Chapitre 22

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« It hurts, but I understand if you can’t find another reason to stay. »

Il y eût un silence pesant. Nathanael eût l'air de prendre un choc, celui de mes mots, car il se recula quelque peu. Ses yeux ne me fixaient plus du tout, plantés lâchement sur le sol. Et ses épaules s'étaient affaissées comme s'il finissait, lui aussi, par laisser tomber. J'avais beau essayer de me tenir fière, de faire l'indifférente ; sa réaction me touchait tout de même en plein cœur.

- Cette nuit, je suis partie à des kilomètres mais je suis sûre qu'un jour je partirai plus loin. Juste pour ne plus être avec toi, terminai-je.

- Tu ne peux pas me faire ça... répéta-t-il en secouant la tête.

Il prit appui sur la rambarde du perron, se recroquevillant sur lui même et cachant ainsi son visage meurtri de ma vue. Il continuait de réciter sa phrase jusqu'à ce qu'elle ne devienne plus qu'un murmure inaudible. Au moment où je crus percevoir un sanglot le secouer, il se redressa soudainement et nous tourna le dos.

- Joy, ne pars pas... Ne pars pas, dit-il d'une voix tremblante et nouée. Ne m'oblige pas à te supplier, je...

- J'en ai marre d'essayer de te comprendre, ça ne mène à rien. Je... J'aban -

- Je tiens à toi ! s'exclama-t-il en se retournant brutalement. Tu ne comprends pas ça ?

Sa voix avait été si puissante que j'avais fait un bond en arrière, sous la surprise. Mais ce qui me surprit le plus furent les traits de son visage, déformés par la colère. Et la tristesse. Ses yeux verts, à présent rougis, étaient noyés de larmes perdant toute leur beauté. Même si je tentais de rester forte, de ne penser qu'à moi et mon bien être, cette vision de mon frère m'atteignit tout de suite et me fit regretter mes mots. Certes je les pensais mais peut-être aurais-je dû les garder pour moi car on ne savait pas ce dont il était capable. Il était ingérable, envahi par toutes ses extrêmes émotions.

Ça me faisait littéralement mal de le voir ainsi. Je constatai à nouveau comme il avait besoin d'aide... Et après toutes mes nombreuses batailles, je laissais tomber ? Cela me paraissait injuste et surtout paradoxale. Il avait raison je n'avais pas le droit de le laisser tomber, moi sa sœur, mais après tout je n'avais pas le choix. J'avais compris que je ne pouvais rien pour lui, c'était à lui de faire un sacrifice s'il voulait aller mieux ; alors je voulais récupérer ma vie, je voulais me détacher de lui.

Mais lui n'était pas prêt à me laisser partir. Il combla le peu de distance qu'il y avait entre nous deux et pas à une seule seconde, je ne pensai à bouger. Il pleurait maintenant à chaudes larmes et ne cherchait plus à le cacher de quiconque. Il avait juste plongé ses prunelles dans les miennes et ne me lâchait plus, captant toute mon attention ainsi.

- Ce n'est pourtant pas difficile à comprendre ! Tu ne vois pas tout ce que j'ai fait, tout ce que je fais, pour toi... Ça a toujours été pour toi, tout ça. Pourquoi tu ne le vois pas hein ? Je ne veux pas avoir à te perdre Joyce...

Il m'avait dit ne pas vouloir me supplier mais il était en train de le faire d'une manière plus implicite. La manière dont il me regardait, dont il m'avait glissé ces mots avec des sanglots dans la voix et dont il avait discrètement enveloppé sa main avec ses doigts... Chaque parcelle de lui me suppliait un peu plus. Je m'étais mise à pleurer à mon tour, de plus belle. Et j'avais tellement mal au cœur que j'en avais des nausées ; son mal-être m'atteignait tant, c'était affolant.

J'étais clairement effrayée par la véritable emprise qu'il avait sur moi. A tel point que nous étions presque devenue une seule et même personne, je m'étais perdue pour lui... Cette idée m'arracha une nouvelle nausée alors je commençais à me retourner afin de m'en aller définitivement. Mais, évidemment, sa main m'attira à nouveau à lui. Plus proche cette fois-ci, si proche que je paniquai lorsque je le vis se pencher. Son front vint finalement se poser contre mon épaule tandis que sa main entrelaçait ses doigts aux miens. Je le sentais trembler contre moi, je le sentais respirer fortement, je le sentais pleurer et c'était la chose la plus déchirante que je n'eus jamais vécu.

Let it burnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant