– Non !
Je me réveille en sursaut.
– J'étouffe !
Antonin se débat dans le lit comme s'il était possédé.
– Au secours !
Je ne sais pas quoi faire. Est-ce que c'est du somnambulisme ? Est-ce que je prendrais un risque en le réveillant ?
– Julien !
Ça suffit, je le secoue pour qu'il sorte de ce cauchemar. Il se jette dans mes bras et me serre un peu trop fort. Il est en sueur, il a le souffle court. Je lui caresse doucement la nuque pour essayer de le rassurer.
– Qu'est-ce qui se passe ? On dirait que...
Il est pâle, au bord des larmes, je crois que mon cœur bat aussi fort que le sien.
– Depuis quand ?
– C'est revenu il y a à peu près un an.
Lorsque nous avions environ huit ans, nous étions tellement proches que nous dormions souvent ensemble. Le week-end et pendant les vacances, on passait des heures sur la console puis on s'endormait, dans le même lit. Nos parents ont toujours laissé faire, ils voulaient nous encourager à nous comporter comme des frères. Selon eux c'était bien que deux fils uniques soient si proches.
– Tu veux un verre d'eau ?
– Non, reste là.
Donc, lorsque nous avions huit ans, Antonin a commencé à faire des cauchemars. Il était angoissé par le feu. Chaque nuit, il voyait des images d'incendie, notre maison ou la sienne prise par les flammes et lui bloqué dans une pièce, à suffoquer. Ces cauchemars ont duré très longtemps. À l'époque on n'envoyait pas un enfant chez le psy pour le moindre problème. Peut-être que cela aurait aidé, mais la technique a été de laisser faire le temps et effectivement, au bout de quelques années il a cessé de faire ce genre de cauchemar.
– Pourquoi tu ne m'as rien dit ?
– Je voulais gérer seul.
– On dirait que c'est plutôt terrorisant. Raconte-moi.
– Ce sont les mêmes images que celles de l'époque. Je suis à la maison, dans ma chambre. Je vois de la fumée passer sous la porte et envahir la pièce. Quand j'ouvre la porte, le feu est partout. Je me mets à paniquer et à hurler. J'étouffe, personne ne vient. Puis ce sont les flammes qui envahissent la pièce.
– Tu as toujours aussi peur de mourir dans un incendie.
Il baisse les yeux.
– Antonin ?
– Mes cauchemars sont identiques. Mais...
– Continue, qu'est-ce que tu caches ?
– Je n'ai jamais raconté la fin.
Il a répété son histoire plusieurs fois et je pensais que tout se terminait avec le feu envahissant sa chambre.
– Pendant le cauchemar, je t'appelle mais tu ne viens pas.
Je ne peux rien y faire, je ne contrôle pas le monde des songes.
– Les flammes entrent dans la chambre, tout brûle et puis soudain, c'est le calme. Je suis devant la maison, elle a entièrement brûlé. Je suis seul, personne n'est venu. Je m'approche. Dans les décombres, il y a un corps.
Cette partie, je ne la connaissais pas du tout.
– Je regarde et, le corps brûlé, c'est le tien, Julien.
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Refaire surface
RomanceSouvent, on ne voit pas l'autre sombrer, même quand il s'agit de son meilleur et plus proche ami. Quand on le réalise, il est peut-être déjà trop tard, mais on donne toute son énergie pour le sauver. Et dans un premier temps, il faut apprendre à red...