⌜𝕟𝕖𝕦𝕗⌟

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Bonne lecture !

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Eren Jaeger arrive dans sa chambre le soir même, et Jean se dit que là, il ne comprend vraiment plus rien.

Assis à son bureau, réellement penché sur ses cours de littérature avec lesquels il se bat depuis des mois, Jean ne relève qu'à peine la tête en entendant toquer. Il dit « oui » un peu trop fort, attendant que la voix du surveillant se fasse entendre (pour lui demander quoi ? Ça change à chaque fois, mais la plupart du temps la réaction de Jean est la même « putain fais chier ». Il est poli, en revanche, alors il le fait de mauvaise grâce).

Mais la voix du surveillant de se fait pas entendre, justement. À la place, dans son dos, Eren Jaeger se racle la gorge :

— Hum, je peux entrer ?

Le sursaut de Jean les prend tous les deux par surprises, et ils s'observent quelques instants avec la même expression.

Des sourcils haussés, des lèvres serrées, et une gêne palpable dans toute la pièce. Eren est venu après sa douche, et il laisse dans son passage une odeur d'aloe vera. C'est agréable et étonnant de se rendre compte que quelqu'un si souvent énervé peut avoir une odeur aussi douce.

Jean essaye de ne pas y penser. De ne pas penser à l'odeur d'Eren, ni au fait qu'il se trouve dans sa chambre pour la première fois.

La porte se referme derrière lui, et le silence s'installe. Un silence trop long, et trop embrassant.

Finalement, Eren fourre ses poings dans les poches de son short, se dandine d'un pied sur l'autre, et jette un coup d'œil au jardin, au parc visible de l'autre côté de la fenêtre. Jean sait ce qu'il pense tout d'un coup : sa fenêtre à lui donne sur le parc, tandis que celle de l'autre chambre donne sur l'arrière du lycée, et accessoirement sur la prison juste en face.

Jean se racle la gorge. Eren inspire.

— Je... je venais...

Il regarde partout dans la pièce : partout sauf le bureau, où Jean est assis. Finalement, il semble se décider.

Son regard est plus bleu qu'hier, et plus vert qu'avant hier. Calme, comme un lac. Mouvementé, comme la mer. Jean sent sa poitrine se serrer tellement fort que ça lui coupe le souffle. Il se force à inspirer lentement.

— Tu l'as dit à personne.

Jean met sans doute quelques secondes de trop à intégrer la phrase. Il souffle :

— Pardon ?

— Ce que t'as vu. T'en as parlé à personne.

Ce n'est pas une question. C'est une affirmation étonnée, surprise, qui force Jean à serrer le poing.

— Bien sûr que non.

— Pourquoi ?

— Pourquoi j'en ai pas parlé ? Pourquoi j'en aurais parlé, plutôt ?

Il lève les yeux au ciel et soupire.

— Tu voulais que je dise ça à qui ?

Eren le fixe à nouveau sans colère, et c'est perturbant. Parce que le corps de Jean réagit à ça, que son cœur s'emballe et que le sentiment qui arrive avec les mots « Eren Jaeger » n'est plus la colère ou la haine.

— Je sais pas. Y'a plein de types qui m'aiment pas, ici. T'en trouves un, tu lui dis, et le lendemain ils s'y mettent à cinq pour me désaper histoire de vérifier.

Avec horreur, Jean relève la tête vers lui. Son regard vert devient bleu et se trouble.

— Pourquoi est-ce que je —

Il ferme la bouche. Inspire par le nez.

— Tu pensais que j'allais faire ça ?

Eren a au moins la décence de répondre honnêtement.

— Ouais. Je me suis tenu prêt pendant des jours.

Ça ne l'énerve même pas d'entendre ça. C'est juste triste, et franchement pathétique.

— Jaeger..., souffle Jean avec fatigue. T'es juste un pauvre con qui frappe trop fort, pas Satan en personne. Je vais rien dire à personne, alors tu peux dormir sur tes deux oreilles.

Eren le fixe, et c'est affreux. Quand Eren Jaeger fixe quelqu'un, c'est avec des yeux trop grands, trop lumineux, et presque surnaturels. Jean a l'impression de les voir briller, ce qui est impossible.

— Merci, dit-il finalement.

— Pas de quoi. J'imagine que ça t'a arraché la bouche de me dire ça ?

— Ouais. T'imagines même pas à quel point.

Jean pouffe en secouant la tête, et ils échangent un regard et un sourire. Finalement, quand Eren fait un pas en arrière pour repartir, il dit tout de même :

— T'es moins con que ce que je croyais. Presque cool.

La porte s'ouvre. Jean répond, juste avant qu'elle se claque en silence :

— Fais attention, Jaeger. Je pourrais croire que t'es en train de m'apprécier.

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Des bisous !

Quitte à guider mes pas || EreJeanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant