Chapitre 11

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Au coup de feu, Alexandre poussa sur ses starting-blocks et s'élança à toute vitesse sur la piste d'athlétisme aux côtés de ses concurrents. On lui avait attribué le couloir central pour ce quatre cents mètres à côté de celui de Nelson Nkomo, son voisin de chambre originaire du Cap-Oriental en Afrique du Sud.

Ce dernier était en première année et avait déjà l'avantage sur tous les sprinteurs de l'université. Il amorça le premier virage avec une belle accélération qui en raison de la force centrifuge, obligeait son corps à se pencher vers l'intérieur de la piste. À l'entrée de la première ligne droite, Nelson perdit sa première place face à un peloton de tête adepte des deux cents mètres. Cependant, rien n'était perdu et il savait qu'il prendrait l'avantage dans la dernière ligne droite, là où les autres fatigueraient.

Le frisé, lui, peinait à rattraper ses adversaires. Il n'était pas en forme puisqu'il n'avait pas bien dormi et le visage fermé de Sofia dans la tribune avec les autres filles, le faisait culpabiliser. Les images de Louis, la nuit dernière, peinaient à quitter son esprit...

Comme l'avait prédit Nelson, le peloton de tête perdit peu à peu de sa vitesse à l'approche du deuxième virage, lui permettant de les rattraper et progressivement se démarquer.

La dernière ligne droite fut rude. Leurs chaussures de course à pointes martelaient le sol à base de caoutchouc synthétique et de charges minérales, considéré comme le revêtement le plus rapide jamais développé. L'africain distança aisément ses concurrents avant de casser sur la ligne d'arrivée tandis que le peloton de tête composé de quatre étudiants l'imita cinq secondes plus tard. Ensuite, arrivèrent deux garçons déçus de leur mauvais placement et enfin, Alexandre, essoufflé et en manque de glucides.

— Quarante-quatre secondes, Nelson ! Tu m'impressionnes de plus en plus ! dit le professeur aux cheveux longs grisonnants tenant le chronomètre bicolore accroché autour de son cou.

— Merci coach ! lança l'athlète aux cheveux crépus étirant ses grosses lèvres autours d'un sourire éclatant de blancheur.

Monsieur Girondo aux airs du chanteur Renaud, encouragea le reste des sprinteurs avant de s'approcher d'Alexandre, allongé sur une parcelle de gazon.

— T'étais vraiment pas terrible aujourd'hui... commenta-t-il gentiment.

— Je sais coach. Je ferais mieux le jour de la course !

Un blanc s'installa. Le professeur cherchait ses mots pour ne pas brusquer son élève aux pommettes rouges tomates.

— Tu sais que je dois n'en choisir que quatre parmi vous ?

— Oui, les quatre meilleurs ! répondit le jeune homme, confiant mais toujours haletant.

— J'ai sélectionné les quatre premiers de cette course, annonça l'homme d'une traite alors qu'il faisait signe aux filles de s'approcher de la piste.

La nouvelle abattue le frisé qui d'habitude arrivait entre la troisième et la quatrième place. Entre deux toux, il s'offusqua :

— Vous me switcher par Simon alors que je suis plus rapide que lui ?

— Il a mérité sa place, p'tit gars ! Tu feras mieux la prochaine fois !

Sans réaction, l'adolescent toujours à terre fixait son coach.

— Maintenant, va dans les tribunes. C'est au tour de mes championnes !

Sofia Alirral lança un regard inexpressif à Alexandre avant de placer ses pieds sur les blocs de départ et partir comme une balle au coup de feu. Elle semblait triste voir énervée transformant cette énergie négative en motivation.

— Mec, tu viens ?

Le frisé aux taches de rousseur se retourna vers Nelson, à quelques mètres de lui, tenant deux bouteilles d'eau.

— Azy j'arrive, confirma-t-il rattrapant la bouteille à moitié pleine qu'il venait de lui lancer. T'as géré encore une fois !

— C'est vrai... Si tu veux je peux t'entraîner après les cours, proposa le première année buvant goulument. T'arriveras peut-être à faire changer d'avis Girondo !

— Ce serait chanmé mais j'ai pas trop le time en ce moment...

— À cause de Louis ?

Alexandre écarquilla les yeux, subitement paniqué.

— Non, pourquoi ? répliqua-t-il sur la défensive.

— J'ai vu Sofia coller des affiches partout ce matin. Elle en a même mis dans les toilettes des gars.

— Ouais, c'est mon fréro. Je sais pas ce qui lui ai arrivé...

Nelson Nkomo, la bouche entrouverte, sourcilla.

— Tu te souviens qu'on est voisin, mec ? Les murs sont pas très épais...

Gêné, le jeune Benac s'éloigna sans mots dire vers les vestiaires où déjà se changeaient ses camarades, son ami sur les talons.

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