29 A couteaux tirés

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«There's only 24 hours in a day and half as many ways for you to lie to me. There's only 24 hours in a day, and half of those, you lay awake with thoughts of murder and carnage. »
Lana Del Rey, 24

Il y a seulement 24 heures dans une journée, et presque autant de façons pour toi de me mentir. Il y a seulement 24 heures dans une journée, et la moitié d'entre elles, tu restes éveillé avec des envies de meurtre et de carnage.

***

Mes yeux ne peuvent s'empêcher d'être attirés par les aiguilles de l'horloge. Cela fait déjà dix minutes que la jeune fille en charge du ménage devrait être là.
Enfin, si elle a accepté ma proposition...

Tout a été réfléchi, millimétré pour que cette folie soit un succès. Mais en ce début d'après-midi, je suis seule dans mon grand appartement à faire les cent pas. Ma curiosité m'incite à allumer la télévision pour suivre les pronostics de l'élection. Cependant, je sais que je n'y décollerai pas si je cède. Il me faut rester concentrée.
Pour l'occasion, j'ai arpenté les marches de l'immeuble dans une robe longue et en talon, prétextant des soins pour ma cicatrice puis le besoin d'un cachet pour la douleur. Dans la tête des gardes, mon look du jour s'est imprimé, me permettant de mettre en place mon échappatoire. Toutefois, il me faut ma pièce maîtresse.

Lorsque la poignée de la porte s'abaisse, mon cœur envisage de lâcher. Je commence à soupirer de soulagement, retenant mon sourire alors que le plan n'est même pas entamé. Mais c'est un visage désagréable qui remplace celui tant attendu. Je ne lui cache pas la déception qu'Enzo m'inspire et me détourne de lui sans attendre.

— Tu espérais quelqu'un d'autre ? m'interroge-t-il.
— Commence par frapper avant de vouloir m'interroger.

Mon reproche est assez hargneux pour qu'il s'éloigne de la vérité. Son arrivée inopinée complique le déroulé de mes projets et ne fait que m'agacer. Pourquoi faut-il qu'il m'impose sa présence dans des moments où je ne la désire pas ?
J'abandonne l'idée d'une lutte active et m'affale dans le fauteuil. Je le dévisage avec assez d'ardeur pour qu'il préfère partir sans explication. Mais le sottocapo est aussi têtu que moi.

— On m'a informé que tu avais pas mal bougé ce matin.
— Et ?
— Tu as fait ça pour ennuyer ton frère ?

Sa conclusion me laisse pantoise. Il ne vient pas à l'esprit des hommes du clan que je veuille agir par moi-même sans chercher l'attention d'un autre ? Engouffrée dans mon mensonge, je finis par m'indigner de leur peu de confiance en moi.

— Je vais t'épargner ma réponse vulgaire puisque tu sais pertinemment ce que j'ai fait au deuxième étage. Et puisque nous n'avons plus rien à nous dire, prends la porte et mémorise que tu n'es plus le bienvenu.

Mon ton est virulent, ce qui suffit à ranimer l'intérêt de mon interlocuteur. Ce que j'ai souhaité recevoir pendant des jours se produit au plus mauvais moment. Si la jeune fille débarque dans la seconde, je suis fichue. Il est certain qu'Enzo attendra à mes côtés par sécurité et mes chances de fuir le bâtiment seront nulles.
Avec une grande inspiration, je prends sur moi et me prépare à la discussion qu'il va exiger. Il faut que je sois concise dans mes réponses, assez claires pour qu'il ne cherche pas d'autres points à évoquer.

— Tu es en colère. Tu m'en veux pour quelque chose ?

Le naturel revient au galop. Cet homme ne peut pas s'étonner d'être mal reçu après ses agissements. Qu'il pose la question aggrave son cas. Outrée et incapable de me contenir, je joins mes mains pour les plaquer sur mes lèvres et inspire avec profondeur.
Réfléchir aux mots employés.
Ne pas foncer tête baissée.

Mafiosa , l'empire des Ceon (TOME 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant