chapitre iv

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Sage se rappellerait toujours le jour où il s'était assommé pour la première fois tout seul

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Sage se rappellerait toujours le jour où il s'était assommé pour la première fois tout seul. Il avait alors neuf ans, et était tout fier de son nouveau vélo sans petites roues. Il avait été impatient de l'essayer sur la route, en face de la maison de son grand-père, et il avait refusé de porter un casque. Il s'était enfui à toute vitesse avant que Henry ne lui mette la main dessus pour le forcer à enfiler la protection.

Il n'avait pas vu l'arbre à temps.

Le choc l'avait sonné si fort qu'il avait brièvement perdu connaissance. Quand il était revenu à lui-même, il avait eu une migraine si forte qu'il n'avait pu s'empêcher de pleurer.

Il s'en était sorti relativement bien, avec un petit traumatisme crânien qui avait été soulagé par un guérisseur et une bosse grosse comme un œuf qui avait laissé une cicatrice pâle à la naissance de ses cheveux. Son grand-père ne l'avait plus jamais autorisé à monter sur une selle sans casque.

Quand Sage ouvrit les yeux avec difficulté, il eut l'impression de revivre son accident puissance mille. La douleur s'était nichée dans toutes les fibres de son corps, ayant fusionné avec ses os pour ne faire plus qu'un. Il se recroquevilla en gémissant piteusement. Le simple mouvement le fit souffrir, comme si un monstre sadique s'amusait à l'éplucher avec soin.

Il percevait vaguement le monde extérieur à travers le voile écarlate qui l'enveloppait. Il était allongé sur une surface confortable et l'air sentait la coriandre. Des voix résonnaient autour de lui, leurs paroles incompréhensibles. Les oreilles de Sage étaient bouchées. Il avait la sensation de flotter à la frontière de sa conscience, rattaché au monde par un fil qui se fragilisait à chaque instant où la douleur resserrait son emprise sur lui.

Il s'autorisa à replonger sous la surface.

Il émergea quand des mains froides saisirent délicatement ses joues. Le mouvement surprit Sage, qui s'arc-bouta avec cri déchirant lui échappant.

Chut, chut. Tout ira bien. Avale.

Des doigts inflexibles se frayèrent un chemin entre ses mâchoires, le poussant à ouvrir la bouche. Une pâte au goût affreux fut déposée sur sa langue, provoquant une vague de nausée que Sage dut ravaler. On lui referma la bouche et il n'eut pas d'autre choix que de mâcher l'affreuse décoction et de l'avaler, trop faible pour protester et se débattre.

— Cali, recule. Tu ignores comment il va réagir quand il se réveillera.

— Mais il me connait !

— En temps normal, oui. Pas quand il est sous emprise. Recule.

Sage ignora les voix qui se chamaillaient, trop concentré sur la sensation de fraîcheur qui l'envahissait, à commencer par sa poitrine. Il en oublia presque l'immondice qu'on l'avait forcée à manger.

Le froid grignotait la douleur, la repoussant du plus en plus loin, jusqu'à ce que Sage fut à nouveau capable de respirer sans être poignardé en plein cœur. Un sanglot de soulagement lui échappa et des larmes coulèrent sur ses joues. Il se rendit compte qu'elles étaient déjà humides quand il les effleura.

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