7. Violette Bradway

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J'ai beau demander à Sebastian d'aller plus vite, je sais déjà que nous n'arriverons jamais à temps. Cleo se ronge les ongles, et Rosalie ne nous a jamais rejoints. Nous n'avions pas le temps de la chercher, alors nous sommes partis sans elle. Comme nous ne savons pas exactement où va (où s'est déjà) déroulé le crime, j'ai dit en panique à Sebastian d'aller à Westminster. Cleo m'a ensuite affirmé que c'était sûrement là-bas.

Notre fiacre fend les rues de Londres jusqu'à la grande église, effrayant les gens sur notre passage. La calèche s'arrête enfin ; moi et Cleo ne laissons pas le temps à Sebastian de nous faire descendre, nous nous précipitons à l'intérieur de l'un des plus beaux édifices religieux d'Angleterre. Ce que je vois une fois entré me glace le sang. Walker jure, complètement bouche-bée, et même Sebastian ne semble plus tout à fait lucide.

Rosalie, assise devant l'autel, au centre de l'église, serre entre ses bras le corps ensanglanté de Violette Bradway. Sa tête repose dans le creux de ses bras, et ma soeur lui caresse les cheveux en sanglotant. Un Prêtre, assis en boule dans un coin, prie de toutes ses forces, tétanisé. J'envoie Sebastian l'interroger, pendant que j'approche ma jumelle qui a l'air d'être dans un état complètement secondaire. Elle marmonne à toute vitesse et en respirant très fort de vieilles prières que lui avait enseigné notre mère. Elle tremble très fort et ses yeux sont tantôt fermés, tantôt fixés sur la croix du Christ. Elle a fermé les yeux de Violette, qui a l'air bien plus paisible que ne l'a été sa mort. Je ne sais que faire, quand Cleo me pousse gentiment derrière elle et s'agenouille devant ma soeur. Elle commence par lui tapoter la joue et à claquer des doigts sous son nez.

- Eh, petite. Allez, debout, c'est fini. Il faut qu'on rentre, d'accord ?

Je me décale pour voir les réactions de ma jumelle. Elle regarde Cleo, mais sans vraiment la voir, comme si la policière était un fantôme que seul moi pouvait voir. Cette scène en devient absolument terrifiante. Rosalie a l'air d'être... possédée. C'est le mot, possédée. Ses vives prières me rappellent ce mois durant lequel nous avons vécu les pires horreurs. Elle priait en permanence, de la même manière. Mes yeux se posent alors sur le corps sans vie de Violette. L'entaille est profonde, le sang est toujours en train de couler ; le meurtre a eu lieu il y a peut-être quelques dizaines de minutes. Cette vision est insupportable. Ma vue se trouble, je vacille, me rattrape sur un banc. 

- Monsieur ? demande Sebastian.

Ni une, ni deux, je vomis le fondant au chocolat sur le sol de l'église. La remontée de nourriture me brûle la gorge, comme celle de Violette a dû la brûler jusqu'à ce qu'elle succombe. Je sens l'acide envelopper ma bouche, et le son que je produis en même temps me donne encore plus envie de gerber. Sebastian accourt vers moi et me tapote le dos. Lorsque j'ai fini, il m'essuie la bouche et me somme de respirer calmement. Puis, il prend dans ses bras le cadavre inerte de Violette Bradway, sans la moindre résistance de Rosalie. Ma soeur ne bouge pas, laisse simplement ses bras retomber, mais elle continue à prier et à évoquer Le Seigneur. Il y a trois ans, elle a pourtant cessé de croire en Dieu, tout comme je l'ai fait. Elle sait pertinemment qu'il n'y a personne pour nous sauver, et que nous sommes les seuls à pouvoir nous aider nous-mêmes. Il n'existe aucun ordre. Aucun pouvoir. Aucun être supérieur. 

Nous sommes seuls.

Black Butler Fanfic : L'Affaire des Sept Fleurs de LondresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant