Chapitre 12

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Je suis dans un tourbillon d'émotions que je n'arrive plus à contrôler.

D'un côté, je suis ébahie et euphorique quant à la découverte de son univers incroyable dont Azraël m'a fait part.

Cela change en tout point de la vision basique que je me fais de ma vie et de ce monde toujours plus surprenant.

D'un autre côté, je suis stressée par rapport au futur qui était jusqu'ici clair comme de l'eau de roche, mais qui hélas semble s'être troublé depuis cette vérité dévoilée.

Dans tous les cas, je me dois de tenir bon et de poursuivre mon objectif qui ne me quitte pas depuis la signature de mon pacte avec l'ange de la mort.

La vengeance me garde debout, mais jusqu'à quand vais-je tenir ? Je ne saurais le dire.

- Tu sembles plus soucieuse depuis que je t'ai fait part de mon monde. Je me trompe ? me questionne ce dernier, un peu plus inquiet qu'à l'accoutumé.

- Non. Enfin, ni plus, ni moins. Je suis soulagée sur certains points et plus anxieuse sur de nouvelles choses.

- Laisse-moi deviner ! Ce sont les attentes à venir qui te taraudes ?

- Rien ne peut me perturber, tu le sais très bien, Azraël. Je sais que j'ai toute confiance en toi. Néanmoins, je ne connais pas les autres dieux ni maîtres qui résident dans ton univers. Je ne veux pas devenir une potentielle marionnette avec qui on peut jouer à sa guise et en usant de temps à autre de la manipulation ou du chantage.

- Tu te fais trop de bile !

- Je ne crois pas, non.

- Tu sais, Gaïa, un monde n'est pas seulement peuplé de personnes bonnes ou mauvaises. Il y a dans tout l'univers qui est le mien, mais aussi le tien, une ligne droite et claire qui se nomme l'Équilibre. Alors si tu conçois la vie comme blanche ou noire, tu te fourvoies. La vie est grise. Et cette couleur détermine le juste équilibre de notre univers. Cette couleur est l'image même de ce qui fait tourner correctement la machine. Il n'y a ni utopie, ni dystopie. C'est simplement ce qu'on appelle la vie. Alors ne commence pas à te faire de mauvaises visions de ce que pourrait être ton avenir. Il est juste incertain, c'est vrai, mais il n'est ni bon, ni déplorable.

Les mots d'Azraël résonnent en moi
comme un souffle nouveau. Des paroles encourageantes dont j'avais énormément besoin au plus profond de moi.

- Que dois-je faire à présent ?

- Rien. Tu dois seulement te tenir prête, car c'est certain, ton avenir ne sera plus celui dont tu pensais jusqu'ici. Cependant, je souhaite te rassurer sur un point : je serais toujours là en cas de besoin, même dans les moments où tu t'y attendras le moins. Il va falloir juste agir intelligemment, ma grande.

- J'espère, rétorqué-je un sourire au coin des lèvres, quelle est donc ma mission maintenant ?

Son sourire diabolique me fait moi-même esquisser. J'admets que c'est difficile de me faire sourire, d'ailleurs ma mère me faisait sans cesse ce reproche, mais dans certaines situations loquaces, je ne peux retenir un rictus plus ou moins sadique.

- Je m'attends à tout venant de ta part.

- Je pourrais en dire autant, réplique mon acolyte en changeant de forme à la lueur du soleil qui commence à percer les fenêtres de mon salon.

À présent sous sa forme volatile, il croasse en agitant des ailes avant d'être un peu plus compréhensif :

- Je reviens te rendre visite ce soir, ne pars surtout pas sans moi !

- Pourquoi donc ? Tu comptes faire la nounou afin de savoir si je tiens toujours mon engagement auprès de toi après ce que tu m'as montré ? As-tu si peur de ce que je pourrais faire ?

- Ne te méprends pas ! Je souhaite seulement surveiller d'un peu plus près ce Caîn.

- Mmh. C'est assez vexant d'apprendre que je ne suis pas de bonne compagnie.

Ces mots m'échappent maladroitement de ma bouche. Il va vraiment falloir que je me reprenne, et au plus vite. 

L'ange s'arrête dans son élan afin de prendre son envol et me lorgne de ses yeux noirs luisants.

- Es-tu en train de sous-entendre que tu apprécies ma présence à tes côtés ?

- Je n'ai jamais dit ça. Si j'avais voulu le dire, je l'aurais fait sans tourner autour du pot, me renfrogné-je, gênée par son enthousiasme soudain.

En réalité, je suis ravie de l'avoir toujours non loin de moi, mais je ne le montre pas et ne souhaite pas l'admettre. Mes sentiments et émotions peuvent me déstabiliser et je ne veux pas que cela arrive. J'ai appris au fil des années et de mes désillusions qu'il ne fallait compter que sur soi-même et non sur les autres. Or, les sentiments peuvent tout détruire et tout gâcher. Aujourd'hui, je m'en passe et je le vis bien, être plus seule que jamais est la meilleure des choses qui a pu m'arriver.

Alors admettre que la présence d'Azraël me rassure, est comme si je démontrais que je suis encore faible après tout ce temps passé avec lui à écouter et appliquer ses conseils.

Les bras croisés, j'ignore le ricanement moqueur du corbeau. Il a bien appris à me connaître, mais je ne m'avouerais jamais vaincu. Mes émotions n'auront jamais le dessus sur moi. Plutôt mourir que d'y succomber.

AZRAËLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant