Chapitre 1

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J'étais assis dans mon canapé à me gaver de chips au vinaigre, le moral au fond des chaussettes, avec la ferme volonté de passer ma journée à me morfondre. Jusque-là, c'était plutôt bien parti, mais c'était sans compter le fait que j'avais du monde dans mon entourage qui était susceptible de me solliciter, même si j'étais un peu tout seul à Paris en ce moment. Il n'était même pas midi quand mon téléphone me sortait de mon état léthargique. J'aurais dû l'éteindre, mon téléphone, j'aurais pu continuer à regarder des films nazes en caleçon et en chaussettes.

Je l'aimais beaucoup cette fille, mais j'étais dans un mood sombre, j'avais envie de tout, sauf de parler à une future femme mariée, obnubilée par « le plus beau jour de sa vie ». J'exagérais grave en plus, elle n'était pas du tout comme ça Maé, et mon frère encore moins. Mais concrètement, je n'avais envie de parler à personne. C'était rare pour quelqu'un comme moi qui était de nature plutôt joviale et positive, mais je m'étais réveillée dans un sale état. Au bout de quelques sonneries, je répondais quand même à ma future belle-sœur, me figurant qu'elle avait peut-être vraiment besoin de moi.

- Fram! Dis moi que t'es pas occupé ? Elle attaquait d'une voix presque suppliante.

- Je suis archi occupé. J'insistais bien sur le « archi », pour tenter d'être convainquant. Qu'est-ce que tu me veux ?

- Je t'avais parlé de la pâtisserie que je voulais pour le gâteau du mariage ? Ils ont un créneau cet aprèm pour une dégustation. Je veux pas y aller seule, je suis trop indécise tu sais bien... J'ai besoin d'un avis extérieur.

- Ton mec revient dans 5 jours, prend rendez-vous quand il sera là. C'est lui qui a voulu t'épouser, pas moi, il se démerdera avec ses gâteaux.

- Mais t'es bien con, toi, ce matin ! Qu'est-ce qui t'arrive ?

- Rien, j'ai mal dormi, je mentais pour ne pas avoir à m'étaler sur les raisons de ma mauvaise humeur.

- T'as pas compris, Fram, ils ont eu un désistement, c'est pour ça qu'ils m'ont appelée ! Sinon il faudra attendre des mois, et on n'a pas des mois devant nous ! Ils sont overbookés, c'est cet après-midi ou jamais.

- Demande à Valou.

- Valou, elle est bloquée chez elle, Zoé est malade !

- Yasmine ? Je suggérais dans un dernier espoir.

- Elle est enceinte jusqu'au cou... Et elle fait du diabète gestationnel, elle peut pas manger de sucre je te rappelle ! Sérieux, Fram, c'est si difficile de passer 3h avec moi ? Franchement t'es chiant...

- Bon ça va, je viens. Je me résignais, vraiment à contre cœur. Je passe te chercher à quelle heure ?

- 14h max ! Merci !

Je devais donc faire le deuil d'une journée de flemme à broyer du noir.

En soit, il n'y avait rien de suffisamment grave pour justifier mon état, mais j'avais envie de m'apitoyer un peu sur mon sort.

En me réveillant ce matin-là, de longs cheveux bouclés me chatouillant le nez, j'avais été pris d'un sentiment de dégoût intense. J'avais passé la nuit avec une femme, très belle au demeurant, et pour la première fois de ma vie, j'avais ressenti une profonde amertume au réveil. Pas d'elle, mais de moi-même. J'avais dépassé la trentaine, j'errais encore dans les appartements de mes potes qui, eux, avaient déjà su construire quelque chose.

SUR TES LÈVRES SUCRÉES [FRAMAL]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant