Nous sommes vendredi soir et tout est prêt pour que l'annonce aux enfants se passeau mieux. Nous avons pris leurs jus de fruits préférés et plein de trucs à grignoter, tout pourmes hanches. Mais on s'en fiche, on va leur annoncer mon cancer, c'est bien plus grave.Mon cancer. Ces mots résonnent dans ma tête. Je me prépare psychologiquement auxréactions diverses et variées de mes enfants. J'ai peur. Peur pour eux. Je regarde unenouvelle fois mes préparatifs. Mon mari me regarde et m'interroge du regard et laisseéchapper un « c'est bon, on y va ? ». Oui c'est parti, il le faut, nous n'avons jamais rien cachéaux enfants nous ne cacherons pas une telle chose. Ils ne sont pas bêtes, de toute manièreils vont voir mon absence d'une semaine en janvier. Ils seront heureux dans un premiertemps de voir que c'est leurs grands-parents qui vont les garder... Ou pas... Mon époux estdésireux de faire les choses seuls, moi je ne m'en sens pas trop la force, j'ai besoin de mespiliers pour avancer. Cependant, chaque chose en son temps, ce soir c'est l'annonce auxenfants.
Je me suis habillée avec des vêtements souples pour être à l'aise, et j'ai pris avec moiplusieurs paquets de mouchoirs, car je sais bien au fond de moi, que cette annonce vabouleverser nos vies à tous les cinq. Il y aura les répercussions sur le reste de la famille je lesais, mais pour le moment je me fais violence pour me concentrer sur mon sourire pour mesenfants, ma chair, mon sang, ma réussite comme je dis souvent, comme toutes les mamans.Le papa les appelle. Mon cœur se sert. Ils descendent en trombe comme à leur habitude, etse jettent autour de la table, les yeux brillants face à tout ce qu'il y a en prévision à se mettresous la dent. Je souris, reste assise sans bouger, je les observe. Ils attendent le feu vert pourse jeter sur les denrées. Mon cœur se sert davantage, ils sont heureux mais je vais devoirleur annoncer la nouvelle. Leur papa les sert. Au fur et à mesure que les verres seremplissent, mon cœur se serre de plus en plus.
Je reste sans rien dire, à les observer, je voudrais leur dire mais je n'y arrive pas. Lesmots restent bloqués quelque part dans ma bouche, dans ma tête. J'entrouvre mes lèvresmais rien ne sort. Mon mari me regarde, et prend donc la parole, il se doute bien de ce queje ressens.
- Les enfants, dit-il, maman et moi avons une annonce à vous faire.
Mon cœur se sert si fort que j'en ai mal dans la poitrine. J'affiche mon sourire, jepuise la force tout au fond de moi. Les larmes me picotent les yeux mais je n'affiche rien,surtout ne rien afficher à mes bébés. Ils sont si beaux, si grands déjà. Je les regarde un à unet je les admire. Ils vont devoir être fort.
- Vous avez bien vu, remarqué que maman et moi allions souvent voir desmédecins.
J'ai l'impression qu'une main serre mon cœur et m'étouffe, ma salive ne passe plusdans ma gorge.
- Maman à un cancer, le cancer du sein, lâche-t-il.
Merde ! Il l'a dit ça y est ! Mes enfants me dévisagent, je garde mon sourire affichésur mes lèvres, telle une statue. Ma toute petite nénette se met à hurler : « maman ! » et sejette dans mes bras, ses yeux plein de frayeurs. Ma grande me dévisage essayant dechercher un mot de moi lui disant que cela est faux mais je leur souris et leur dis :
- Oui mes chéris, mais n'ayez crainte c'est le cancer le plus connu, j'ai de la chancedans mon malheur.
Mes enfants pleurent, ils sont en larmes, le papa les rassure également en affichant unsourire et leur certifiant que tout se passera bien.
- Mais tu vas mourir maman, je ne veux pas que tu meures maman ! Qu'est-ce queje vais devenir sans toi, qu'est-ce qu'on va faire, comment et pourquoi ?Mamaaaaan...
Leurs cris m'arrachent les larmes que j'avais réussies à dompter jusque-là. Mon mouchoir enmain, j'essaie de reprendre le dessus comme je peux.Le papa prend les reines :
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Parce que cela n'arrive pas qu'aux autres
SaggisticaCarnet -très intime- d'une guerrière Nathalie, Nath pour les intimes, a 42 ans à l'annonce de la maladie. Sa maladie. A travers les larmes, la joie et accompagnée de toutes les épreuves et émotions procurées par le « crabe », elle nous embarque dans...