CHERUB : RE

31. Piégée

Riley ouvrit les yeux mais cru un instant être aveugle. Il faisait noir. Sous son épaisse combinaison avec ses gants, bottes, bonnet et lunettes, elle ne sentait pas grand chose. Une douleur intense la saisit au front, lui montrant qu'elle était bien consciente. La jeune fille sentait comme un liquide couler. "Du sang ?". Elle essaya de bouger mais réalisa avec horreur que c'était impossible. Ses bras, ses jambes, étaient comme coincés. L'air commença alors à lui manquer tandis que la jeune fille refusait de croire en ce qu'elle sentait, comme lorsqu'on réalise qu'on est toujours pas réveillé d'un cauchemar. Le froid, le contact crissant, l'obscurité : elle était ensevelie sous un gros tas de neige.

Pour ne rien arranger, Riley n'était même pas sûre d'avoir la tête à l'endroit et ce n'était pas sa blessure au front qui l'aiderait à voir plus clair. Elle étouffa un gémissement qui résonna comme un écho dans le minuscule espace tandis que sa peur la saisissait aux tripes. C'était pire, bien pire, que la spéléologie. Elle était seule au monde.

"Je vais mourir ici ?"

Telle était la pensée qui tournait maintenant en boucle dans sa tête.

Prise par la panique, sans se soucier des conséquences d'une telle agitation, Riley commença à remuer. Elle ne pouvait rester ici à ne rien faire. Une sensation familière la saisit soudainement à l'épaule : la sangle d'un sac qui l'étreignait. C'était son sac avec le traineau portable, celui qu'elle portait sans relâche depuis maintenant 3 jours.

Tout lui revint alors clairement en tête, tel un film muet en accéléré. Ces cent jours d'enfer, l'épreuve finale, ses coéquipiers, l'avalanche... Janis ! La respiration de la Russe se bloqua en se remémorant la panique de son amie. Allait-elle bien ? L'avalanche l'avait-elle emportée elle aussi ? Avait-elle besoin d'aide ? Riley espérait fort que sa précieuse partenaire se trouvait en ce moment même dans une bien meilleure position que sa personne : dans le propre comme dans le figuré.

La t-shirt bleu ciel recommença à s'agiter inconsciemment, sentant l'air définitivement lui manquer. La panique qui l'avait saisie, repoussée par ce film, menaçait de l'envahir pour de bon. Un souvenir soudain lui revint en tête, comme une dernière bouée de sauvetage jetée à son esprit : la spéléologie. Pas cet infect instant où elle avait revécu les pires moments de sa vie avec son père, mais la voix de Janis, la présence de ses coéquipiers, toute l'équipe qui s'était préoccupée de sa personne. Cette équipe sans qui Riley n'aurait jamais imaginé survivre à cent jours d'entraînement d'enfer.

Riley n'était dorénavant plus une petite fille seule et perdue.

Et maintenant, l'image du t-shirt gris promis s'affichait dans son esprit.

Sa respiration s'apaisa, le peu de dioxygène restant n'était pas étranger à cette sensation. Mais les rouages de son cerveau se réactivèrent : elle allait tout faire pour sortir vivante de ce trou. Nul doute que Speaks ou Kazakov était à sa recherche en ce moment même -du moins la jeune fille l'espérait profondément... Mais jamais ils ne pourraient la retrouver dans toute cette neige. Riley avait entendu d'horribles histoires sur des personnes piégées dans des avalanches qui n'avaient jamais été retrouvées.

Mais Riley avait un dernier espoir : le bracelet. Les mots de Speaks résonnaient maintenant dans sa tête : "Surtout ne l'enlevez sous aucun prétexte, en cas d'urgence, dévissez le bouton sur le côté et pressez le. Il nous permettra de vous localiser et de venir à vous." De toutes ses forces elle tira sur son bras gauche et ce fut dans un crissement de neige que ce dernier parvint à se rétracter. Riley entendit avec effroi le trou laissé se reboucher instantanément, la poudreuse lui faisant comprendre que l'espace était tout sauf stable.

Retenant son souffle, la jeune fille parvint à dégager son autre bas et tâtonna vers la sangle de son sac. Normalement sa lampe était encore accrochée. Normalement...