Destins Reliés

15

Elle le lui avait dit.

Malgré la réponse humiliante qu'elle avait essuyée, Hinata ressentait un certain soulagement, celui du devoir accompli. Elle avait offert à Naruto la chance de participer à la vie de son enfant, et il l'avait refusée. Peut-être était-ce mieux ainsi, pensa-t-elle en ravalant ses larmes tandis que Sakura entrait dans sa chambre le lendemain matin.

— On a emballé tes affaires, hier soir. Malgré ses yeux mouillés, sa collègue s'efforçait de sourire.

— Je t'ai trouvé des vêtements, car je suppose que tu n'as pas envie de faire le voyage en uniforme. Tu aurais dû me parler, j'aurais pu t'aider, ajouta-t-elle, plus grave.

— Tu es au courant ?

— Tu sais, une femme qui, après avoir eu un malaise, repart dans les premières semaines de son séjour ici, doit avoir une bonne raison qu'il n'est pas difficile de deviner. Une chance d'avoir eu affaire à Naruto, qui est suffisamment européanisé pour comprendre. Elle remuait le couteau dans la plaie, mais sans doute était-elle incapable ne serait-ce que d'entrevoir la vérité.

— J'ai aussi repris tes papiers dans le coffre. Tu ne serais pas allée loin sans eux.

Une autre infirmière poussa le fauteuil roulant dans lequel Hinata avait pris place jusqu'à la limousine qui l'attendait. Ses bagages se trouvaient bien dans le coffre arrière, comme le lui dit le chauffeur tandis qu'elle s'installait dans le véhicule climatisé. Elle tourna la tête pour jeter un dernier regard à l'hôpital. Dans quelques heures, elle serait loin de Konoha. Au moins, elle serait sur le chemin du retour. Juste une mère célibataire de plus, et un autre géniteur qui refusait d'assumer ses responsabilités. Elle avait passé si peu de temps ici ! Elle ne manquerait à personne. Pas Naruto, en tout cas... Konoha était vraiment une ville éblouissante. Les yeux pleins de larmes, elle la regarda s'éloigner. Comme elle aurait aimé rester toute une année ! Elle fixa le ciel d'un bleu profond, le paysage aride, les larges autoroutes qui conduisaient à l'orée du désert, tentant de les graver dans sa mémoire. Elle n'avait pas vu grand-chose du pays de son enfant. Un jour, elle devrait lui parler de ses origines, car ce ne serait pas son père qui le ferait. Elle ne se rappelait pas que le trajet jusqu'à l'aéroport était si long... Une remarque qu'elle se fit au bout de vingt minutes. Les panneaux de signalisation étaient en arabe, mais des pictogrammes représentant un avion la renseignaient, et le chauffeur avait semblé les ignorer... Il était sorti de la route principale pour se diriger vers la mer miroitante. Un raccourci, peut-être? Puis elle vit un autre panneau indiquant l'aéroport sur la gauche, alors que la limousine poursuivait tout droit.

— L'aéroport ! cria-t-elle. L'entendait-il, à travers la séparation vitrée ?

— C'est encore loin? Aucune réaction. Lorsqu'elle surprit son regard dans le rétroviseur, elle commença à s'inquiéter. Elle frappa à la vitre, mais il l'ignora et, sans trop savoir comment, avant même que le bâtiment blanc ne soit en vue, elle comprit où il l'emmenait. Au palais de Konoha. Elle l'avait vu dans les brochures, sur les films, depuis sa fenêtre, jamais de près. Rien ne l'avait préparée à sa munificence imposante. Que lui voulait Naruto ? Elle posa une main sur son ventre. La petite vie à l'intérieur, c'était la réponse. Quelle folie d'avoir cru qu'elle pouvait se contenter de le mettre au courant et de s'en aller ! Quelle idiotie d'avoir pensé que c'était aussi simple ! Son métier de sage-femme lui ayant enseigné l'optimisme, elle choisit d'espérer que les choses se passeraient bien. Toutefois, elle mit un point d'honneur à se préparer à toute éventualité. Malgré son angoisse, elle se devait de sourire et de paraître sereine. Le chauffeur, les yeux fixés sur le rétroviseur, attendait une réaction d'inquiétude : elle ne lui fit pas ce plaisir.