Chapitre 2

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Il est sept heures du matin lorsque je rentre d'une mission qu'Azraël m'a lui-même confié.

C'est rare que ce dernier me demande un service, mais quand il exige, j'applique sans broncher. Je me dois de le faire, non pas parce que j'y suis obligée, mais parce qu'on a conclu tous les deux un accord nous engageant de se rendre mutuellement service en cas de besoin.

Sa cible était une pauvre fille errant dans la rue et ayant été agressée par deux individus. Il m'a donné approximativement la description de ces hommes et j'ai réussi non sans peine à les retrouver.

N'est-ce pas merveilleux de pouvoir se sentir forte dans la position où je me trouve ? Tout comme ces hommes se sentent beaucoup trop souvent supérieur face à des filles seules et sans défense.

J'embauche au coucher du soleil, comme d'habitude, mais cette nuit ma mission n'a pas duré longtemps. Autant dire que je ne commence jamais à la même heure et à la minute près, et c'est ce qui me plaît de pouvoir m'acclimater avec le temps et les saisons.

Azraël m'est alors apparu, hormis la nuit tombée, je ne le vois jamais, mais il est continuellement dans ma tête, ou sous l'allure d'un corbeau. Il est toujours présent, près de moi pour tenter de me calmer quand la situation est sur le point de me dépasser ou de mal tourner.

Car depuis que je travaille pour lui, je me confronte à l'effet boomerang. Malheureusement, j'ai de plus en plus de mal à me contenir, la colère qui règne en moi bouillonne dans mon for intérieur et ne demande qu'à s'extraire de mon corps.

Parfois, quand j'y pense, je me sens flattée d'avoir été choisie par cet ange de la mort. Rare sont les personnes l'ayant vue de leur vivant. Depuis qu'il m'a proposé son aide et que nous avons conclu ce pacte, il m'a offert tout ce dont je pouvais rêver et je le lui rends bien. En échange de cet accord passé, il récupère les âmes perdues et cela le nourrit. Moi aussi d'ailleurs, mais bien différemment de lui.

Ce qui m'a surtout pris le plus de temps cette nuit, c'est de vadrouiller ici et là à la recherche de ces âmes impures, comme le dit si bien mon ami.

Je sais que beaucoup de personnes pourraient me prendre pour une folle et que je pourrais très bien finir à l'asile pour le restant de mes jours, c'est pour cela que je ne dévoile rien de mon passe-temps nocturne.

Quand je croise mes voisins, je comprends rien qu'à leurs regards ancrés sur ma personne qu'ils se posent tout un tas de question me concernant. Mais après tout, cela ne les concerne pas. Est-ce que je vais m'occuper de leur vie, moi ? Non. Sauf s'ils s'immiscent dans la mienne. De là, je pourrais vraiment leur rendre visite et leur montrer qui je suis réellement, mais pour leur plus grand regret, ce serait certainement la dernière fois qu'ils cligneraient des yeux.

Même si j'ai très souvent envie de frapper à la porte voisine, celle-là même qui m'exaspère quotidiennement avec leurs fêtes d'étudiants, je vogue à des préoccupations beaucoup plus sérieuses en ce moment.

Néanmoins, je garde toujours en tête le vacarme assourdissant qu'ils font chaque week-end. À charge de revanche...

Je me déshabille petit à petit, de mon entrée à la salle de bain. Je suis en nage dans mes vêtements et ces derniers sont tâchés de sang.

Je sais que j'ai vite chaud et que je me rabâche chaque soir de moins me couvrir bien qu'on soit en plein hiver, mais avant de partir, j'ai toujours une petite crainte d'avoir froid en sortant de chez moi. Puis il faut aussi et surtout se montrer discret, les vêtements sombres sont donc logiquement préférables.

Les premières gouttes d'eau chaude qui coulent sur mon visage me fait un bien fou. Je pourrais rester des heures dans cette douche, debout la tête en arrière face à ce pommeau m'offrant un bien-être indescriptible.

C'est le début de la journée pour certains, mais la fin de la mienne pour moi. Du moins, de ma pseudo-vie.

Dans quelques heures, j'ai rendez-vous dans mon agence d'emploi. Ma conseillère est d'ailleurs une des personnes que j'ai envie d'étriper depuis maintenant un sacré bout de temps, mais je me retiens me disant que ce sera meilleur au fil des jours.

La patience est une vertu ! me susurre Azraël.

C'est vrai, un accident est si vite arrivé. Un sourire sadique s'étire sur mon visage fin, rien qu'en y pensant.

 Tu as des choses plus importantes à régler avant tout, ne te détournes pas du droit chemin, cela pourrait mettre à mal notre accord, ma chère.

Je le sais que trop bien...

– Tu sais que je n'apprécie pas ce genre de chantage, Az ? Je t'ai déjà fait comprendre un nombre incalculable de fois que je donnerais mon âme pour toi.

Tu exagères...

– Tu m'as sauvé au moment où j'en avais le plus besoin. Pour moi, je te dois tout. Quitte à tout perdre, j'aurais pu grâce à toi, vivre comme bon me semblais la vie que je rêvais de vivre.

J'en serais presque ému.

 Sauf que tu ne peux pas ressentir les émotions.

– Tu te fourvoies, ma chère, mais tu as aussi raison. Les êtres de mon monde ont des émotions bien plus différentes que les humains.

 Comment ça ?

Vous, vous agissez selon vos instincts primaires. Votre animalité prend le dessus sur la raison. Les démons, les anges et tout le reste, nous répondons à une éthique.

– Tu sous-entends par là que nous n'avons pas d'éthique ?

 Je n'ai jamais dit ça. Votre problème, c'est que vous en avez une, mais vous ne l'appliquez pas. Ou parfois pas comme il le faudrait.

– C'est exact. C'est justement pour ça que nous nous sommes rencontré, pas vrai ?

J'ai entendu ta détresse. Un ange de la mort ne peut pas toujours agir seul. Une aide humaine est donc la bienvenue. Tu étais la personne dont j'avais besoin.

– Et tu étais celui dont j'avais profondément besoin.

AZRAËLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant