"Arvin Russell, tu ne me fais pas peur"

24- Sans un mot

Quand tout le monde rentre au chalet, Arvin monte dans la chambre faire nos sacs.

Je crois qu'il est impatient de s'en aller.

Je crois que moi aussi.

Fleure et Jackie viennent me parler et je leur dis rapidement que l'on va rentrer avec Arvin. Elles essaient de nous convaincre de rester. Je leur explique gentiment que je ne veux pas le forcer à rester, il a déjà assez fait d'effort. Elles tentent de me convaincre de ne pas partir et qu'elles me ramèneront demain soir. Max et Alan s'invitent dans la conversation et essaient également de me faire changer d'avis.

- Je vous adore, vraiment. Mais je n'ai pas envie de rester, alors que Lenora n'est pas là.

- Oh, allez Hazel, c'est bon, soupire Max.

J'ai les poils qui se hérissent quand il m'appelle par mon prénom. Je ne comprends pas comment il ne se sent pas mal de l'avoir laissé de côté.

- Non, ce n'est pas bon Max. Je pensais... non j'espérais que vous alliez être moins méchants que les autres après ces derniers mois avec elle. Surtout toi, Max, elle t'a quand même aidé à passer ton année...

- De toute façon, on sait qu'elle n'aurait même pas daigné venir, argumente Alan.

- Qu'est-ce que tu en sais, personne l'invite jamais. Vous êtes aussi puérils que Dinwoodie et sa bande et vous continuez son harcèlement en oubliant de l'inviter.

- Poulette, ils ne pensaient pas à mal, les défend Jackie.

- Et pourtant, vous lui faites du mal. J'espère pour vous qu'elle n'entendra pas qu'il y a eu ce week-end. Parce que, personnellement, je me sens égoïste d'être restée aussi longtemps, alors qu'elle est restée à Coal Creek. Même Danny m'a demandé où elle était !

- Hazel... commence Fleure.

- Non. C'est bon, j'arrête de discuter avec vous de ça. On s'en va avec Arvin. Je vous verrai la semaine prochaine.

Je les embrasse et je sors du chalet. Arvin me rejoint quelques minutes plus tard, il ouvre la voiture et je monte sans un mot. Je ne devrais pas me sentir aussi mal, et pourtant j'ai ce sentiment de trahison envers Lenora.

Arvin démarre, la musique remplit l'habitacle. Il conduit et n'essaie pas d'engager de conversations, moi non plus. Je regarde le paysage défilé. Je réfléchis peut-être trop, mais je n'arrive pas à ne pas repenser à tout ce qui s'est passé et à me demander si je n'aurai pas pu faire autrement. Éviter la dispute avec Arvin, faire en sorte que Lenora soit invitée... je pense à mille scénarios et pourtant je ne peux rien changer. Ce qui s'est passé ne peut pas être effacé et je dois vivre avec.

- Rien n'est ta faute, Luciole.

Je tourne ma tête, Arvin me regarde du coin de l'œil et me lance un petit sourire pincé. Il caresse ma cuisse avant de retourner sa main, j'entrelace nos doigts et je soupire.

- Merci de toujours prendre notre défense, ajoute-t-il dans un murmure.

Je soulève nos mains et j'embrasse le dos de la sienne. Je ne sais pas quoi lui répondre. Peut-être que rien n'est ma faute, mais je me sens quand même coupable. Je n'aurai pas à devoir les défendre, ils n'ont rien fait de mal... ils ont eu moins de chance dans la vie que nous autres. Tout le monde les traite comme s'ils avaient la peste, cette injustice me rend malade.

Le trajet se continue en silence, Arvin chantonne par moment ce qui passe à la radio et il lâche ma main pour changer de vitesse avant de rapidement la reprendre. Je sens qu'il me regarde de temps en temps, mais je reste fixée sur la route, comme si tous mes problèmes allaient disparaitre dans le bitume.