Par quelle étrange magie la forêt s'était subitement transformée ? Moins lugubre, quelques cris d'oiseaux nocturnes agrémentaient la tiédeur de la nuit. Les branches tordues s'étaient redressées vers le ciel étoilées. L'oppression de l'air avait déserté. Le bois s'était miraculeusement détendu et j'étais persuadé que Le Cornu y était pour quelque chose.
Partagé entre soulagement et anxiété, mon corps tremblait. Je n'osais plus regarder mes avant-bras pour ne pas être confronté à l'horreur de mon sang. J'essayais de me focaliser sur autre chose pour oublier. Tout, même Le Cornu et son physique repoussant.
Je ne m'étais pas attendu à une apparence si lugubre et bestiale. Natūre pour qui la beauté et l'élégance étaient primordiales, pourquoi s'encombrait-elle d'un Protecteur si disgracieux ?
— Toujours aussi cachotière... mais elle pourrait prévenir. Cela m'éviterait de me montrer sous mon plus mauvais jour, murmura Le Cornu pour lui-même.
Alfdis s'avança. Toute inquiétude avait déserté ses traits, une tout autre émotion s'y lisait : l'admiration.
— Dites, vous êtes bien une Entité ?
La Charmuzelle avait posé la question avec l'innocence de la jeunesse. Nous considérions qu'il n'y avait que deux Entités dans ce monde : Natūre et Toūt, le bien et le mal. Donner ce titre honorifique à quelqu'un d'autre était bafouillé nos traditions.
— Peut-être que oui, peut-être que non. Tout dépend comme vous voulez percevoir les choses, sous quel angle vous vous trouvez, petite biche.
— Excusez-moi. Vous avez bien insinuez que vous connaissez la raison de notre venue ? Il n'y a que les êtres supérieurs qui ont une telle intuition, enchaina la fillette.
La Cornu se tourna vers moi. Ses yeux de bouc insondable me jugèrent.
— Il est peu courant que des Surnaturels s'aventurent sur mon sanctuaire. Ils ont bien trop peur de mon courroux. Seuls ceux qui désirent ardemment rencontrer l'Observatrice sont guidés à me rencontrer et bravent leurs peurs.
— Pourquoi vous, le Protecteur de Natūre, êtes le lien avec La Cendre ?
Il rigola à ma question.
— Il y a bien des secrets que tu ignores encore. Ça serait gâché la surprise de te les révéler. De toute manière, ce n'est pas mon rôle.
Pourquoi il étaient tous à connaitre des secrets me concernant et ils avaient tous le culot de m'en parler sans les révéler pour m'allécher ? J'espère que La Cendre n'allait pas être aussi cachotière...
La Cendre... Le Cornu avait bien exprimé au pluriel ceux qui désiraient la rencontrer. Je n'étais donc pas le premier à fouler ce chemin. Qu'avions-nous en commun ?
Mon cœur s'emballa à la perspective de ne pas être le premier avec autant d'anomalies. Un faible espoir. Je pris une bonne bouffée d'air fraiche pour calmer mes battements et j'avais inconsciemment bloquer ma respiration sous le choc de cette révélation.
— Comment la rencontrer ?
— Ne t'emballe pas, petit. Chaque chose en son temps.
Il s'approcha du tas de feuilles où quelques minutes plus tôt se trouvait encore Eulalia. La tristesse me plomba l'entièreté du mon être. Le vide était bien plus profond que je n'aurais pensé. La vue de portrait macabre de cet amoncellement automnal m'était insupportable. Il me rappelait ce que je venais de perdre et la vie ne tenait qu'à un fil. Pourquoi je lui avais autorisé à me suivre ? Je m'en voulais de ma naïveté. Le monde était bien trop cruel, ma mère me l'avais souvent répété.
VOUS LISEZ
La Compagnie de la Rose Noire
Fantasy〰️ Alaric est une jeune hybride belge, tentant de vivre une existence normale, à l'image des humains qui l'entourent. Étudiant en façade, il appartient au Monde Caché, le territoire invisible et merveilleux des surnaturels. Un terre mystique où les...