Juliane : J'ai besoin d'aller aux toilettes.
L'envie de se relâcher est de plus en plus forte.
Marie : Elles sont justes là.
Elle m'indique une porte dans le fond de la chambre.
Juliane : Merci.
Je commence à me lever.
Marie : Holà malheureuse. Je te rappelle que tu peux pas te déplacer toute seule.
Elle me met mon corset et me donne les béquilles. Je me déplace difficilement jusqu'au trône. Je m'assoie mais la couche de la veille m'empêche de satisfaire mes besoins. Marie la détache et la laisse à mes pieds. Elle ferme la porte en me laissant seule. En poussant, j'ai très mal dans mon dos. Je ne fais que deux petites crottes mais c'est mieux que rien je suppose. J'essaie de m'essuyer mais c'est une tâche ardue. Il faut soulever une fesse et passer le papier. Je n'y arrive pas bien avec la douleur et le corset mais j'ai finalement terminé. J'appelle Marie comme le ferait un bébé à sa mère.
Marie : Je te remets pas la couche. Elle est sale.
Pardon ? La couche est sale. En effet, je peux voir que l'intérieur est tout jaune. Pourtant, elle me l'a mis hier...
Marie : Je t'en met une neuve.
Elle me fait me mettre debout. Comme la veille, elle prend une couche propre, me met de la crème et la referme sauf que cette fois, je suis debout. J'essaie de revenir vers le lit ensuite toute seule mais évidemment, il faut que Marie me rattrape quand je tombe à la renverse.
Pendant près d'une heure, elle essaie de me rappeler des souvenirs. Elle me montre des photos de moi et de nous deux. C'est très étrange. J'ai une impression de déjà vu mais extrêmement faible. Voir la Juliane d'avant me dérange. Je n'ai pas l'impression que c'est moi. Ou alors, j'ai l'impression d'avoir pris possession de son corps, d'avoir effacé la personne qui l'habitait. Comme si je n'étais qu'une usurpatrice.
Il est maintenant 14 heures et Marie me demande si je souhaite recevoir de la visite. J'aquièce puisque je n'ai pas de raison de refuser. Pourquoi faire partir quelqu'un qui a fait un long trajet uniquement pour moi ? J'ai quand même l'impression que ça ne rime à rien. À quoi bon voir des gens que je ne reconnais pas ? C'est peut-être égoïste mais à part pour eux, je n'en vois pas l'intérêt.
Marie ouvre donc la porte et appelle quelqu'un. Deux personnes âgées passent le pas de la porte. Ce doit être mes grands-parents. Ils s'approchent de moi, se baissent et je les regardent m'offrir un bisou. Ils pleurent. Je ne suis pas bien. J'ai l'impression qu'ils me reprochent de ne pas pleurer aussi. Ce doit être une impression puisqu'ils me prennent chacun une main.
Mamie : Tu vas bien ?
Juliane : Oui.
Mamie : On a eu si peur.J'étouffe. Je n'arrive pas à réagir correctement. Je stresse beaucoup et pour pas grand chose, ils ont l'air très gentil.
Papi : Ça ne va pas ?
Il a vu que quelque chose cloche. Mince !
Juliane : Je...
Encore une fois, mes émotions me submergent et je perd le contrôle de mes yeux qui laissent s'échapper de grosses larmes.
Juliane : Non. Non ça va pas... Je suis désolée...
Mamie : Désolée de quoi ma grande ?
Juliane : Je... Je ne sais pas qui vous êtes ! Je ne sais plus...
Mamie : Tu...
Juliane : Je ne sais plus rien !Mon corps est secoué de soubresauts. J'ai du mal à respirer.
Papi : Non, ce n'est pas vrai. Tu te souviens de nous, n'est-ce pas ?
Mamie : Dis moi comment je m'appelle, s'il te plaît.
Juliane : Je...
Mamie : Moi, c'est Danielle. Et ton papi, c'est André.Pourquoi suis-je incapable de me rappeler de ça ? Pourquoi faut-il que ce soit moi !
On continue de discuter. Enfin si discution il y a. Ce sont plutôt des pleurs de mon côté, des jurons pour André et des questions pour sa femme.
Ils me disent de me reposer et qu'ils reviendront demain. Cette rencontre m'a secouée. Je suis exténuée. Marie est toujours là. J'ai l'impression qu'elle n'a pas envie de passer ses journées ailleurs qu'avec moi. Elle m'informe que mes autres grands-parents ne viendront que demain parce qu'ils n'ont pas eu de billet de train pour venir.Marie : Ça va ?
Juliane : Pas vraiment. Je devrais savoir qui ils sont. Je devrais les reconnaître. Il avait l'air d'être très déçu. Et elle ne voulait pas accepter. Tu as vu comme elle me posait des questions ? Comme si je pouvais y répondre. Comme si ça allait changer quelque chose à la situation.
Marie : Tu sais, ils s'inquiètent de ton état. Oui, chacun a sa façon de gérer les choses, mais ils tiennent à toi que tu t'en souviennes ou pas. Faut pas non plus que tu oublies qu'ils sont en deuil. Ils ont perdu leur fils et leur belle-fille. C'est pas rien.Juliane : Je sais. Je me pose une question, quand a eu lieu les enterrements ?
Marie : Il y a pas eu d'enterrement. T'es parents se sont fait incinérer. Ils étaient là pour la cérémonie.Ça me semble évident maintenant. Bien sûr qu'ils ont été incinérés.
Pourquoi est-ce que j'en suis persuadée ?Juliane : Tu peux me passer de l'eau ?
Marie me fait boire un grand verre. J'avais soif. J'ai trop évacué d'eau avec toutes ces émotions.
Juliane : Merci.
Marie : Y'a pas de quoi.Par contre, maintenant j'ai envie de faire pipi. J'ai vraiment envie de faire pipi. J'ai de plus en plus mal aux reins. J'ai du mal à me retenir.
Juliane : Faut que j'aille pisser.
Je m'assoie sur le bord de mon lit avec l'aide de Marie. Elle me met en vitesse le corset. Elle a bien vu que ça presse. Une fois les béquilles en mains, je m'appuie dessus et ma petite force voyage jusqu'à mes bras et abandonne ma vessie. Je fais pipi sans le vouloir. Ça coule à torrent. Heureusement, la couche retient l'urine et gonfle en conséquence. Petit à petit, celle-ci devient très lourde et s'affaisse un petit peu. Je me suis immobilisée. Et Marie a bien compris pourquoi.
Pdv Marie :
Juliane s'arrête de bouger. Elle a les yeux grands ouverts. Je sais ce qu'il se passe. Je suis face à elle et je vois que la couche dépasse de plus en plus sous le corset. Aucun doute, elle est en train de relâcher la pression.
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Perdue Dans Ses Souvenirs •[En pause]•
Teen FictionUne jeune fille du nom de Juliane a perdu la mémoire à cause d'un traumatisme cérébral dû à un accident de la route. En plus de son amnésie, elle a deux autres graves séquelles physiques. Elle va se lancer à la quête de sa mémoire. Avec l'aide de so...