Il portait toujours son manteau mouillé, il n'avait pas pris la peine de se déshabiller à l'entrée de la demeure.

Alfred se tenait dans l'ombre de Victor, il était complétement penaud. Son regard traduisait tout son pardon à son maitre de ne point avoir réussi à retenir le haut noble dans le vestibule pour lui annoncer son arrivée.

— Vous voilà enfin ! commença Elder.

Sa voix posée trahissait tout de même le trouble de l'homme. Il passa une main tremblante dans ses cheveux décoiffés, réajustant leur tenue. Carthew remarqua par de simples détails de son accoutrement désordonné que Victor avait quitté sa demeure précipitamment.

La Compagnie de la Rose NoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant